Le RSS permet :
– de ne suivre QUE les sites que l’on veut (sans subir des postes sponsorisés qui viendraient s’y glisser — bien-sûr oubliez Feedly pour ça, qui faisait (fait ?) exactement ça) ;
– de suivre ce que l’on veut : une playlist vidéo ? un blog ? un forum ? des modifs sur un Wiki ? des nouvelles photos sur un site de partage de photos ? Tout est possible : tant que c’est au format RSS, on peut tout regrouper au même endroit et c’est trié selon vôtre envie : par date, par type, par source…
– de suivre tout ça sur l’appareil que vous voulez. C’est comme l’e-mail : peu importe l’appareil, ça marche partout.
– de choisir l’outil que l’on veut. Il y a des centaines de lecteurs RSS que l’on peut installer sur son ordi ou sur son espace de stockage en ligne. Un lecteur ne vous plaît pas ? Pas grave, y a le choix.
– de faire votre propre lecteur RSS. Aucun lecteur RSS du marché ne vous plaît ? Apprenez à coder et faites le vôtre.
Le RSS, c’est vieux et low-tech.
Y a pas d’Ajax qui fait des requêtes à tout va, ni d’API à la mode : c’est juste du XML statique dans un fichier texte.
Mais ça marche, c’est ouvert, libre, gratuit.
À tous les sites : remettez vos flux RSS ! Ne soyez pas con et ne virez pas ça !
Il fut une époque où Twitter avait des flux RSS, où Youtube ne les cachait pas et où Facebook permettait à la fois de suivre un profil via RSS, et de publier le contenu d’un RSS sur votre « mur ». Tout ça c’est du passé : c’était trop pratique, trop simple, trop gratuit probablement. Faites pas comme eux.
e pourrait bien être l'une des plus grandes révélations historiques de ces dernières années. La révélation au mieux d'un mensonge, au pire d'une imposture. C'est à lire ce vendredi dans Le Figaro qui consacre une double page à ces chercheurs en histoire qui viennent de retrouver par hasard à Londres un manuscrit que l'on cherchait depuis deux siècles. Le manuscrit du Mémorial de Sainte-Hélène, les mémoires de Napoléon, qu'il avait dicté à son secrétaire.
Que révèle ce manuscrit ? La plupart des grandes citations attribuées à Napoléon ne sont sans doute jamais sorties de sa bouche. Il y a en effet d'énormes différences entre ce manuscrit et la version imprimée du Mémorial de Sainte-Hélène. La plus célèbre : "Quel roman pourtant que ma vie" ne figure pas dans le manuscrit. "Je suis le messie de la révolution" ne figure pas non plus dans le manuscrit. Pas plus que "j'ai voulu être le régénérateur de l'Europe". Autant de citations qui ont contribué à bâtir la légende napoléonienne.
Son secrétaire a-t-il pris des libertés avec la vérité pour redorer le blason de Napoléon ? Les propos qui lui sont attribués sont-ils totalement inventés ? C’est la nouvelle énigme face à laquelle se trouvent aujourd'hui les historiens.
The Conversation - 14 janvier 2021 par Arnaud Exbalin
licence Creative Commons Attribution/Pas de modification.
Le couvre-feu renvoie dans l’imaginaire collectif aux guerres du XXe siècle, imposé pendant le Blitz aux habitants de Londres en 1940 ou encore par le gouvernement français aux musulmans algériens en 1961.
Ce qui s’apparente à une mesure militaire – renforçant ainsi le ton martial tenu par certains chefs d’État, d’Elizabeth II à Emmanuel Macron – est au regard du temps long d’abord une mesure de police chrétienne visant à mieux marquer et à différencier le cycle du jour de celui de la nuit.
Au Moyen Âge et à l’époque moderne, avant l’éclairage généralisé, les citadins vivaient un couvre-feu permanent. Retour sur des siècles de confinement nocturne.
La nuit est longtemps restée imperméable aux curiosités historiennes. Mais les choses ont changé depuis une vingtaine d’années grâce aux travaux de Jean Verdon sur le Moyen Âge, de Simone Delattre sur les nuits parisiennes au XIXe siècle ou encore ceux d’Alain Cabantous pour l’époque moderne. Ces historiens ont insisté sur un moment décisif situé entre le XVIIIe et le XIXe siècle qui a vu le basculement d’un ancien régime nocturne tout modelé par la peur des ténèbres à un nouveau rapport à la nuit, où « sortir » est devenu une pratique socialement valorisée.
L’ouvrage de Simone Delattre publié en 2000 est une approche culturelle des pratiques nocturnes a marqué le champ historiographique des sensibilités et inspiré bon nombre d’historiens intéressés par la nuit.
Le vocable existe dès le Moyen Âge. Le couvre-feu – ou courfeu qui donne curfew en anglais – ne recouvrait pas la dimension d’exception qu’il revêt aujourd’hui. L’évolution sémantique qu’en donne Antoine Furetière (1690) est riche de sens pour le citoyen actuel : « signal de retraite qu’on donne dans les villes de guerre pour se coucher ». Une mesure, toujours selon Furetière, qu’aurait imposée Philippe de Valois au début de la guerre de Cent Ans qui consistait à sonner la retraite par la cloche de l’église ou celle du beffroi ; mais d’ajouter aussitôt qu’elle désigne aussi, au moment où il élabore son dictionnaire, la discipline « de se mettre à couvert des débauchés et des voleurs de nuit ».
Le couvre-feu est alors la norme dans l’ensemble des villes occidentales du XIVe au XVIIIe siècle ; les chartes de coutumes et les ordonnances de police fourmillent d’interdictions de circuler de la tombée de la nuit au lever du jour. Elle est à la fois une mesure préventive contre les incendies qui menacent les maisons en bois, de régulation des horaires de travail et de sûreté publique.
La nuit fait peur. Cette nuit-ténèbres peuplée de lycanthropes, de sorcières et d’êtres maléfiques, personnages qui ne filtrent plus aujourd’hui que dans les comptines pour enfants. Inventés par les théologiens et les démonologues, ils façonnèrent profondément les sensibilités. La nuit diabolique se double d’une nuit criminelle, elle aussi un produit des juristes qui élaborent un jus nocturnis (droit nocturne) où l’obscurité, parce qu’elle implique la préméditation, est toujours une circonstance aggravante dans l’échelle des délits et des peines. Les historiens ont pourtant démontré à partir d’analyses sérielles des archives judiciaires que crimes et larcins n’étaient pas plus nombreux la nuit que pendant le jour.
Voilà le déroulé d’une nuit ordinaire à Paris au XVe siècle en plein hiver. À la tombée du jour, les vêpres sonnent aux clochers des églises et des couvents. Il est entre 16h et 17h, les hommes et les femmes cessent de travailler et regagnent leur foyer. Certains traînent dans les tavernes des faubourgs ; les gueux sans logis cherchent tant bien que mal un abri sous un étal. On sonne complies à Notre-Dame, c’est la fermeture des dernières échoppes. Il est 19h, c’est l’heure du couvre-feu qui varie en fonction des saisons. La grande majorité des habitants se renferme alors à double tour. Quelques écoliers, dont un certain François Villon, s’attardent malgré le tintement à 21h de la grande cloche de la Sorbonne, chahutent ivres, cherchent à fracturer une porte ou un huis. Un peu plus tard, deux domestiques équipés de lanternes avancent à pas pressés à la recherche d’un chirurgien pour leur maître malade. Au loin, à de rares intervalles, passent les archers du guet. Exceptionnellement, le calendrier chrétien ménage des fêtes nocturnes qui outrepassent le couvre-feu : feux de joie de la Saint-Jean, torches des Brandons, chandelles de la Chandeleur.
Jusqu’au XVIIIe siècle, les dispositifs de contrôle des espaces nocturnes sont extrêmement rudimentaires : fermeture des portes des enceintes fortifiées, usage de chaînes pour entraver les rues principales et de grilles aux fenêtres, instructions données aux corporations pour faire respecter les horaires de travail, limitation des horaires d’ouverture des tavernes. Dans cette perspective, le couvre-feu est une manière de pallier la faiblesse numérique des forces de l’ordre. En vidant la ville des circulations humaines, le couvre-feu facilite les rondes opérées par les quelques gardes. La main forte déployée la nuit se substitue alors aux régulations sociales exercées par le voisinage pendant le jour.
Le guet est une obligation des corporations auquel s’ajoute à Paris le guet royal : 40 sergents à pied et 20 à cheval dans une ville qui frôle alors les 200 000 habitants selon Claude Gauvard. Et encore ce guet est-il notoirement inefficace : les sergents s’endorment, jouent aux cartes, se laissent corrompre par les malandrins. À Toulouse, à Perpignan mais aussi dans les Provinces-Unies comme à Leyde, des réveilleurs de nuit sont chargés de faire respecter le couvre-feu, patrouillent dans les rues, procèdent à des contrôles, chassent les ivrognes. À Sienne ou à Venise étudiée par Élisabeth Crouzet-Pavan, les Custodi di notte qui relèvent des magistratures municipales depuis le XIIIe siècle jouent un rôle similaire. À Mexico, dès le XVIIe siècle, les guardapitos puis les serenos sont des gardes nocturnes équipés d’une lanterne, d’un sifflet et d’une hallebarde.
Les serenos que l’on retrouve aux quatre coins de l’Amérique espagnole évacuent les ivrognes, chassent les mendiants, éradiquent les chiens errants tout en criant, à chaque demi-heure et d’une voix lancinante, le temps qu’il fait et l’heure qu’il est.
Il ne faut pas s’imaginer que le couvre-feu était synonyme d’interdiction stricte et totale de circuler dans les rues et, ce faisant, de penser que les rues des villes d’Ancien Régime étaient totalement désertes une fois plongées dans l’obscurité. Mais ceux qui se déplaçaient devaient avoir de bonnes raisons de le faire : appeler un curé pour administrer l’extrême-onction à un mourant, chercher une sage-femme pour un accouchement imminent, avoir une dérogation du maître pour travailler à des heures indues. Les passants devaient signaler leur présence en criant et en portant une lanterne à main, d’où le succès des porte-falots qui subsistent jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Gare à ceux qui circulaient armés et sans lumière ; gare également aux locataires sans le sou qui déménageaient nuitamment avec les meubles des propriétaires… En période de troubles, le couvre-feu devenait plus strict, comme au début de la Fronde en 1648 ou pendant la période révolutionnaire en 1792.
La grande révolution du XVIIIe siècle est la diffusion de la lumière artificielle. Ce qui nous semble aujourd’hui d’une banalité déconcertante – se promener dans des rues éclairées – est en réalité le résultat d’un processus qui s’étala sur près de deux siècles, du XVIIIe au XIXe siècle, un processus global qui transforme en profondeur notre rapport à la nuit : à Paris et à Londres dès la fin du XVIIe siècle, à Amsterdam et à Bruxelles au début du XVIIIe siècle, et plus tard, à partir des années 1770, à Genève étudiée par Marco Cicchini, à Madrid mais également de l’autre côté de l’Atlantique à Mexico où plus d’un millier de réverbères furent installés en 1790, à Boston, New York ou encore à La Nouvelle-Orléans au début du XIXe siècle.
Grâce aux travaux de Sophie Reculin, on sait que dans le Royaume de France la généralisation des lanternes à chandelle, puis à huile (réverbères dotés de miroirs), avant que le gaz et l’électricité ne s’imposent, fut un processus au long cours – ni linéaire, ni consensuel. Cette nouveauté était en effet loin de susciter l’approbation du voisinage : pourquoi éclairer les rues s’il n’y avait rien à y faire ? N’est-ce pas un moyen d’encourager les vices nocturnes ? L’éclairage public est alors un dispositif technologique dont le coût très élevé pour les municipalités entraîna une hausse des taxes sur les denrées. Il impliquait des contraintes techniques et matérielles : fixer les lanternes, les approvisionner en combustible, les allumer et les éteindre selon des horaires qui variaient selon la saison et la position de la lune.
En encourageant les déplacements nocturnes, la lumière artificielle suscitait à son tour de nouveaux forfaits et plaçait sous des réverbères le halo des amours vénales qui auraient dû, selon les hommes d’Église, rester dans l’ombre. Le bon fonctionnement de l’éclairage impliquait la présence constante d’allumeurs, la multiplication des patrouilles policières et donc un contrôle territorial plus prégnant. La police moderne, territorialisée, en arme et en uniforme, est en partie fille de la nuit.
Surtout, de manière silencieuse, l’extension progressive des durées d’éclairage et des espaces reconfigure la scansion du temps nocturne, repoussant plus loin dans la nuit le moment de la retraite et du confinement dans les logis. À mesure que la nuit s’ouvre aux loisirs noctambules dans des soirées qui s’étirent (théâtre, promenade, tavernes), les obsessions de la police migrent pour se focaliser sur les relâchements des corps : manifestations publiques de l’ivresse, jets d’urine, tapage. L’impératif du couvre-feu se dilue peu à peu dans les exigences nouvelles des urbanités nocturnes, un processus observable dans l’évolution du contenu des règlements de police.
Il faut rentrer franchement dans le XIXe siècle pour voir s’épanouir dans les grandes villes l’ère du noctambulisme. D’abord, sous la Monarchie de Juillet, un noctambulisme élégant porté par les élites et des dandys qui revendiquent l’euphorie d’une vie à contretemps ; ensuite sous le Second Empire avec l’haussmannisation, la généralisation de l’éclairage au gaz, le développement des grandes artères commerciales et des grands magasins : le noctambulisme se répand alors dans les couches populaires, à la faveur des bals et des cabarets qui se démocratisent et des cafés-concerts qui se développent sur les Champs-Élysées. La pratique du couvre-feu avait alors disparu avant d’être brutalement restaurée pendant l’occupation prussienne de Paris en 1870.
En définitive, et au regard du temps long du confinement nocturne, le couvre-feu imposé par les pouvoirs publics est d’un genre nouveau : ni mesure militaire, ni disposition chrétienne visant instaurer une alternance claire entre travail et repos, il relève d’une police sanitaire déployée dans le contexte très spécifique de la pandémie de Covid-19 qui, faut-il le rappeler, reste pour l’heure la moins « faucheuse » de l’histoire de l’humanité.
Wikipédia a 20 ans. Saviez-vous que vous pouvez lui donner un petit coup de jeune ? Deux solutions s'offrent à vous : utiliser les habillages de Wikipédia ou passer par un service tiers.
Wikipédia a donc vingt ans. Mais s’il est un point sur lequel l’encyclopédie peut sembler être restée dans les années 2000, c’est sur le design. D’accord, la critique est rude, et sans doute excessive. Il serait d’ailleurs faux de dire que l’apparence du site n’a jamais bougé ces deux dernières décennies. En outre, plusieurs habillages (Vector, Moderne, MinervaNeue, Monobook, Timeless) sont proposés à l’internaute.
Ces différents styles sont accessibles pour qui dispose d’un compte sur Wikipédia. Il faut se rendre dans le menu des préférences, en haut à droite de l’interface, puis dans l’onglet « Apparence », de choisir l’habillage et de valider. Des options avancées sont aussi fournies, si vous savez ce que vous faites. Les simples lecteurs ne sont pas délaissés : ils profitent du look par défaut du site, qui a été rafraichi au fil des ans.
Il existe néanmoins une solution que tout le monde ne connaît pas, alors qu’elle permet de transformer le design de Wikipédia, sans même avoir besoin d’un compte. L’astuce n’est certes pas récente — elle est évoquée sur le net depuis plusieurs années –, mais mérite un coup de projecteur à l’occasion de son vingtième anniversaire. Son nom ? Wikiwand. Il s’agit d’une surcouche graphique.
Le service peut tout à la fois être utilisé comme un site web (il y a un champ de recherche pour trouver une page Wikipédia, sur la version anglophone de l’encyclopédie) ou bien sous la forme d’une extension pour navigateur (Google Chrome et Mozilla Firefox), à installer pour que le style s’impose automatiquement dès que vous vous trouvez sur une entrée de l’encyclopédie.
Vous voulez voir ce que ça donne avant d’installer quoi que ce soit ? Voyez donc la page classique de Numerama sur Wikipédia et sa déclinaison visuelle une fois passée à la moulinette de Wikiwand. C’est le jour et la nuit : le panneau latéral est redessiné et colorisé, la partie centrale est remaniée, le sommaire est repositionné à gauche — idem pour les photos, quand il y en a.
Wikiwand est un projet distinct de la fondation Wikimédia. De fait, le service redirige sur son site les pages Wikipédia que vous voulez voir sur l’encyclopédie, afin d’y appliquer son interface graphique en question. Dès lors, compte tenu de son mode de fonctionnement, il a besoin d’accéder à l’activité du navigateur pendant la navigation. Cette permission est mentionnée sur la page du projet.
Wikiwand dispose d’une politique en matière de vie privée et de conditions d’utilisation. Ce procédé peut rebuter. Bien qu’il précise ne pas partager les informations collectées avec un tiers sans l’accord de l’internaute, le site fait état d’une collecte incluant l’adresse IP, pour des raisons légales, et les pages visitées sur Wikipédia sont aussi collectées.
Cette manière de faire constitue d’ailleurs un grief que plusieurs internautes adressent à Wikiwand. Si l’application demeure bien notée globalement, certains regrettent que le module ne fonctionne pas différemment. D’autres relèvent qu’il y a sans doute un peu trop de cookies et de traceurs sur le site — c’est certes banal sur le web, mais il n’est pas inutile de le mentionner quand même.
Cette approche ne vous rebutera peut-être pas, mais il paraissait utile d’en faire part. Le site, en tout cas, se veut rassurant. Il explique qu’il ne partage pas les informations personnelles avec des tiers sans autorisation explicite, sauf dans des cas très spécifiques et rares, comme un jugement. Les données peuvent avoir une utilité en interne, à des fins de diagnostic ou de statistiques.
Reste à savoir si cela convaincra. Sinon, il reste les designs de Wikipédia.
Parfois on m’a fait la remarque du genre « hé, mais tu as vu qui tu cites ? l’idée que tu propose vient d’un gros faschiste-pédo-tueur-nazi-pirate-communiste-traître ! ».
On me dit que je cite tantôt le FN, tantôt les Verts, puis les Africains, les Russes, les Aztèques, les pingouins, les Pokémon… que ça ne tient pas la route, qu’il n’y a pas de « logique ».
À ceux qui se demandent à quoi je joue, qui pensent que je me contredis, qui ne comprennent pas pourquoi je change toujours mes sources d’idées (voire d’inspiration), sachez juste que je ne regarde pas qui propose une idée, mais que je regarde l’idée en elle-même.
Ceux qui me font ces remarques sont — selon moi — ceux qui refusent d’attribuer une bonne idée à un salaud et une mauvaise idée à un génie. Et ça, c’est dommage : car même un crétin peut un jour avoir une idée qui va améliorer la face du monde.
La nature m’a donné un cerveau me permettant de réfléchir par moi-même et d’imaginer des choses d’une grandeur infinie. Et je devrais l’éteindre et suivre les autres aveuglément ? Navré mais non.
Je veux pouvoir être libre de penser par moi-même et pas par les autres. Je veux pouvoir être libre de dire quelque chose sans que l’on me sorte « ah t’as des idées de communistes » ou « ah tes idées sont capitalistes ». Stop ! J’ai des idées à moi, j’ai des idées qui me vont : on s’en fiche si elles ont été émises par untel ou par un autre : je les trouve bonnes.
On ne peut pas créer un monde meilleur en n’écoutant qu’une seule personne, qu’un seul groupe, qu’un seul parti politique ou un seul gourou. Le monde est construit parce que l’humanité toute entière est là ou a été là, parce que chacun peut donner ses idées et parce que le monde conserve celles qu’elle juge bonnes et rejette celles qu’elle juge mauvaises (un peu comme le fait la nature, avec la sélection naturelle), peu importe leur origine ou leur cause.
Je pense que la société devrait prendre ce qu’il y a de bon de tous les côtés plutôt que de prendre le bien et le mal se trouvant d’un seul côté (en politique, par exemple).
La perfection du monde devrait être le but recherché constamment, sans avoir à accepter quelque chose qui ne va pas.
Et c’est bien ce que je fais ici : partager des choses que j’estime être digne d’intérêt pour moi, peu importe leurs origines et spécialement si elles sont sorties de leur contexte.
Dès leur première mention, les Fremen sont présentés comme autochtones, nomades, autonomes et libres. Deux autres traits viennent compléter ce tableau : leurs yeux sont entièrement bleus et les femmes fremen sont les égales des hommes. Enfin, Thufir Hawat achève leur portrait par ces mots : « Ils portent tous ces grandes robes flottantes. Et ils puent autant les uns que les autres dès qu’ils sont en lieu clos. C’est à cause de ce vêtement qui récupère l’eau de leur corps. Ils appellent ça un distille ».
Bref, ce qui est central pour eux (l’eau) n’a pas le même sens pour les autres – ce pour quoi un vêtement spécifique les distingue – et ils « puent » : il s’ensuit une population méconnue car méprisée, et méprisée car considérée comme moins civilisée que la société dont Paul est issu. Le génie de Frank Herbert, c’est de représenter les Fremen selon une analogie syncrétique, faisant appel à un vaste ensemble de références.
Tout d’abord, l’association de la couleur bleue avec un peuple vivant au seuil du désert ne peut que faire penser aux « hommes bleus », expression qui désigne les Marocains du sud, les Maures et surtout les Touaregs, cette population jadis nomade, liée au Sahara central, et qui, à force d’employer l’indigo pour la teinture de ses vêtements, pouvait se retrouver avec du bleu sur la peau. À noter que ces mêmes Touaregs se désignent comme les « Imazighen », ou « hommes libres », ce qui se traduit en anglais par « free men ».
Par ailleurs, nombre des mots employés par les Fremen sont à consonance arabe. Enfin, le personnage de Liet-Kynes et Paul semblent inspirés de Thomas Edward Lawrence (1888-1935), l’officier de liaison britannique, témoin de la grande révolte arabe de 1916 à 1918, que l’on connaît surtout grâce au film de David Lean, Lawrence d’Arabie (1962). Les Fremen sont des Touaregs ou des Arabes.
Mais la mention de T. E. Lawrence nous donne une autre clef de lecture. En effet, Lawrence est le modèle de l’explorateur qui prend fait et cause pour la population qu’il devait domestiquer. En cela, son histoire résonne avec celle de toutes ces figures d’Américains d’origine européenne qui rejoignent les rangs des populations amérindiennes. Songeons à l’expression propre à la critique cinématographique de « rédemption mécanique » qui a été forgée pour désigner l’évolution du western, de la fin des années 1940 à la fin des années 1960. Au début, les « Indiens » (terme d’époque) sont hors champ et sont l’ennemi, ensuite ils passent dans le champ et deviennent des alliés, enfin ils deviennent des héros, comme dans Little Big Man (1970), film inspiré d’un roman de Thomas Berger publié en 1964. Mais peut-être que la figure la plus connue de l’Européen devenu « natif » (de manière illusoire) est celle de John Dunbar, dans le film Danse avec les loups de Kevin Costner (1990). Les Fremen sont un peuple premier qui se rebelle contre le joug de l’homme blanc.
Or, pour des Américains, la rébellion d’un peuple contre un oppresseur étranger réveille aussi l’imaginaire des minutemen. Ce terme fut utilisé dès 1645, et surtout à partir de 1774, pour désigner les habitants d’une ville américaine susceptibles, en deux minutes, d’être mobilisés, d’abord pour défendre leur cité, ensuite pour combattre l’Empire britannique lors de la révolution américaine. Les Fremen, ce sont alors les premiers Américains (au sens de « premiers citoyens des États-Unis ») qui repoussent la Couronne.
Mais cette dernière analogie peut être inversée. L’Empire américain, au moment où Frank Herbert écrit Dune, est engagé dans plusieurs aventures militaires : Cuba (1959-1961), Vietnam (1964). Les Fremen sont en ce cas les porte-drapeaux de tout mouvement de libération nationale, y compris des mouvements d’inspiration communiste, puisqu’ils ont une économie où la mise en communauté semble plus importante que la défense de la propriété privée.
Les Fremen ne sont pas les Touaregs, ni les Arabes, ni un peuple premier, ni les Pères fondateurs, pas plus les mouvements de libération nationale d’inspiration communiste. Ils sont tout cela à la fois. Complètement familiers pour notre imaginaire, et parfaitement étrangers à notre monde. Mais là où le syncrétisme de Frank Herbert prend tout son sens, c’est dans la sphère religieuse. Car les Fremen sont un mélange des adeptes des trois religions du Livre. Ils sont les armées de l’Islam du VIIe siècle, comme le suggèrent le Jihad Butlérien et leur vénération pour un prophète qui est chef spirituel et chef militaire, ils sont les Hébreux menés par Moïse à travers le désert, depuis la servitude jusqu’à la Terre promise, et ils sont les chrétiens qui vénèrent un homme qui est plus qu’un homme.
Une société égalitaire, mue par l’intérêt collectif, respectueuse de l’environnement, une société mobilisée, tendue vers un but, où hommes, femmes, enfants ont parts égales
Cette analogie religieuse multiple s’articule avec les analogies politiques décrites précédemment, notamment autour de cette idée, importante pour Herbert, que toute population tend à abandonner son libre arbitre au premier leader capable d’effectuer une synthèse des mythes qui la structurent. Dans cette perspective, Paul devient un Fremen (yeux bleus, distille, nouveau nom), et les Fremen les acteurs de l’histoire humaine car, tout simplement, les autres factions n’ont pas, à leur tête, de messie.
Ce triomphe final des Fremen donne en creux les traits de ce que devrait être l’humanité entière. Une société égalitaire, mue par l’intérêt collectif, respectueuse de l’environnement, une société mobilisée, tendue vers un but, où hommes, femmes, enfants ont parts égales. Mais c’est un triomphe ambivalent car il ne semble possible que par le biais d’une personnalisation extrême du pouvoir. C’est sans doute une des raisons qui expliquent que les Fremen nous parlent tant ils sont une métaphore complexe de l’humanité. Et selon l’âge auquel nous lisons Dune, nos propres croyances religieuses et nos convictions politiques, nous ferons saillir un trait plus qu’un autre. Seule certitude, nous ne parviendrons pas à épuiser la métaphore.
bjectif 100.000 bornes de recharges électriques d'ici à décembre. C'est la promesse du gouvernement. Mais cela sera t-il suffisant pour faire face à la demande exponentielle, et au boom des voitures vertes ? En attendant, entre les bornes hors service ou occupées, recharger son électrique ou son hybride en dehors de chez soi est souvent synonyme de galère.
Confinement ou pas, malgré la crise, les ventes de voitures électriques ont donc bondi, +180% par rapport à 2019. Et visiblement, tous ceux qui sont passés à l'électrique ne le regrettent pas. L'essayer c'est l'adopter ! C'est ce qui ressort d'un sondage que vient de publier l'Avere auprès des utilisateurs de véhicules électriques. Tous les propriétaires d'une voiture pure électrique ou hybride se disent satisfaits à 96 %. 70 % sont même très satisfaits. C'est donc un plébiscite.
Ce qui séduit le plus ces nouveaux propriétaires, c'est le confort de conduite, l'absence de bruit. Ensuite l'entretien plus facile, avec une électrique, plus de vidange par exemple. Au final le coût est inférieur de 15 à 20 % par rapport à une essence ou un diesel. Avec aussi un budget carburant divisé par deux ou trois...
Mais dans ce portrait idyllique, il y a un hic : les bornes de recharge. C'est le principal point noir. Les utilisateurs estiment recharger leur véhicule 3 fois par semaine, en moyenne. Principalement à leur domicile. 300.000 points de recharge privées c'est 10 fois plus que les bornes publiques. Et lorsque les automobilistes doivent se brancher à l'extérieur, c'est carrément l'agacement. Près de 70% se déclarent insatisfaits des bornes publiques car trop souvent en panne voire occupées par des voitures essence ou diesel garées à ces places qui leur sont théoriquement réservées.
Aujourd’hui, amis des mots, c’est cours de latin ! Mais, vous savez, d’une certaine façon, le latin n’est jamais que du très très très vieux français. Ce qui est rigolo, c’est que le "bon" français est issu d’un "mauvais" latin. Enfin, d’un latin pas très châtié. Celui qu’on appelle le latin "vulgaire".
Entendons-nous bien : à l’origine, vulgaire n’a rien de péjoratif. Il vient du latin vulgus, "la foule". Le sens originel de vulgaire, c’est "populaire", c’est celui que l’on retrouve dans vulgariser, que le Robert définit comme "répandre des connaissances en les mettant à portée du grand public".
Donc, me demanderez-vous, le français n’est pas issu du latin classique ? Eh bien, comment pensez-vous que, en Gaule, le latin ait supplanté le gaulois ? Pas par une invasion de profs de langue. Après la conquête de César, en milieu du Ier siècle avant J.-C., le latin a peu à peu été adopté par les populations locales parce qu’il est devenu la langue des échanges administratifs et commerciaux. On est bien avant l’invention de l’école, du cartable, du livre scolaire et de la méthode Assimil, donc comment apprend-on le latin ? En se frottant aux envahisseurs qui le parlent, qui sont avant tout des légionnaires, des commerçants, bref pas des lettrés.
Donc, nos Gaulois sont confrontés à un latin populaire, une langue parlée, qui n’est pas le latin classique et qui peut en être très différent ! Prenons l’exemple du mot cheval. En latin classique, le "cheval", c’est equus, en latin vulgaire, c’est caballus : rien à voir ! Et c’est caballus qui sera adopté chez nous, donnant caval au Moyen Age puis cheval aujourd’hui. Or, par rapport à equus, caballus était à la fois un terme populaire et péjoratif.
Un "canasson", si vous voulez ! Dans son livre, Etcetera, etcetera, chez First éditions, Julien Soulié donne un autre exemple du même phénomène : celui de la tête. C’est le mot testa qui a donné notre tête, un terme du latin vulgaire qu’on pourrait traduire par "la caboche", "le carafon" ou "la tronche", alors que la tête en latin classique se dit caput (qui, lui, donnera la capitale ou le capitalisme). On peut aussi citer le mot champ, qui vient du latin vulgaire campus, alors que le mot classique était ager.
Il n’y aurait donc aucune trace de latin classique en français ?
Eh si, le français a également emprunté au latin des lettrés romains, mais plus tard. Et d’ailleurs, c’est ce qui explique certaines étrangetés du français actuel.
"À partir du XIVe siècle, quand nos clercs, pétris de culture antique, eurent besoin d’inventer de nouveaux mots, vers qui se retournèrent-ils ? Vers le latin, mais le latin écrit, donc classique », raconte Julien Soulié.
C’est sans doute pourquoi nous ne pratiquons pas le "chevalisme" mais l’équitation, par exemple, les clercs ayant créé ce mot en se basant non sur le latin vulgaire caballus mais sur equus, du latin classique. C’est aussi pourquoi ceux qui font profession de cultiver les champs sont aujourd’hui des agriculteurs, mot bâti sur le latin classique ager, alors que si on avait décidé de construire le nom de leur métier sur le mot champ, on les appellerait peut-être des "champions" !
Jadis indispensable à notre organisation quotidienne, ce carnet dont les couvertures cuir colorées et le papier fin velouté font encore rêver les amoureux de papeterie est relégué au placard, victime des plannings numériques.
Je le lorgnais depuis le trottoir, le nez quasiment collé à la vitre du numéro 32 de la rue des Francs-Bourgeois, dans le Marais: il semblait m'attendre, lisse, gonflé, écarlate, adulte. Cher. Un magnifique agenda Filofax, les pages du semainier ligné grandes ouvertes dans sa couverture cuir qui me faisait de l'œil.
La devanture de la boutique Filofax –disparue en 2013– et ses agendas multicolores étaient devenus une étape incontournable de mes promenades parisiennes. Pigiste précaire, hors de question pour moi à l'époque d'en franchir le seuil. Des années plus tard, je craque pour un joli Filofax rouge (en simili cuir) qui m'accompagne encore aujourd'hui, quand la plupart de mes congénères (journalistes ou non) ont opté pour un Google Agenda bien plus pratique et moins contraignant.
Certes, il est lourd, épais, griffonné, déchiré, très souvent illisible. Mais sans lui, je suis perdue. Même en temps de confinement où il ne se passe pas grand-chose à noter.
«Inscrire une information sur son agenda personnel, c'est faire entrer cette information (événement, renseignement pratique, adresse) dans son territoire le plus personnel, son espace d'intimité. [...] Il est alors loisible de comprendre que les personnes égarant par inadvertance leur agenda se trouvent tout d'un coup détemporalisées, désocialisées, privées d'engagement et par le fait même dépersonnalisées», écrivait en 2004 le psycho-sociologue Jean-Pierre Boutinet.
Comment, alors, avons-nous pu abandonner ce précieux objet pour un outil virtuel qui, il est vrai, est physiquement imperdable mais semble aussi complètement impersonnel? Et l'organisation de notre temps, et donc de nos vies, est-elle vraiment plus simple grâce au tout-numérique?
Nourriture de nostalgie
Comme moi, Mathilde ne peut vivre sans agenda. Artisane textile, elle collectionne les semainiers depuis le collège. À la fac, après quinze ans de Filofax, adoré pour son design mais aussi ses gadgets (notes, intercalaires), elle lui fait une infidélité pour le Moleskine 12x21cm «plus pratique à mettre dans des petits sacs». Au fil des ans, Mathilde conserve ses pages griffonnées de listes de films à voir, de disques, d'envies de voyages, et de choses diverses. «L'agenda, c'est pour moi un espace où je consigne à la fois le quotidien et mes rêves.» Les jours de la semaine s'affichent à gauche, les notes à droite.
Rigoureuse et méthodique, Mathilde a toujours refusé le passage au numérique: «Ce n'est pas si simple à utiliser. Et pour moi c'est même une sorte de barrière. J'ai besoin d'une vue d'ensemble, de pouvoir feuilleter. Et puis j'aime la trace de l'écriture, la possibilité de raturer, de séparer les choses», souligne celle qui relit régulièrement ses anciens agendas, devenus «nourriture de nostalgie».
«L'adoption de l'agenda électronique a complètement effacé toute trace d'intimité, la sienne mais aussi celle de toutes les personnes extérieures à l'univers professionnel», analyse François-Xavier de Vaujany, professeur de sciences de gestion à PSL, Université Paris-Dauphine et spécialiste des nouvelles formes du travail. Certains découvraient un dessin de leurs enfants dans leur agenda, pour d'autres c'était une liste de courses. Pour Mathilde, c'est le lieu où elle note systématiquement la date d'anniversaire de ses proches ou d'autres événements à fêter. «C'est une forme d'attention envers les autres. Pour autant, mon agenda n'est pas mon journal intime, je n'y écris aucun état d'âme.»
L'agenda papier permet aussi de se «décharger mentalement», remarque Diane Ballonad Rolland, formatrice, directrice du cabinet Temps & Équilibre. «Les gribouillages, les traces donnent une sensation de contrôle et permettent aussi de garder une forme de chronologie dans sa vie.»
Une impression que partage Emmanuelle Léon, spécialiste de l'organisation du travail. Adepte de l'agenda papier jusqu'en 2019, cette enseignante-chercheuse de l'école ESCP s'est récemment mise «par nécessité» à l'agenda électronique, avec notamment les options de partage d'agenda pour les cours et les réunions.
Jonglant toute l'année 2020 avec les deux formes d'agendas, elle admet avoir raté quelques rendez-vous. Pour la chercheuse, le «contrôle du temps est un luxe et sa gestion, un enjeu de société majeur. [...] On a gagné en flexibilité avec le télétravail mais la synchronisation et le partage d'un agenda autrefois personnel ont paradoxalement donné lieu à une inflation de prises de rendez-vous et une surcharge de travail qu'on évalue moins bien. Potentiellement, cela peut aggraver le stress au travail.»
L'accumulation des informations brouille parfois l'organisation de ces dernières. Or, rappelle Diane Ballonad Rolland, «la gestion des priorités est au cœur de la gestion du temps». Et d'observer que le fait de partager son emploi du temps affecte d'autant plus la charge mentale des femmes, amenées à organiser le temps de tout le monde («rendez-vous médicaux des enfants», «réunion Zoom avec la famille», «Doodle pour la résa de la loc'»).
Perte d'intimité
Le rappel par notifications –un petit outil lancé en 2009 notamment par l'entreprise Research in Motion, créatrice du Blackberry– s'immisce de plus en plus dans la sphère privée.
«Les objets hybrides comme les agendas partagés créent de l'intrusion: on a le sentiment que l'entreprise à un œil partout», explique François-Xavier de Vaujany pour qui l'avènement du télétravail et sa forme exacerbée avec la crise sanitaire ont complètement brouillé les temporalités, et donc la nature des objets qui les accompagnent.
La chercheuse Emmanuelle Léon fait le lien entre les synchronisations multiples d'agenda, les mails, les rappels, et une organisation du travail très, trop encadrée. «Il me renvoie un peu à cette sirène du monde ouvrier qui sonnait les étapes de la chaîne. Les notifications c'est pratique, mais très intrusif.»
Pour retrouver un peu de sérénité, certains inventent des plages horaires dans leurs agendas partagés pour respirer, observe François-Xavier de Vaujany. Ou juste pour mieux travailler, sans constantes interruptions, renchérit Emmanuelle Léon qui constate, inquiète, un transfert des méthodes de management par le contrôle permanent dans l'organisation à distance
Dans ce tourbillon d'outils numériques dits de workflow (des to-do lists à Trello, Evernote et autres Slack ou WhatsApp) le recours au papier permet de respirer.
«Les gens ont besoin de se raccrocher à des choses tangibles, qu'ils maîtrisent pour protéger leur intimité», souligne François-Xavier de Vaujany qui, s'il n'observe pas de retour massif au papier, perçoit certains avantages intemporels. «Les agenda papiers, les carnets remplissent cette fonction. C'est une forme physique qui permet de passer du symbole au concret.» Selon une étude de ScienceDirect portant sur une population étudiante, le simple fait de noter physiquement une information permet non seulement de l'évacuer mais aussi de mieux la retenir sur le plan cognitif et d'optimiser sa capacité ensuite à effectuer des recherches (en ligne par exemple).
Cette possibilité de s'organiser par tâches et informations a été au cœur de la conception de l'Agenda Planning élaboré en 1952 à Marseille par le Dr Beltrami, créateur du fameux Quo Vadis.
Marque leader dans les années 1960, le Quo Vadis et son format Ministre 16x24, objet fétiche du cadre sup', atterrit rapidement sur tous les bureaux. Aujourd'hui, l'usine de Carquefoux, près de Nantes, fabrique encore quelque 8,2 millions d'agendas de la marque, rachetée en 2002 par le groupe Clairefontaine-Exacompta. «Les gens veulent désormais un agenda unique, personnalisé qui leur ressemble», souligne Jérôme Nusse, PDG de Quo Vadis, qui a notamment développé l'offre vers des collaborations avec d'autres marques de papeterie contemporaine ou des agendas numérisables.
Malgré ces efforts, les plus jeunes, ceux «qui naissent avec le numérique» restent hors cible. «Les agendas Quo Vadis séduisent ceux qui ont encore un rapport fort avec l'écrit. C'est un acte engagé en quelque sorte», relève celui qui conserve tous ses agendas, pour ne pas avoir l'impression de «jeter» sa vie. Réfléchissant à de nouveaux marchés, Quo Vadis songe à adapter son semainier noir vers des corps de métiers spécialisés comme le personnel soignant –un clin d'œil qui aurait fait plaisir au docteur Beltrami, décédé à l'âge de 102 ans début septembre 2020. Et attirer les fourbus du vertige numérique?
Tu as faim ? J’ai une pomme. Partageons là. Du coup, je n’ai mangé qu’une demi-pomme. Mais j’ai gagné ton amitié. Tu as une idée ? Partageons là. Du coup, nous voilà toi et moi avec une idée. Mieux encore : ton idée vient de m’en susciter une autre que je te repartage, en retour. Pour te permettre d’en trouver une troisième peut-être.
Une pomme est un bien rival. Cette notion désigne un bien dont la consommation par une personne empêche la consommation par d’autres. Ce qui relève de l’information ne l’est donc pas ; du coup, partager de l’information n’appauvrit pas … Sauf si on considère que l’autre en profite ? Peut-être … même pas. Découvrons cette histoire.
Il était une fois, ah non : il était deux fois.
Il était une première fois, bien avant l’informatique, l’idée de rétribuer qui contribue au perfectionnement du métier à tisser, dans le Lyon du XVIIIe siècle. Les corporations de marchands et la municipalité choisirent de récompenser qui adapte un nouveau système à un grand nombre de métiers à tisser. Cette politique d’innovation économique ouverte basée sur une stratégie gagnante-gagnante de partage des innovations technologiques (travailler ensemble plutôt que de tenter de cacher son savoir et de tuer les autres pour finir par mourir dans un désert économique) a permis à Lyon, devant Nottingham par exemple, de devenir leader sur ce secteur.
Pour le fameux métier à tisser de Jacquard, d’aucuns y voient un génie, d’autres de dire qu’il n’a rien inventé. Les deux ont tort et raison. Joseph Marie Charles dit Jacquard n’est pas un inventeur, c’est un intégrateur. Basile Bouchon a créé une machine à tisser à aiguille, Jean-Baptiste Falcon a complété la machine avec un système de carte perforée pour bénéficier d’un programme des gestes à mécaniser, et Jacques Vaucanson, a mis au point les cylindres automatiques pour soulager les utilisateurs en leur évitant d’avoir à faire tout cela à la main. Le métier de Jacquard est un aboutissement. C’est le fait que toutes ces innovations furent partagées publiquement qui permit de dépasser le monde anglo-saxon empêtré dans un système de protections avec des brevets, sur ce secteur économique.
Et il était une autre fois l’informatique.
L’informatique est une science et depuis toujours les connaissances scientifiques se partagent, se visitent et se revisitent pour pouvoir les vérifier, les confronter, les critiquer, les dépasser. À de rares exceptions près, les scientifiques qui ont travaillé isolément, dans le plus grand secret, sont restés … stérilement isolés. La science n’avance plus que collectivement et il est important de toujours se battre pour mettre en avant ces valeurs d’une science ouverte. Au début de l’informatique, les algorithmes se partageaient comme les équations mathématiques, avec des communautés de développeurs qui s’entraidaient. Et puis, avec la découverte du potentiel commercial des logiciels et sous l’influence notamment de Bill Gates, la notion de “copyright” s’est imposée en 1976, faisant du logiciel un possible bien propriétaire, en lien avec l’émergence d’un secteur d’activités nouveau et très vite florissant, au moment de l’avènement de l’informatique grand public qui est devenu omniprésente. Mais cette réglementation engendrera tellement de contraintes que 45 ans plus tard, même Microsoft s’investit de plus en plus dans le logiciel libre. L’intérêt réel de grandes firmes comme IBM ou Microsoft dans ce nouveau type de partage de connaissances marque un tournant.
Quel intérêt à une telle démarche ?
On peut invoquer de multiples raisons : pour que les personnes qui travaillent sur des projets parfois gigantesques puissent s’entraider, pour que l’on puisse étudier un logiciel complexe dont le fonctionnement doit rester transparent (par exemple pour mettre en place un système de vote numérique), pour que économiquement on crée des “biens communs” qui puissent permettre au plus grand nombre de développer ce dont il ou elle a besoin, et faire des économies d’échelle, comme par exemple lorsqu’il s’agit de corriger des bugs.
Un logiciel libre garantit quatre libertés fondamentales :
– utiliser le logiciel
– copier le logiciel
– étudier le logiciel
– modifier le logiciel et redistribuer les versions modifiées.
Et si cette démarche d’ouverture ne se limitait pas au logiciel ? Et si comme Wikipédia qui a permis de “libérer” les connaissances encyclopédiques humaines, qui avaient été enfermées sous forme de bien marchand, on faisait en sorte de s’organiser de manière collégiale, en privilégiant l’entraide et le partage pour d’autres grandes créations humaines ?
L'icône pour la fonctionnalité Meet Now (réunion) s'incruste dans la barre des tâches de Windows 10.
En septembre dernier, Microsoft a commencé à déployer auprès de certains Windows Insiders une fonctionnalité Meet Now, avec l'apparition d'une icône idoine à droite de la barre des tâches de Windows 10, dans la zone de notification.
Le déploiement a pris de l'ampleur avec une mise à jour récente de Windows 10 et ne concerne plus seulement les Windows Insiders, mais le commun des utilisateurs du système d'exploitation.
L'icône en forme de caméra est en lien avec l'introduction de Meet Now dans Skype pour organiser ou participer à une réunion. C'est une fonctionnalité de conférence pour des appels vidéo gratuits pour laquelle il est précisé qu'aucune inscription ou téléchargement n'est nécessaire.
En l'occurrence, il est possible de créer ou rejoindre une réunion Skype directement depuis la barre des tâches de Windows 10 sans la nécessité d'un compte Skype. Le cas échéant, cela passe par une ouverture de Skype sur le Web dans le navigateur.
Lors de son lancement au printemps dernier, la solution Meet Now basée sur le service Skype a été largement perçue comme une réponse à Zoom. Reste que le déploiement massif de la fonctionnalité via la barre des tâches de Windows 10 peut irriter.
Quoi qu'il en soit, il est tout à fait possible de supprimer l'icône. Il suffit de se rendre dans les paramètres de la barre des tâches et zone de notification. Deux possibilités, avec la sélection des icônes à afficher dans la barre des tâches, l'activation ou la désactivation d'icônes système.
En octobre, plus de deux ans après la disparition du dernier caribou de la vallée de la Maligne dans le parc national de Jasper, Parcs Canada a annoncé un plan provisoire de reproduction en captivité des caribous. Les femelles d’autres troupeaux seront rassemblées et enfermées dans une installation près de la ville de Jasper.
Le plan doit d’abord être évalué par des experts, ce qui aura probablement lieu en janvier. Mais Stan Boutin, biologiste à l’Université d’Alberta, voit ces solutions de dernier recours comme étant nécessaires pour sauver les troupeaux de caribous.
Il ne reste plus que trois troupeaux dans le parc national de Jasper. Aucun d’entre eux ne se porte bien. Le troupeau de Tonquin, qui compte 45 têtes, a diminué du tiers depuis 2010. Celui de Brazeau ne compte plus que 15 caribous et aucun ne compte assez de femelles pour faire croître la population. Le dernier bastion est le troupeau À la Pêche, avec 150 caribous migrateurs à l’extrémité nord du parc.
Parcs Canada cherche des moyens de sauver les caribous depuis des décennies. En 2002, la société d’État a proposé un plan de fermeture de la route Maligne, qui mène à la base de l’aire d’hivernage alpine du caribou, afin de rendre cette zone plus difficile d’accès pour les loups prédateurs.
Mais les fonctionnaires ont abandonné l’idée quatre jours après que le plan ait été rendu public et que le monde des affaires s'en soit plaint. Le plan de rétablissement du caribou n’a jamais atteint la phase de consultation publique. Le monde des affaires s’en est félicité tandis que les biologistes du parc en ont été fort attristés.
Les scientifiques s’inquiétaient qu’un animal noble comme le caribou puisse disparaître d’un parc national au Canada, comme ce fut le cas pour le troupeau de Banff en 2009. Dans le magazine Conservation Biology, plusieurs ont fait remarquer que le dernier caribou forestier du sud du parc national de Banff est mort le jour où la physe des fontaines de Banff, un petit escargot, devenait la seule espèce, sur les 449 inscrites, à bénéficier du processus de conservation complet prévu dans les lois canadiennes sur les espèces en péril.
La législation fédérale oblige le gouvernement à protéger les espèces en péril, et en 2011, il a lancé un programme de reproduction en captivité du caribou des montagnes du sud avec Parcs Canada, le gouvernement de la Colombie-Britannique et le zoo de Calgary. Ce programme devait être un nouveau départ et la pierre angulaire de la stratégie de conservation du caribou, mais l’accord a pris fin en 2015.
Les programmes de conservation fondés sur la science dans les parcs en montagne se sont longtemps opposés au tourisme. Le responsable de la conservation des ressources de Jasper a été licencié en 2015 et plusieurs soupçonnent que c’était parce qu’il avait fait pression pour publier un rapport sur la façon dont l’expansion des pistes de ski de Jasper affecterait le troupeau de caribous menacé du Tonquin.
Son départ a coïncidé avec un projet d’hébergement touristique dans la vallée de Maligne.
Il n’y a pas que les caribous de Jasper, Banff et d’autres parcs nationaux qui ont souffert. Dans les années 1970, Parcs Canada a hésité à mettre un terme au grave déclin du caribou forestier dans le parc national Pukaskwa, sur les rives du lac Supérieur.
Il n’y avait alors qu’environ 24 caribous, et la population est passée à seulement cinq individus en 2009, avant de disparaître complètement. Les caribous n’étaient pas si présents à Pukaskwa, mais ne rien faire en observant leur disparition ne devrait pas non plus être une option.
Une personne tenant une antenne en l’air près d’un lac avec en toile de fond des montagnes enneigées
Parcs Canada a fait son effort pour les espèces menacées et la reconstitution de la faune. Les bisons, parexemple, ont été réintroduits avec succès à Banff récemment,mais cette espèce peut s’adapter à presque tous les écosystèmes. Parcs Canada a également réussi l'opération délicate d’éliminer l’omble de fontaine, une espèce de truites invasive en introduisant un pesticide dans certains lacs, ce qui aurait pu être un cauchemar en matière de relations publiques.
Les caribous sont différents. Tout comme les ours polaires, ce sont des animaux qui subissent les effets du climat. Ils ont besoin de zones montagnardes, de tourbières et de marais boisés pour échapper aux prédateurs, fuir les feux de forêt et trouver de la nourriture.
Ils ont du mal à le faire en dehors des parcs nationaux, où les tourbières situées sur des sites d’exploitation pétrolière et gazière, d’exploitation forestière et d’extraction du charbon sont scindées et grugées par les routes, les lignes sismiques et les opérations d’exploitation des sables bitumineux.
En 1992, le naturaliste Ben Gadd a prédit que les caribous disparaîtraient de Jaspersi Parcs Canada ne mettait pas en place deux grandes zones d’exclusion pour les protéger. Lui et d’autres membres de la Jasper Environmental Association avaient l’oreille des biologistes du parc à l’époque, mais pas le soutien d’Ottawa.
Les hauts fonctionnaires se sont toujours pliés à la volonté des milieux d’affaires d’agrandir les pistes de ski et de construire des routes et des monuments, dont le monstrueux monument Mère Canada dans le parc national du Cap-Breton, même si cela violait l’esprit de la Loi sur les parcs nationaux.
Les ministres viennent rarement à la rescousse, car peu d’entre eux restent longtemps en poste. Depuis 1971,30 ministres ont été responsables de Parcs Canada. Deux seulement ont duré plus de trois ans,et16 ont occupé le poste pendant moins d’un an ou un peu plus.
En 2018, réalisant que la société d’État avait perdu son âme, Catherine McKenna, ex-ministre de l’Environnement, avait déclaré qu’il était temps de remettre Parcs Canada sur la voie de la conservation. Alors que McKenna est maintenant ministre de l’Infrastructure, les juges et les groupes environnementaux tentent de tenir Parcs Canada et le gouvernement fédéral imputables.
Le programme de rétablissement des caribous à Jasper est grandement nécessaire, mais il fait probablement trop peu, trop tard. Il n’y a tout simplement plus assez de caribous pour faire grossir les troupeaux.
Cela suggère également qu’il est plus facile pour le gouvernement canadien d’élever des caribous en captivité que de s’occuper de ce qui les menace dans la nature. Et c’est un triste constat sur une société d’État dont la « priorité » est de protéger « les patrimoines naturel et culturel de nos zones sensibles et de s’assurer de leur intégrité »
Le Premier ministre Justin Trudeau n’a rien déclaré sur l’intégrité écologique des parcs nationaux lorsqu’il a confié à Jonathan Wilkinson le mandat de supervision d’Environnement Canada et de Parcs Canada. Il faut maintenant un conseil consultatif national doté de pouvoirs légaux et contraignants, qui puisse assurer l’indépendance de Parcs Canada et le protéger de l’ingérence politique. En cette ère de changements climatiques, le maintien du statu quo n’est pas un gage de succès.
(Re)définir la publicité
La page Wikipédia la concernant est éloquente, elle commence ainsi « La publicité est une forme de communication de masse, dont le but est de fixer l’attention d’une cible visée (consommateur, utilisateur, usager, électeur, etc.) afin de l’inciter à adopter un comportement souhaité : achat d’un produit, élection d’une personnalité politique, incitation à l’économie d’énergie, etc. »1fr.wikipedia.org/wiki/Publicité. Elle ne s’éloigne pas des définitions plus classiques où l’on retrouve toujours le fait « d’inciter », de « promouvoir », « d’exercer sur le public une influence, une action psychologique afin de créer en lui des besoins, des désirs »2Voir la définition du Larousse ou même du Trésor de la langue française.
Il est important de poser ces définitions pour sortir des chaussetrappes où la publicité serait entendue, dans son sens étymologique, comme le fait de rendre quelque chose « public », de le faire connaitre et serait assimilée à de la simple communication, voire à de l’information du public. Non, la publicité n’est pas là pour échanger ni pour informer, elle est là pour inciter. Elle agit sur nos schémas cognitifs, nos pensées et nos rêves, sur nos « temps de cerveaux disponibles »3Selon la formule de 2004 de Patrick Le Lay alors PDG de TF1. pour les modifier, majoritairement dans des logiques de consommation commerciale voire de propagande politique.
Ainsi, une personne qui tire des revenus de la publicité tire des revenus de la modification des processus cognitifs des individus et donc quasi systématiquement de leurs manipulations dans des actes de consommation potentiellement inutiles et néfastes.
Le deuxième point important à rappeler est que la publicité ne crée pas en soi de valeur et toute l’énergie qui y est investie peut être perçue comme gaspillée. Elle est susceptible de créer des besoins ou peut réorienter des pratiques, mais cela sans faire appel à des choix conscients ou informés. Elle joue sur les désirs, sur les fonctionnements cognitifs, sur nos peurs, etc.
À l’échelle sociétale, la publicité est un surcout de paiement. On subit la publicité dans la rue comme sur Internet et on paye ces influences mentales, majoritairement non souhaitées, quand on achète un bien ou un service.
La publicité est donc payée aussi bien cognitivement que monétairement.
Une définition sarcastique en creux de la publicité pourrait donc être : le symptôme d’une société malade qui paye une industrie parasite pour se faire manipuler.
Pour en résumer brièvement quelques-uns, la publicité a pour cout sociétaux :
La modification des comportements orientée par des logiques mercantiles et adressée surtout aux personnes qui sont les plus vulnérables à ces influences, et notamment aux enfants ;
La création de besoins et les conséquences notamment environnementales et sociales qui les accompagnent, par la surconsommation de biens (nouvel ordiphone, voiture…) ;
Des utilisations à des fins de propagande politique et donc de perversion de l’idéal des logiques démocratiques ;
Des liens de contrôle des médias, dont les informations seront influencées par ce lien de dépendance4La dépendance de nombreux vidéastes aux revenus de NordVpn en témoigne assez clairement, même quand ceux-ci restent caustiques à ce sujet cela reste très édulcoré, voir par exemple « Pourquoi NordVPN est partout ?! », Un créatif, 30 mai 2019, publié sur https://www.youtube.com/watch?v=9X_2rNC6nKA ;
La construction ou la reproduction de normes sociales par des pratiques de communication de masse qui viennent influencer et polluer nos imaginaires.
Malheureusement, la publicité a trouvé avec Internet un terrain de jeu sans égal qui n’a fait que renforcer ses conséquences.
Le modèle publicitaire, le péché originel d’Internet
Internet n’a pas été pensé et spécialement conçu pour des pratiques économiques. Facilité de transmission de l’information et de son partage, pratiques décentralisées, numérisation des contenus et une reproduction à cout marginal… En dehors des couts d’accès à Internet qui étaient eux onéreux (matériel informatique et abonnements liés au débit), la navigation en ligne et même les premiers services numériques ne requéraient aucun paiement. Les premiers temps d’Internet témoignent ainsi de nombreuses pratiques bénévoles, amatrices, libres, d’expérimentation, de partage, etc. un certain idéal paradisiaque5Attention, tout était loin d’être parfait sur bien d’autres sujets. pour nombre des premiè·res internautes. La déclaration d’indépendance du cyberespace6John Perry Barlow, « A declaration of the independance of Cyberspace », 8 fév. 1996, Davos, https://www.eff.org/cyberspace-independence de John Perry Barlow témoigne de cet enthousiasme et on peut pourtant voir un certain tournant symbolique dans le fait qu’elle ait été réalisée dans le cadre du Forum économique mondial de Davos.
Les entreprises ont ensuite saisi l’importance de ce nouveau média et ont commencé à l’investir. Elles se sont toutefois confrontées à un problème : un rejet majeur de toute possibilité de paiement en ligne dû aussi bien à des craintes (plutôt justifiées) liées à la sécurité des données bancaires, mais aussi, et surtout, à des pratiques déjà ancrées d’accès gratuit. Pourquoi payer pour une information alors qu’elle est déjà présente en accès libre sur un autre site ? Pourquoi débourser une somme pour un service alors que tel prestataire me l’offre « gratuitement » ?
Assez naturellement de nombreuses personnes se sont tournées vers la publicité pour obtenir des revenus en ligne, le modèle était connu et malgré quelques premières réticences des annonceurs les audiences étaient en pleine croissance et ils se sont ainsi laissés convaincre.
Le développement de la publicité sur Internet n’a pas été exempt de tout heurt, le tout premier mail publicitaire (spam) en 1978 a, par exemple, connu une vive réaction d’indignation.7Brad Templeton, « Reaction to the DEC Spam of 1978 », https://www.templetons.com/brad/spamreact.html De la même façon, les bloqueurs de publicité, petits outils qui bloquent techniquement les différents affichages publicitaires sont apparus et ont été rapidement adoptés au moment où la publicité a commencé à inonder de nombreux sites pour maximiser les « impressions publicitaires ». L’invasion publicitaire est devenue trop forte et les internautes avertis se protègent ainsi des multiples « popups », affichages conduisant vers des sites malveillants, renvois et rechargements intempestifs, etc.
Le déluge publicitaire a envahi ce « paradis » et l’a durablement déséquilibré. La gratuité bénévole et altruiste des débuts a été remplacée par une apparence de gratuité. Rares sont les services en ligne (et très spécifiques) qui réussissent, même aujourd’hui, à obtenir un paiement direct de la part de leurs utilisateurs-clients face à la distorsion de concurrence induite par ce trou noir de la gratuité publicitaire et l’exploitation des biais psychologiques des utilisateurs-produits par la publicité.
Cela a pu faire dire à Ethan Zuckerman, chercheur sur les questions touchant aux libertés à l’ère du numérique et activiste, mais qui a également participé à la création du popup publicitaire : « L’état de déchéance de notre internet est une conséquence directe, involontaire, de choisir la publicité comme modèle par défaut pour les contenus et services en ligne. »8Ethan Zuckerman, « The Internet’s Original Sin », 14 août 2014, https://www.theatlantic.com/technology/archive/2014/08/advertising-is-the-internets-original-sin/376041/, la citation en anglais « The fallen state of our Internet is a direct, if unintentional, consequence of choosing advertising as the default model to support online content and services. »
Ce noir constat s’appuie aussi sur les conséquences de la deuxième vague du développement publicitaire en ligne : la publicité « ciblée ».
Les dérives illégales de la surveillance publicitaire
Citant Ethan Zuckerman, Hubert Guillaud résume ainsi les conséquences néfastes de la publicité en ligne9Hubert Guillaut, « Comment tuer la pub, ce péché originel de l’internet ? », 13 nov. 2014, http://www.internetactu.net/2014/11/13/comment-tuer-la-pub-ce-peche-originel-de-linternet/ :
« La surveillance et le développement de la surveillance (comme le dit Bruce Schneier, la surveillance est le modèle d’affaires d’internet 10Bruche Schneier, « Surveillance as a Business Model », 25 nov. 2013, https://www.schneier.com/blog/archives/2013/11/surveillance_as_1.html ;
Le développement d’une information qui vise à vous faire cliquer, plutôt qu’à vous faire réfléchir ou à vous engager en tant que citoyens ;
Le modèle publicitaire favorise la centralisation pour atteindre un public toujours plus large. Et cette centralisation fait que les décisions pour censurer des propos ou des images par les entreprises et plates-formes deviennent aussi puissantes que celles prises par les gouvernements :
Enfin, la personnalisation de l’information, notre récompense, nous conduit à l’isolement idéologique, à l’image de la propagande personnalisée […] »
On en ajoutera quelques-unes, mais la plus importante est désormais bien connue. Pour sortir des logiques inefficaces de matraquage publicitaire, des entreprises ont fait le choix de développer des outils permettant de surveiller les internautes au travers de leurs navigations pour mieux les profiler et ainsi leur fournir des publicités plus « ciblées », au meilleur endroit au meilleur moment pour ainsi essayer de les manipuler le plus efficacement possible dans des actes de consommation.11Et oui, la publicité marche sur tout le monde, voir Benjamin Kessler et Steven Sweldens, « Think You’re Immune to Advertising ? Think Again », 30 janv. 2018, https://knowledge.insead.edu/marketing/think-youre-immune-to-advertising-think-again-8286
C’est une évolution relativement logique de « l’économie de l’attention », pour éviter la perte d’attention induite par la surmultiplication publicitaire, on a développé des outils pour les rendre beaucoup plus efficaces.
Ces outils ont toutefois un cout sociétal colossal : ils impliquent une surveillance de masse et quasi constante des internautes dans leurs navigations. La publicité a financé et continue de financer le développement de ces outils de surveillance qui viennent cibler les consommateurs et les traquer. Les deux entreprises championnes de cette surveillance sont incontestablement Google/Alphabet et Facebook12Voir par ex. Nicole Perrin, « Facebook-Google Duopoly Won’t Crack This Year » , 4 nov. 2019, https://www.emarketer.com/content/facebook-google-duopoly-won-t-crack-this-year et rappelons que les fondateurs de Google ont pourtant pu exprimer certains des réels problèmes de la dépendance publicitaire, Sergei Brin et Lawrence Page, « The Anatomy of a Large-Scale Hypertextual Web Search Engine », 1998, http://infolab.stanford.edu/~backrub/google.html : « To make matters worse, some advertisers attempt to gain people’s attention by taking measures meant to mislead automated search engines. » ou encore : « we expect that advertising funded search engines will be inherently biased towards the advertisers and away from the needs of the consumers. » dont la quasi-totalité des revenus proviennent de la publicité et qui représentent à elles deux désormais bien plus de 50% de tout le secteur de la publicité en ligne. Ce ne sont (malheureusement ?) pas les seuls acteurs de ce système et bien d’autres (géants du numérique, courtiers en données, etc.) cherchent à se partager le reste du gâteau. Le développement de ces nombreuses entreprises s’est ainsi totalement orienté vers la captation de données personnelles par la surveillance et vers la maximisation de l’exploitation des temps de cerveaux disponibles des internautes.
Ce problème est ainsi résumé par la chercheuse Zeynep Tufekci : « on a créé une infrastructure de surveillance dystopique juste pour que des gens cliquent sur la pub »13Zeynep Tufekci, « We’re building a dystopia just to make people click on ads », sept. 2017 https://www.ted.com/talks/zeynep_tufekci_we_re_building_a_dystopia_just_to_make_people_click_on_ads. Cette infrastructure est colossale, les outils de surveillance qui ont été développés et le marché de la surveillance publicitaire en ligne sont d’une grande complexité14L’Avis n° 18-A-03 du 6 mars 2018 portant sur l’exploitation des données dans le secteur de la publicité sur internet de l’Autorité de la concurrence, https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/commitments//18a03.pdf en témoigne. et n’hésitent pas à utiliser la moindre faille possible.15Voir par exemple la technique du « Web Beacon », https://en.wikipedia.org/wiki/Web_beacon Le système publicitaire a su pleinement tirer profit de l’informatique pour automatiser la surveillance des individus et les manipuler. Il espère même maintenant pouvoir importer cette surveillance dans nos rues avec les panneaux numériques.16Résistance à l’Agression Publicitaire, « JCDecaux colonise la Défense avec ses mobiliers urbains numériques », sept. 2014, https://antipub.org/jcdecaux-colonise-la-defense-avec-ses-mobiliers-urbains-numeriques/
Sans insister ici sur ce point, cette surveillance a assez naturellement attiré la convoitise des différents gouvernements qui ne pouvaient rêver d’un tel système de surveillance et ne se privent pas d’essayer d’en bénéficier à des fins de contrôle et de répression dans ce que l’on pourrait appeler un « partenariat public-privé de la surveillance. »17En témoigne notamment les révélations d’Edward Snowden du programme « PRISM ».
Il y a là une atteinte majeure au droit au respect de la vie privée des personnes, une liberté pourtant fondamentale, ainsi qu’à la législation européenne sur la protection des données personnelles. Ainsi, le Règlement général sur la protection des données (RGPD) couplé à la directive e-privacy impose un consentement « libre, éclairé, spécifique et univoque » pour la majorité des opérations de collecte de données personnelles à des fins publicitaires. Or, la quasi-totalité de ces outils de surveillance ne satisfont pas à ces critères qui impliqueraient par défaut que les données ne soient pas collectées. C’est seulement si l’internaute acceptait volontairement et spécifiquement d’être traqué à des fins publicitaires qu’il pourrait l’être. C’est pourquoi La Quadrature du Net a lancé18Voir notre site de campagne https://gafam.laquadrature.net/ et par exemple la plainte contre Google https://gafam.laquadrature.net/wp-content/uploads/sites/9/2018/05/google.pdf, dès l’entrée en application du RGPD, des plaintes collectives contre les fameux « GAFAM » pour leurs violations de ces règles. Malheureusement, plus d’un an et demi après ces plaintes, ces pratiques continuent de proliférer et seul Google a été sanctionné d’une timide amende de 50 millions d’euros qui ne s’appuyait malheureusement pas sur tous les griefs. Même aux États-Unis la législation COPPA (Children’s Online Privacy Protection Act), interdit la collecte à des fins publicitaires sur des enfants de moins de 13 ans et n’a fait jusqu’en 201919Google semble toutefois s’être fait rappelé à l’ordre et a annoncé devoir supprimer les publicités pour les chaines s’adressant à un public enfantin. Sur ce sujet, voir par exemple, « Game Theory : Will Your Favorite Channel Survive 2020 ? (COPPA) », 22 nov. 2019, https://www.youtube.com/watch?v=pd604xskDmUqu’être assez sciemment contournée face à la manne publicitaire de la manipulation des plus jeunes…
Malgré l’illégalité flagrante, ces pratiques de surveillance continuent donc de violer chaque jour nos libertés.
Si les internautes averti·es peuvent configurer certains outils, dont leur bloqueur de publicités, pour limiter ces abus (par exemple en suivant les informations sur https://bloquelapub.net/) c’est encore dans une guerre continue entre l’ingéniosité pervertie20Les ingénieur-es de Facebook font preuve d’une malice certaine aussi bien pour traquer les internautes que pour les forcer à voir leurs publicités (il suffit de regarder le code source des contenus « sponsorisés » pour en être convaincu…). des ingénieurs publicitaires pour contourner ou bloquer les bloqueurs de pubs et celles des hackeur·ses qui y résistent. Quoi qu’il en soit, la publicité et la surveillance publicitaire demeurent pour la majorité des personnes.
Une lourde addition des couts sociétaux de la publicité en ligne
La surveillance publicitaire est la dérive la plus flagrante de la publicité, elle est inacceptable et il est nécessaire de la combattre pour la faire disparaitre si l’on veut caresser l’espoir de retrouver des pratiques commerciales plus saines sur Internet, mais cela semble loin de suffire. La publicité en elle-même est un problème : elle induit une dépendance économique aux annonceurs, mais aussi technique aux systèmes publicitaires.
Les problématiques liées à la dépendance économique publicitaire sont très claires quand la publicité constitue la seule source de revenus d’un acteur. Cette problématique est aussi mise en valeur avec les vidéastes qui s’appuient sur la plateforme de Google « Youtube » qui sont devenu·es de fait totalement dépendant·es du bon vouloir de celle-ci pour leurs revenus ou encore avec les éditeurs de presse qui ne font depuis plus de 10 ans que de subir des revers pour obtenir les miettes des revenus publicitaires de Google.
Côté dépendance technique, pour les gestionnaires de site Internet, insérer un système publicitaire revient à laisser une porte ouverte à des acteurs tiers et constitue donc une faille en puissance. Il y a là un réel cout de confiance et de dépendance. L’encart publicitaire peut être utilisé pour faire exécuter des éléments de code d’un prestataire publicitaire ou d’un tiers qui l’aurait compromis, on ne contrôle pas nécessairement le contenu des publicités qui s’afficheront…
La publicité est également un surcout énergétique dans l’affichage de la page, qui peut rester faible, mais peut aussi largement alourdir une page si l’on parle par exemple de publicité vidéo21 Gregor Aisch, Wilson Andrew and Josh Kelleroct « The Cost of Mobile Ads on 50 News Websites », 1 oct. 2015,https://www.nytimes.com/interactive/2015/10/01/business/cost-of-mobile-ads.htmlou de multiplication des traqueurs et dispositifs de contrôle.
Le gaspillage énergétique, les dépendances multiples des acteurs dont le modèle économique repose sur la publicité, la dystopie de surveillance, l’influence mentale subie des personnes qui voient leurs pensées parasitées pour leur faire consommer plus ou voter autrement…
La publicité apparait bien comme une cause majeure de perversion d’Internet vers plus de centralité, plus de contrôle et de surveillance des géants du numérique, plus de contenus piège à clic et de désinformation au lieu de productions de qualité et de partage…
L’addition des conséquences sociétales de la publicité en ligne est salée comme la mer d’Aral22Le parallèle pourrait même être poussé plus loin, voir Professeur Feuillage, « Aral, ta mer est tellement sèche qu’elle mouille du sable », 31 janv. 2018, https://www.youtube.com/watch?v=uajOhmmxYuc&feature=emb_logo&has_verified=1. La supprimer en même temps que la surveillance publicitaire participerait très largement à résoudre de nombreuses atteintes aux libertés fondamentales et aux équilibres démocratiques.
Twitter a annoncé fin octobre 201923Par des déclarations de Jack Dorsay son PDG, https://twitter.com/jack/status/1189634360472829952 supprimer les publicités politiques de son réseau social et en explique les raisons :
« Nous avons pris la décision d’arrêter toutes les publicités politiques sur Twitter. Nous pensons que la portée d’un message politique doit se mériter, pas s’acheter. »
La démarche est louable, mais pour arrêter les publicités politiques sur Twitter ne faut-il pas arrêter la publicité tout court ? Edward Bernays (neveu de Freud, considéré comme le père de la propagande politique et des « relations publiques ») comme Cambridge Analytica24Edward Bernays, Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie, (trad. Oristelle Bonis, préf. Normand Baillargeon), Zones / La Découverte, 2007 (1re éd. 1928) ; concernant Cambridge Analytica, avant que le scandale n’éclate la page d’accueil du site affichait fièrement : « Data drives all we do, Cambridge Analytica uses data to change audience behavior. Visit our Commercial or Political divisions to see how we can help you ». avaient bien compris que la publicité a les mêmes effets qu’il s’agisse de biens de consommation ou d’idées. Mais au-delà de ça, « tout est politique » : les publicités sexistes ou pour des véhicules polluants, des nouveaux gadgets technologiques, des voyages lointains, de la nourriture de mauvaise qualité… jouent largement sur de grands enjeux politiques25Voir Emily Atkin, Exxon climate ads aren’t « political, » according to Twitter But a Harvard researcher says Exxon’s ads « epitomize the art » of political advertising, 5 nov. 2019, https://heated.world/p/exxon-climate-ads-arent-political et Résistance à l’agression publicitaire (RAP), En refusant de réglementer la publicité, le gouvernement sacrifie l’écologie, 10 décembre 2019, https://reporterre.net/En-refusant-de-reglementer-la-publicite-le-gouvernement-sacrifie-l-ecologie. La publicité est en soi une idéologie politique26Pour en saisir l’ampleur, voir l’ouvrage de Naomi Klein, No Logo : la tyrannie des marques, (trad. Michel Saint-Germain), Actes Sud, 2001, et celui du Groupe Marcuse, De la misère humaine en milieu publicitaire : comment le monde se meurt de notre mode de vie, la Découverte, 2004., adossée au capitalisme, qu’il soit de surveillance ou non.
À La Quadrature du Net nous refusons l’exploitation de ces temps de cerveaux disponibles et de profiter de ces revenus publicitaires, même quand ils sont si « gentiment » proposés par des sociétés telles que Lilo, Brave ou Qwant27Lilo ne servant que d’emballage de blanchiment aux recherches et aux publicités de Microsoft – Bing en vendant l’image de marque des associations tout en se gardant 50% des revenus publicitaires reversés par Microsoft. S’agissant de Brave, les montants versés directement par les internautes constituent une piste intéressante de financement des contenus et services en ligne, mais les logiques de remplaçement des publicités présentes sur les sites par celles de la régie Brave où « Les publicités sont placées en fonction des opportunités, et les utilisateurs deviennent des partenaires et non des cibles » pour qu’une partie soit reversée à des acteurs tiers est à minima douteuse… C’est la même logique absurde que l’option « Qwant Qoz » qui permet si elle est activée à l’utilisateur-produit de voir deux fois plus de publicités pour que son surplus d’exploitation cérébrale soit reversé à des associations…
qui derrière une vitrine d’« éthique » restent dans cette logique d’exploitation et ne servent qu’à faire accepter ces logiques publicitaires.
Nous refusons ces manipulations et espérons des pratiques saines où les biens ou des services sont vendus directement pour ce qu’ils valent, nous souhaitons avoir une liberté de réception sur les informations auxquelles nous accédons et que les plus riches ne puissent pas payer pour être plus entendus et modifier nos comportements.
Nous ne voulons plus que nos cerveaux soient des produits !
https://bloquelapub.net/
References[+]
↑1 fr.wikipedia.org/wiki/Publicité
↑2 Voir la définition du Larousse ou même du Trésor de la langue française.
↑3 Selon la formule de 2004 de Patrick Le Lay alors PDG de TF1.
↑4 La dépendance de nombreux vidéastes aux revenus de NordVpn en témoigne assez clairement, même quand ceux-ci restent caustiques à ce sujet cela reste très édulcoré, voir par exemple « Pourquoi NordVPN est partout ?! », Un créatif, 30 mai 2019, publié sur https://www.youtube.com/watch?v=9X_2rNC6nKA
↑5 Attention, tout était loin d’être parfait sur bien d’autres sujets.
↑6 John Perry Barlow, « A declaration of the independance of Cyberspace », 8 fév. 1996, Davos, https://www.eff.org/cyberspace-independence
↑7 Brad Templeton, « Reaction to the DEC Spam of 1978 », https://www.templetons.com/brad/spamreact.html
↑8 Ethan Zuckerman, « The Internet’s Original Sin », 14 août 2014, https://www.theatlantic.com/technology/archive/2014/08/advertising-is-the-internets-original-sin/376041/, la citation en anglais « The fallen state of our Internet is a direct, if unintentional, consequence of choosing advertising as the default model to support online content and services. »
↑9 Hubert Guillaut, « Comment tuer la pub, ce péché originel de l’internet ? », 13 nov. 2014, http://www.internetactu.net/2014/11/13/comment-tuer-la-pub-ce-peche-originel-de-linternet/
↑10 Bruche Schneier, « Surveillance as a Business Model », 25 nov. 2013, https://www.schneier.com/blog/archives/2013/11/surveillance_as_1.html
↑11 Et oui, la publicité marche sur tout le monde, voir Benjamin Kessler et Steven Sweldens, « Think You’re Immune to Advertising ? Think Again », 30 janv. 2018, https://knowledge.insead.edu/marketing/think-youre-immune-to-advertising-think-again-8286
↑12 Voir par ex. Nicole Perrin, « Facebook-Google Duopoly Won’t Crack This Year » , 4 nov. 2019, https://www.emarketer.com/content/facebook-google-duopoly-won-t-crack-this-year et rappelons que les fondateurs de Google ont pourtant pu exprimer certains des réels problèmes de la dépendance publicitaire, Sergei Brin et Lawrence Page, « The Anatomy of a Large-Scale Hypertextual Web Search Engine », 1998, http://infolab.stanford.edu/~backrub/google.html : « To make matters worse, some advertisers attempt to gain people’s attention by taking measures meant to mislead automated search engines. » ou encore : « we expect that advertising funded search engines will be inherently biased towards the advertisers and away from the needs of the consumers. »
↑13 Zeynep Tufekci, « We’re building a dystopia just to make people click on ads », sept. 2017 https://www.ted.com/talks/zeynep_tufekci_we_re_building_a_dystopia_just_to_make_people_click_on_ads
↑14 L’Avis n° 18-A-03 du 6 mars 2018 portant sur l’exploitation des données dans le secteur de la publicité sur internet de l’Autorité de la concurrence, https://www.autoritedelaconcurrence.fr/sites/default/files/commitments//18a03.pdf en témoigne.
↑15 Voir par exemple la technique du « Web Beacon », https://en.wikipedia.org/wiki/Web_beacon
↑16 Résistance à l’Agression Publicitaire, « JCDecaux colonise la Défense avec ses mobiliers urbains numériques », sept. 2014, https://antipub.org/jcdecaux-colonise-la-defense-avec-ses-mobiliers-urbains-numeriques/
↑17 En témoigne notamment les révélations d’Edward Snowden du programme « PRISM ».
↑18 Voir notre site de campagne https://gafam.laquadrature.net/ et par exemple la plainte contre Google https://gafam.laquadrature.net/wp-content/uploads/sites/9/2018/05/google.pdf
↑19 Google semble toutefois s’être fait rappelé à l’ordre et a annoncé devoir supprimer les publicités pour les chaines s’adressant à un public enfantin. Sur ce sujet, voir par exemple, « Game Theory : Will Your Favorite Channel Survive 2020 ? (COPPA) », 22 nov. 2019, https://www.youtube.com/watch?v=pd604xskDmU
↑20 Les ingénieur-es de Facebook font preuve d’une malice certaine aussi bien pour traquer les internautes que pour les forcer à voir leurs publicités (il suffit de regarder le code source des contenus « sponsorisés » pour en être convaincu…).
↑21 Gregor Aisch, Wilson Andrew and Josh Kelleroct « The Cost of Mobile Ads on 50 News Websites », 1 oct. 2015,https://www.nytimes.com/interactive/2015/10/01/business/cost-of-mobile-ads.html
↑22 Le parallèle pourrait même être poussé plus loin, voir Professeur Feuillage, « Aral, ta mer est tellement sèche qu’elle mouille du sable », 31 janv. 2018, https://www.youtube.com/watch?v=uajOhmmxYuc&feature=emb_logo&has_verified=1
↑23 Par des déclarations de Jack Dorsay son PDG, https://twitter.com/jack/status/1189634360472829952
↑24 Edward Bernays, Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie, (trad. Oristelle Bonis, préf. Normand Baillargeon), Zones / La Découverte, 2007 (1re éd. 1928) ; concernant Cambridge Analytica, avant que le scandale n’éclate la page d’accueil du site affichait fièrement : « Data drives all we do, Cambridge Analytica uses data to change audience behavior. Visit our Commercial or Political divisions to see how we can help you ».
↑25 Voir Emily Atkin, Exxon climate ads aren’t « political, » according to Twitter But a Harvard researcher says Exxon’s ads « epitomize the art » of political advertising, 5 nov. 2019, https://heated.world/p/exxon-climate-ads-arent-political et Résistance à l’agression publicitaire (RAP), En refusant de réglementer la publicité, le gouvernement sacrifie l’écologie, 10 décembre 2019, https://reporterre.net/En-refusant-de-reglementer-la-publicite-le-gouvernement-sacrifie-l-ecologie
↑26 Pour en saisir l’ampleur, voir l’ouvrage de Naomi Klein, No Logo : la tyrannie des marques, (trad. Michel Saint-Germain), Actes Sud, 2001, et celui du Groupe Marcuse, De la misère humaine en milieu publicitaire : comment le monde se meurt de notre mode de vie, la Découverte, 2004.
↑27 Lilo ne servant que d’emballage de blanchiment aux recherches et aux publicités de Microsoft – Bing en vendant l’image de marque des associations tout en se gardant 50% des revenus publicitaires reversés par Microsoft. S’agissant de Brave, les montants versés directement par les internautes constituent une piste intéressante de financement des contenus et services en ligne, mais les logiques de remplaçement des publicités présentes sur les sites par celles de la régie Brave où « Les publicités sont placées en fonction des opportunités, et les utilisateurs deviennent des partenaires et non des cibles » pour qu’une partie soit reversée à des acteurs tiers est à minima douteuse… C’est la même logique absurde que l’option « Qwant Qoz » qui permet si elle est activée à l’utilisateur-produit de voir deux fois plus de publicités pour que son surplus d’exploitation cérébrale soit reversé à des associations…
Nous sommes les élus. Dans chaque famille, il en est un qui semble appelé à retrouver les ancêtres, à redonner de la matière à ces fantômes et à les faire revivre, à raconter l'histoire de la famille et à sentir que d'une certaine manière, ils le savent et approuvent.
Pour moi, faire de la généalogie n'est pas une froide collecte de faits, plutôt une renaissance de tous ceux qui nous ont précédés.
Nous sommes les narrateurs de la tribu. Toutes les tribus en ont un.
Nous avons été appelés par nos gènes. Ceux qui nous ont précédés nous en conjurent : racontez notre histoire. C'est ce que nous faisons. En les retrouvant, nous nous retrouvons nous-mêmes, en quelque sorte.
Cela va au-delà du simple exposé de faits. Il s'agit de savoir qui je suis et pourquoi je fais les choses que je fais. Je suis fière de ce que nos ancêtres ont pu accomplir, de leur contribution à ce que nous sommes aujourd'hui. Écrire leur histoire, c'est respecter leurs épreuves et leurs peines, leur résistance et leur constance, leur détermination à continuer et à construire une vie pour leur famille.
J'écris aussi leur histoire parce que j'ai compris qu'ils l'avaient fait pour nous. Pour que nous puissions naître tels que nous sommes. Et que nous puissions nous souvenir d'eux.
Et c'est ce que nous faisons. Avec respect et bienveillance, en décrivant chaque pas de leur existence, parce que nous sommes eux et qu'ils sont nous. Ainsi, comme un scribe que l'on convoque, je raconte l'histoire de ma famille. C'est maintenant à l'élu de la génération suivante de répondre à l'appel et de prendre sa place dans la longue lignée des conteurs de famille.
Voilà pourquoi je fais de la généalogie, et voilà ce qui incite les jeunes, et les moins jeunes, à s'engager et à redonner vie à ceux qui nous ont précédés.
Librement traduit et inspiré d'un poème en prose anglaise aux origines obscures, souvent cité sur les sites de généalogie anglophones, mais généralement attribué à Della M. Cummings Wright
Dans cet article issu du mook Dune, dont Numerama est partenaire, Catherine Dufour décrypte l’ordre du Bene Gesserit par le prisme du féminisme. Les femmes de cette sororité fictive sont-elles des « sorcières » au sens mis en avant par Mona Chollet ?
Dune a mis en scène la plus puissante et la plus agaçante sororité de l’histoire de la littérature : l’ordre du Bene Gesserit. Revoyons tout d’abord quelques fondamentaux. Le nom même du Bene Gesserit vient du latin et signifie peu ou prou : « bien se comporter ». L’ordre a été fondé par une femme de la Maison Atréides (ce que nous apprennent les préquelles écrites par Brian Herbert et Kevin J. Anderson), famille régnante dont est issu le principal protagoniste du cycle : Paul, connu plus tard sous le nom de Muad’Dib ; le Héros.
Chaque membre du Bene Gesserit s’entraîne corps et âme pendant des années pour parfaire un éventail de compétences à la fois physiques et psychiques : art du combat, concentration, mémoire, habileté sexuelle et aptitudes sensorielles qui leur aiguisent les cinq sens jusqu’à développer un sens de l’observation digne de Sherlock Holmes. Elles excellent également dans l’art de l’éloquence et maîtrisent ce qu’elles nomment « la Voix », grâce à laquelle elles subjuguent leurs interlocuteurs.
Enfin, les Bene Gesserit ont un contrôle de leur métabolisme tel qu’elles peuvent se soigner elles-mêmes, détecter les poisons qu’on glisse dans leur soupe et décider de leur fertilité, voire du sexe de leur progéniture. Ces capacités, jointes à un profond esprit de corps et au noyautage systématique des familles dirigeantes, permettent à l’ordre d’exercer un pouvoir politique majeur au sein de l’Imperium, mais un pouvoir qui demeure dans l’ombre, parce qu’il est mis au service de buts internes aussi grandioses qu’obscurs.
Fatalement, des compétences si étonnantes qu’elles côtoient la magie valent à ces femmes d’être qualifiées de sorcières, surtout par leurs ennemis.
Les membres du Bene Gesserit sont, dans l’ordre hiérarchique : les Postulantes, les Acolytes, et enfin les Sœurs. Les dirigeantes, elles, sont appelées Révérendes Mères, qui désignent l’une d’entre elles pour être la patronne de l’ordre : la Mère supérieure. Ne se croirait-on pas dans un couvent ? Ou un pensionnat catholique. À l’instar de leurs consœurs chrétiennes, les sœurs du Bene Gesserit ont choisi, pour façade sociale, l’enseignement. Les familles des Grandes Maisons y ont toutes recours pour leurs filles.
Une fois formées, ces jeunes filles de haute naissance deviennent épouses ou concubines dans d’autres familles régnantes, propageant les desseins du Bene Gesserit dans tout l’Imperium. Mais le Bene Gesserit n’agit pas qu’au niveau individuel : il intervient aussi au niveau macro, par exemple en lançant des « fake news » religieuses, des corpus de légendes destinées à influencer des groupes sociaux précis pour réaliser la fameuse Missionaria Protectiva.
Cependant – spoiler –, le Bene Gesserit échouera dans son plus grand projet, qui est aussi le plus secret : la création d’un Kwisatz Haderach, homme supérieur obtenu par sélection génétique. Planifié de longue date par les Révérendes Mères, le Kwisatz Haderach naîtra hors de leur programme, et restera toujours hors de leur contrôle. Son arrivée inopinée une génération plus tôt que prévu représente le point de départ de la saga Dune. La raison ? L’amour que Dame Jessica voue à son mari Léto Atréides la pousse à donner naissance à un fils plutôt qu’à une fille. Quand l’amour d’une femme pour un homme met en échec les plans machiavéliques des femmes, faut-il y voir un triomphe de la liberté individuelle sur l’oppression politique, ou autre chose un peu moins progressiste ?
Le terme « sorcière », que les ennemis du Bene Gesserit utilisent comme un anathème, a connu depuis une sévère revalorisation, notamment par la voix de Mona Chollet, auteure en 2018 du cultissime Sorcières : la puissance invaincue des femmes. Qu’en dit-elle ? « Si vous êtes une femme et que vous osez regarder à l’intérieur de vous-même, alors vous êtes une sorcière. » Sur ce plan, pas de doute, les Bene Gesserit, avec leur sens de l’observation et de l’introspection, sont des sorcières. Mais sur d’autres, carrément moins.
L’ordre se positionne davantage comme un outil de domination que comme un facteur de libération
Pour Mona Chollet, « la sorcière incarne la femme affranchie de toutes les dominations, de toutes les limitations ». Or l’ordre se positionne davantage comme un outil de domination que comme un facteur de libération. Les membres du Bene Gesserit doivent obéir, et l’injonction majeure consiste à se mettre en couple avec un homme haut placé puis à enfanter judicieusement. Là où la journaliste féministe américaine Gloria Steinem affirme qu’elle refuse de se marier parce qu’elle « n’arrive pas à [s]’accoupler en captivité », Dame Jessica gémit interminablement de n’être que la concubine du Duc Léto.
Ainsi, le jour où arrive la Princesse Irulan, vouée pour des raisons politiques à épouser son fils Paul, Jessica glisse à Chani, l’amante de Paul : « Vois donc cette princesse, là-bas, si hautaine, si confiante. On dit qu’elle a des prétentions littéraires. Espérons que cela remplit son existence car elle n’aura que peu de choses en dehors. […] Pense à cela, Chani, pense à cette princesse qui portera le nom mais qui sera moins qu’une concubine, qui ne connaîtra jamais un instant de tendresse avec l’homme auquel elle est liée. Alors que nous, Chani, nous que l’on nomme concubines… l’Histoire nous appellera : épouses. » Bonjour la sororité.
Autre zone d’ombre : le Bene Gesserit ne s’intéresse guère aux arpètes, aux mal-nées, bref, aux sans-dents. Fasciné par la haute société, l’ordre est un concentré de ce que nous, en 2020, appelons les « white fem’ » – cette branche vieillotte du féminisme qui ne se préoccupe que des soucis des femmes privilégiées en occultant les combats des autres. Heureusement, les Bene Gesserit ont une qualité immense : leur orgueil luciférien. Enfin des femmes qui ne sont pas accablées par le « syndrome de l’imposteure ». Les sorcières de Frank Herbert se considèrent ni plus ni moinscomme « les bergères de l’humanité ». Ce n’est pas très démocratique mais, s’agissant d’une communauté féminine, c’est féministe.
Jamais le Bene Gesserit n’a l’idée de sortir de l’ombre, ni de réclamer le pouvoir pour ses membres : pour les femmes. L’agacement nous submerge.
Ici, pas d’humilité, pas de mignonitude, pas d’effacement. Les Bene Gesserit veulent le pouvoir, elles le prennent et elles le gardent. Hélas, ce n’est que pour l’offrir au Kwisatz Haderach, cet homme supérieur qui est, eh bien, un homme. Jamais le Bene Gesserit n’a l’idée de sortir de l’ombre, ni de réclamer le pouvoir pour ses membres : pour les femmes. L’agacement nous submerge.
Mais cessons de bouder notre plaisir. Comme le dit judicieusement Étienne Augé dans son article « Cinquante ans après sa sortie, il est temps de (re) lire Dune » : « Il faut surtout se concentrer sur la formidable analyse de la religion que Herbert fournit, notamment avec la Missionaria Protectiva, le bras armé du Bene Gesserit, chargé d’implanter des superstitions qui se transformeront en prophéties autoréalisatrices. Herbert démontre comment la religion peut être exploitée à des fins politiques […]. La science-fiction possède cette capacité de faire réfléchir en avertissant des dangers qui menacent notre monde à court et long terme. »
Partenaire du mook Dune, publié en librairies chez L'Atalante et Leha, Numerama vous livre un extrait en avant-première de l'entretien avec Brian Hebert et un avant-goût exclusif de celui avec Denis Villeneuve.
Œuvre littéraire culte signée Frank Herbert, Dune est en cours d’adaptation au cinéma par la réalisateur Denis Villeneuve. On retrouvera Timothée Chalamet dans le rôle de Paul Atréides ou encore Zendaya dans le rôle de Chani. En raison de la pandémie, Warner a décidé de décaler le film, initialement programmé pour décembre 2020.
Il n’en reste pas moins que la production de l’adaptation a remis un coup de projecteur sur l’univers monumental de Frank Herbert. Il fallait donc un mook tout aussi massif pour en aborder l’étendue. C’est ainsi qu’est né le mook Dune, imaginé par le journaliste Lloyd Chéry (C’est plus que de la SF), et dont Numerama est partenaire depuis le crowdfunding. Au fil de 256 pages, des figures littéraires, des scientifiques et des journalistes se relaient pour décrypter toutes les branches et toute la complexité de Dune.
On y retrouve également des entretiens rares, avec Denis Villeneuve, seule interview qu’il ait accordé à un journaliste français pour l’instant sur ce film, mais aussi avec Brian Herbert, fils de Frank Herbert, qui perpétue l’œuvre de son père. « Il était important d’avoir Brian Herbert avec nous. Sa présence légitime notre projet car Brian est le garant du Frank Herbert’s estate. Son accord a été nécessaire pour avoir le soutien de Warner Bros. Il connaît mieux que tout le monde la saga et nous voulions mettre en avant tous ceux qui avaient travaillé sur Dune », nous explique Lloyd.
L’écologie dans Dune : « J’y vois une porte d’espoir pour notre futur », explique Denis Villeneuve
À la veille de la sortie du mook en librairies, Numerama vous partage un extrait exclusif de cet entretien avec l’héritier de Frank Herbert. « Je souhaitais l’interroger sur la face sombre de son père, qu’il décrit lui-même dans sa biographie et qu’il tempère finalement dans notre interview », précise Lloyd. On retrouve aussi, dans cette interview, un lien tout sauf anodin avec celle de Denis Villeneuve : la portée environnementale de l’œuvre.
Le réalisateur confie, dans le mook, une partie de son approche pour son film à venir : l’écologie. Pour Villeneuve, Frank Herbert aborde cet aspect à la fois avec une « précision toute scientifique » et en tant que « source d’inspiration d’une spiritualité ». Puisque Dune imagine un peuple ayant une « relation sacrée très sophistiquée » avec son environnement, « c’est donc par un rapport sacré au monde naturel que j’aborde l’écologie dans le film. J’y vois une porte d’espoir pour notre futur », raconte-t-il à Lloyd Chéry. Nous vous parlions aussi de cet aspect écologique en décryptant les premières images du film. En définitive, Dune n’a peut-être jamais été autant actuel.
L’entretien avec Brian Herbert : extrait
Brian Herbert : C’était en 1962. Nous vivions dans un quartier pauvre de San Francisco. Mon père travaillait depuis quelques années sur ce projet. Il était assis dans la salle à manger de l’appartement à côté de ma mère Beverly. Il lui narrait la scène du gom jabbar. À l’époque, c’était elle qui faisait vivre la famille. Elle a été un soutien de tous les instants pour mon père. Elle avait elle aussi des talents d’écriture et elle relisait tous ses romans.
B.H. : Bien sûr ! C’est même elle qui a trouvé le titre « Dune ». Elle conseillait mon père sur la psychologie féminine de ses personnages en lui disant : « Une femme ne pense pas comme ça » (rire). Elle était incroyable. Un jour que mon père était interviewé par Jim French, un animateur de radio de Seattle assez connu, au début des années 1980, le producteur de l’émission lui a dit avant que l’interview commence : « Ne pose pas de questions stupides et interroge-le plutôt sur l’importance de Beverly dans son œuvre. » Ce qu’il fit, pour le plus grand plaisir de mon père. Il ne s’était pas trompé, ma mère a été extrêmement importante pour la création de l’univers de Dune.
« Mon père aimait analyser l’être humain »
B.H. : Il n’avait pas de côté sombre, il était humain. Il ne faut pas oublier qu’il a eu une enfance et une relation compliquée avec ses propres parents. La discipline que son père policier instaurait à la maison était dure et ce ne fut pas toujours rose. Il a été enfant dans les années 1930, pendant la Grande Dépression. Je crois qu’il a fait sincèrement ce qu’il pouvait. Nous sommes des produits de notre époque. Je lui ai pardonné pour tout qui ne s’était pas bien passé. Si on regarde dans son intégralité sa bibliographie, mon père aimait analyser l’être humain.
B.H. : Le roman a su capter son époque dans les années 1960 avec l’épice. Il a d’abord séduit les étudiants des campus américains. Mais Dune est avant tout un grand livre écologiste qui parle de la raréfaction des ressources, dont l’eau. C’est aussi un formidable roman d’aventures centré sur Paul Atréides et son chemin initiatique, qui suit très fidèlement le parcours imaginé par Joseph Campbell. On peut tout autant lire Dune pour ce qu’il dit sur la politique et sur la religion. Enfin, Dune ne cesse d’évoquer la cause des femmes et comment elles finissent par diriger l’univers. C’est pour toutes ces raisons que ce roman restera un classique.
Dans la presse ce matin, il y a des hommes qui font la pluie et le beau temps et on ne pensait pas lire ça dans Philosophie Magazine, qui nous raconte une scène observée plusieurs fois en Saône-et-Loire. Après des semaines de sécheresse, des nuages sombres s'amassent enfin dans le ciel. Le vent se lève, les oiseaux se taisent, c'est sûr, ça va craquer. Et puis d'un coup, comme par magie, les cumulonimbus se désagrègent, la lumière revient.
Il n'est pas tombé une goutte. L'orage était là, et c'est comme s'il avait été aspiré. Parlez-en aux éleveurs, ils vous disent: "Ben oui, avec tout l'iodure d'argent qu'ils balancent dans l'atmosphère, il ne pleut plus. Moi je n'ai plus de fourrage". De l'iodure d'argent? "Bah oui", dit l'éleveur, "à cause de leurs générateurs. Bien sûr qu'en France on bricole la météo ! C'est officiel, tapez ANELFA sur Google, vous verrez".
De fait, il existe bien une Association nationale d'étude et de lutte contre les fléaux atmosphériques. L'ANELFA, fondée en 1951 par des agriculteurs, des agronomes, des physiciens et des élus. Leur objectif : réduire les dégâts causés par la grêle et éliminer les orages. Aujourd'hui, on compte plus de 800 stations anti-grêle dans toute la France, surtout dans les régions viticoles. Ceux qui paient sont ceux qui en ont besoin, les chambres d'agriculture, les assureurs, et aussi les communes et les départements.
Pour tuer la grêle, il faut donc envoyer dans l'atmosphère de l'iodure d'argent, ce qui casse le processus de formation des grêlons. C'est ce qu'on appelle l'ensemencement des nuages. Le sorcier des cumulonimbus s'appelle Jean Dessens, physicien de l'atmosphère à Toulouse, comme son père qui a fondé l'Anelfa. Il est formel, l'iodure d'argent, c'est cher. Donc on l'utilise en petite quantité, et donc ce n'est pas toxique.
Certains scientifiques restent sceptiques, comme Jean Grizard, retraité de l'Institut National de la Recherche Agronomique. Pour lui, il y a forcément des retombées qui contaminent l'air et les écosystèmes. Et même une dégradation des particules qui deviennent alors aussi dangereuses que le mercure. Il faudrait des études indépendantes, mais vu les quantités utilisées, elles ne sont pas obligatoires.
L'autre débat, c'est la sécheresse, éloigner la pluie quand on se désole de la sécheresse et du réchauffement climatique, est-ce bien raisonnable ? Accusation injustifiée, assure Jean Dessens. On ne diminue que de 1% la masse d'eau présente dans les nuages". Réponse de Jean Grizard: "Les agriculteurs sont d'excellents observateurs de la nature, on devrait les écouter".
Michel est éleveur, il fait des relevés de pluviométrie depuis des années. "Depuis que les générateurs fonctionnent, dit-il, les mois d'été, on est passé de 350 à 200 litres par mètre carré, pour nous, c'est désastreux". Michel a été démarché il y a trois ans par un vigneron et un technicien de l'Anelfa. "On s'était seulement parlé. Quelques jours plus tard, un camion arrive dans ma cour avec un sigle 'produits dangereux'. Il voulait m'en laisser 200 litres. Le chauffeur m'a expliqué que c'était juste très inflammable. Là j'ai tiqué. On a essayé de me forcer la main. Ils m'ont envoyé ces produits sans contrat, sans garantie". Sans compensation, aussi. "C'est du bénévolat", dit Michel, "ils m'ont seulement promis que j'aurai un repas annuel et une caisse de vin".
Autre son de cloche avec Serge, pépiniériste dans le Lot et Garonne. Un département qui a perdu plusieurs récoltes avant de se tourner vers les générateurs de l'Anelfa.. "Il y a entre 10 et 15 alertes par an", dit-il, "mais depuis six ans, nous n'avons plus perdu de raisin, les générateurs ont été hyper efficaces. Pour un coût dérisoire, 50 centimes par hectare. Les viticulteurs sont contents, les automobilistes aussi". Pour la sécheresse, ils se sont organisés, ils ont créé des retenues d'eau et des lacs. "On peut tenir toute la saison avec nos pompes, on ne dépend pas des nuages".
Et c'est là que le problème devient politique, et même philosophique. Est-ce qu'on peut changer le temps qu'il fait juste parce que ça nous arrange ? À qui appartient le ciel ? Pour la réponse, rendez-vous donc dans Philosophie Magazine.
Plaidoyer en faveur d’un logiciel de relations épistolaires électroniques, échanges sacrifiés au culte de l’instantanéité.
J’aime l’email. Je ne me lasse pas de m’émerveiller sur la beauté de ce système qui nous permet d’échanger par écrit, de manière décentralisée. D’entretenir des relations épistolaires dématérialisées à l’abri des regards (si l’on choisit bien son fournisseur). Je l’ai déjà dit et le redis.
Pourtant, l’indispensable email est régulièrement regardé de haut. Personne n’aime l’email. Il est technique, laborieux. Il est encombré de messages. Alors toute nouvelle plateforme nous attire, nous donne l’impression de pouvoir communiquer plus simplement qu’avec l’email.
Beaucoup trop d’utilisateurs sont noyés dans leurs emails. Ils postposent une réponse avant que celle-ci ne soit noyée dans un flux incessant de sollicitation. Entrainant, effet pervers, une insistance de l’expéditeur.
Désabusé, la tentation est grande de se tourner vers cette nouvelle plateforme aguichante. Tout semble plus simple. Il y’a moins de messages, ils sont plus clairs. La raison est toute simple : la plateforme est nouvelle, les échanges entre les utilisateurs sont peu nombreux. Dès le moment où cette plateforme sera devenue particulièrement populaire, votre boîte à messages se retrouvera noyée tout comme votre boîte à email. Tout au plus certaines plateformes s’évertuent à transformer vos boîtes en flux, de manière à vous retirer de la culpabilité, mais entrainant une perte d’informations encore plus importante.
C’est pour cela que l’email est magnifique. Après des décennies, il est toujours aussi utile, aussi indispensable. Nous pouvons imaginer un futur sans Google, un futur sans Facebook. Mais un futur sans email ?
L’email pourrait être merveilleux. Mais aucun client mail ne donne envie d’écrire des mails.
Je rêve d’un client mail qui serait un véritable logiciel d’écriture. Pas d’options et de fioriture. Pas de code HTML. Écrire un email comme on écrit une lettre. En mettant l’adresse du destinataire en dernier, comme on le fait pour une enveloppe.
Un logiciel d’écriture d’email qui nous aiderait à retrouver un contact avec sa correspondance plutôt qu’à permettre l’accomplissement d’une tâche mécanique. Un logiciel qui nous encouragerait à nous désabonner de tout ce qui n’est pas sollicité, qui marquerait des mails les correspondances en attente d’une réponse. Qui nous encouragerait à archiver un mail où à le marquer comme nécessitant une action plutôt qu’à le laisser moisir dans notre boîte aux lettres.
Bref, je rêve d’un client mail qui me redonne le plaisir d’interagir avec des personnes, pas avec des fils de discussions ou des onomatopées.
D’un autre côté, j’abhorre ces tentatives de classement automatique qui fleurissent, par exemple sur Gmail. Outre qu’elles augmentent le pouvoir de ces algorithmes, elles ne font que cacher le problème sans tenter d’y remédier. Si les mails doivent être triés comme « promotions » ou « notifications », c’est la plupart du temps que je n’avais pas besoin de les voir en premier lieu. Que ces emails n’auraient jamais dû être envoyés.
Enfin, un véritable logiciel de correspondance devrait abandonner cette notion de notification et de temps réel. Une fois par jour, comme le passage du facteur, les courriels seraient relevés, m’indiquant clairement mes interactions pour la journée.
De même, mes mails rédigés ne seraient pas envoyés avant une heure fixe du soir, me permettant de les modifier, de les corriger. Mieux, je devrais être forcé de passer en revue ce que ‘envoie, comme si je me rendais au bureau de poste.
En poussant le bouchon un peu plus loin, les mails envoyés pourraient prendre une durée aléatoire pour être remis. Un lecteur de mon blog a même imaginé que cette durée soit proportionnelle à la distance, comme si le courriel était remis à pied, à cheval ou en bateau.
Car l’immédiateté nous condamne à la solitude. Si un mail est envoyé, une réponse reçue instantanément, l’ubiquité du smartphone nous oblige presque à répondre immédiatement. Cela même au milieu d’un magasin ou d’une activité, sous peine d’oublier et de penser paraitre grossier.
La réponse à la réponse sera elle aussi immédiate et la conversation s’achèvera, les protagonistes comprenant que ce ping-pong en temps réel ne peut pas durer plus de quelques mots.
Paradoxalement, en créant l’email, nous avons détruit une fonctionnalité majeure des relations épistolaires : la possibilité pour chacune des parties de répondre quand l’envie lui prend et quand elle est disponible.
Jusqu’au 20e siècle, personne ne s’étonnait de ne pas recevoir de réponse à sa lettre pendant plusieurs jours voire pendant des semaines. Écrire une lettre de relance était donc un investissement en soi : il fallait se souvenir, garder l’envie et prendre le temps de le faire.
Cette temporisation a permis une explosion de la créativité et de la connaissance. De grands pans de l’histoire nous sont accessibles grâce aux relations épistolaires de l’époque. De nombreuses idées ont germé lors d’échanges de lettres. Pouvez-vous imaginer le 21e siècle vu par les yeux des historiens du futur à travers nos emails ?
Une lettre était lue, relue. Elle plantait une graine chez le destinataire qui méditait avant de prendre sa plume, parfois après plusieurs brouillons, pour rédiger une réponse.
Une réponse qui n’était pas paragraphe par paragraphe, mais bien une lettre à part entière. Une réponse rédigée en partant du principe que le lecteur ne se souvenait plus nécessairement des détails de la lettre initiale. Aujourd’hui, l’email nous sert à essentiellement à « organiser un call » pour discuter d’un sujet sur lequel personne n’a pris le temps de réfléchir.
Des parties d’échecs historiques se sont déroulées sur plusieurs années par lettres interposées. Pourrait-on imaginer la même chose avec l’email ? Difficilement. Les échecs se jouent désormais majoritairement en ligne en temps réel.
Pourtant, le protocole le permet. Il s’agit simplement d’un choix des concepteurs de logiciel d’avoir voulu mettre l’accent sur la rapidité, l’immédiateté, l’efficacité et la quantité.
Il ne faudrait pas grand-chose pour remettre au centre des échanges écrits la qualité dont nous avons cruellement besoin.
Nous utilisons le mail pour nous déresponsabiliser. Il y’a une action à faire, mais en répondant à l’email, je passe la patate chaude à quelqu’un d’autre. Répondre le plus rapidement, si possible avec une question, pour déférer le moment où quelqu’un devra prendre une décision. Tout cela au milieu d’un invraisemblable bruit publicitaire robotisé. Nous n’échangeons plus avec des humains, nous sommes noyés par le bruit des robots tout en tentant d’échanger avec des agents administratifs anonymes. Nous n’avons plus le temps de lire ni d’écrire, mais nous croyons avoir la pertinence de prendre des décisions rapides. Nous confondons, avec des conséquences dramatiques, efficience et rapidité.
Pour l’interaction humaine, nous nous sommes alors rabattus sur les chats. Leur format nous faisait penser à une conversation, leur conception nous empêche de gérer autrement qu’en répondant immédiatement.
Ce faisant, nous avons implicitement réduit l’interaction humaine à un échange court, bref, immédiat. Une brièveté et une rapidité émotive qui nous pousse à agrémenter chaque information d’un succédané d’émotion : l’émoji.
Nous en oublions la possibilité d’avoir des échanges lents, profonds, réfléchis.
Parfois, je rêve d’abandonner les clients mails et les messageries pour un véritable client de correspondances. De sortir de l’immédiateté du chat et de la froideur administrative du mail pour retrouver le plaisir des relations épistolaires.
OpenStreetMap (OSM) est maintenant au centre d’une alliance contre nature des plus grandes et des plus riches entreprises technologiques au monde. Les sociétés les plus importantes au monde considèrent OSM comme une infrastructure critique pour certains des logiciels les plus utilisés jamais écrits. Les quatre sociétés du cercle restreint, Facebook, Apple, Amazon et Microsoft, se retrouvent maintenant à investir et à collaborer avec OSM à une échelle sans précédent.
The first time I spoke with Jennings Anderson, I couldn’t believe what he was telling me. I mean that genuinely — I did not believe him. He was a little incredulous about it himself. I felt like he was sharing an important secret with me that the world didn’t yet know.
If I write it here, I probably wrote it first on Twitter.
The open secret Jennings filled me in on is that OpenStreetMap (OSM) is now at the center of an unholy alliance of the world’s largest and wealthiest technology companies. The most valuable companies in the world are treating OSM as critical infrastructure for some of the most-used software ever written.
The four companies in the inner circle— Facebook, Apple, Amazon, and Microsoft— have a combined market capitalization of over six trillion dollars.¹ In almost every other setting, they are mortal enemies fighting expensive digital wars of attrition. Yet they now find themselves eagerly investing in and collaborating on OSM at an unprecedented scale (more on the scale later).
What likely started as a conversation in a British pub between grad students in 2004 has spiraled out of control into an invaluable, strategic, voluntarily-maintained data asset the wealthiest companies in the world can’t afford to replicate.
I will admit that I used to think of OSM as little more than a virtuous hobby for over-educated Europeans living abroad — a cutesy internet collectivist experiment somewhere on the spectrum between eBird and Linux. It’s most commonly summarized with a variant of this analogy:
OSM is to an atlas as Wikipedia is to an encyclopedia.
OSM acolytes hate this comparison in the much same way baseball players resent when people describe the sport as “cricket for fat people.” While vaguely truthful, it doesn’t quite get to the spirit of the thing.
OSM is incomparable. Over 1.5M individuals have contributed data to it. It averages 4.5M changes per day.
You can think of OSM in several ways:
It’s hard to get people to agree on what exactly OSM is, but almost everyone agrees on one thing: it’s extraordinarily valuable and important.
For those paying attention, none of what I outline below will be news. However — outside of a relatively small cluster of weirdos who pay attention to trends in geospatial technology— almost no one seems to be paying attention.
That’s mostly because so few people have even heard of OpenStreetMap, despite the fact that hundreds of millions of people rely on it during any given month. If you’ve ever opened Snap Maps or Apple Maps or Bing Maps or even just peeked at the dash of your obnoxious neighbor’s new Tesla…you’ve used OSM.
In May of 2019, Jennings co-authored a paper with Dipto Sarkar and Leysia Palen titled, Corporate Editors in the Evolving Landscape of OpenStreetMap. If you prefer the research in presentation form, this talk is a fabulous summary of their findings:
Dr. Anderson’s talk at State of the Map 2019, “Corporate Editors in the Evolving Landscape of OpenStreetMap: A Close Investigation of the Impact to the Map & Community.”
In that talk, Jennings outlines the findings presented in his research. Not only was there already significant corporate investment happening in OSM in 2018, but in many cases corporate editors were responsible for the majority of edits in the specific geographies they were focused on. For instance:
For areas where corporate teams are active, on average, the non-corporate editors are now responsible for less than 25% of total road editing activity, which is down from closer to 70% in 2017.
Jennings noted, importantly, that as of 2018 non-corporate editors were still responsible for the majority of activity on OSM (about 70% of all edits) and were significantly more active on edits to buildings, places of interest, and amenities.
In a more recent talk from State of the Map in July 2020, Jennings presented updated figures showing that the torrent of corporate contributions only increased from 2018 to 2019 and beyond with Amazon and Apple trending along the steepest slope.
Seriously, watch the entire talk, it’s amazing: Curious Cases of Corporations in OpenStreetMap
Also interesting to note is Mapbox’s apparent decision to stop investing significantly into direct OSM edits and contributions. Apple was responsible for more edits in 2019 than Mapbox accounted for in its entire corporate history…I don’t have a good explanation for that. I wonder if they decided their effort could be more highly leveraged on core web mapping technology rather than manual digitization.
I’m in no position to comment on most of the things I write about. But in this instance, I’m particularly unqualified — OSM has amassed a long-lived, fantastically diverse, and inherently fragmented community. I’ve never even commented in one of the forums.
But one thing that is clear even to a casual observer like me: one of the consequences of increased corporate involvement in OSM is a significant backlash from members within the OSM community that feel the community (and data) is being irreversibly adulterated by these profiteering intruders.
At the last OSM annual conference Frederik Ramm, a prominent and quite thoughtful OSM community member, summarized the attitude toward corporate contributors this way:
“[…] none of these companies is essential to OpenStreetMap. They are contributors, but OpenStreetMap could work perfectly well without them […] the mainstay of OpenStreetMap is the millions of hobbyists, individuals that contribute to OpenStreetMap.
A vocal minority of voluntary contributors to OSM seem to have a bit of a chip on their shoulder when it comes to the suits. A consistent undercurrent that I’ve noticed is skepticism about the motivations and incentives of for-profit firms. Here’s a typical sentiment excerpted from Serge Wroclawski’s magnificently controversial blog post, Why OpenStreetMap is in Serious Trouble (published in February of 2018).
Many of the founders of the project, as well as others, have launched commercial services around OSM. Unfortunately, this creates an incentive to keep the project small and limited in scope to map up the gap with commercial services which they can sell.
I think the playing field has changed significantly since Serge wrote those words — he was likely referring to projects like CloudMade (now defunct) and Mapbox ,which sought to offer generic map services on top of OSM’s dynamic map database (rather than enhance in-house products where mapping is ancillary to their core value proposition like it is for FAAM). He makes an interesting argument that OSM itself should be offering these services rather than letting companies piggyback on the efforts of countless volunteers while capturing all of the economic value.
I wrote earlier this year about the concept of “Commoditizing Your Complement,” in my explanation of why Facebook acquired Mapillary and then gave away all the data they had just purchased for free.
The concept is simple: undermine your competitors’ intellectual property advantage by collaborating with aligned entities to cheapen it with a free and openly licensed alternative.
I would wager that corporate participation in OSM is less about directly monetizing souped-up versions of OSM data provided as modern web services and more about desperately avoiding the existential conflict of having to pay Google for the privilege of accessing their proprietary map data.⁵
Whatever the motivations of these mega-corporations, they’ve succeeded in carving out a niche for themselves within the OSM community whether the hobbyists like it or not. I’d like to highlight a nuance often lost in this discussion — just exactly who are these companies hiring to add data to the map? They are often already-active, enthusiastic contributors to OSM. These are people living the open data fanatic’s dream: getting paid to do a job they find so fulfilling they would otherwise do it for free in their spare time.
There’s obviously a lot more to it than just sticking it to Google. Facebook, for instance, has ambitions of building new types of digital experiences that interplay with the real world (as evidenced by their focus on augmented reality and acquisition of novel user interface technology like CTRL-labs). Apple has added LiDAR to its new line of iPhones and iPods allowing customers to scan the 3D world in high fidelity among other exciting uses:
These firms have outgrown your office and your living room. They want to be with you literally every where you go, and constantly seduce you with entertaining and immersive experiences. The more of your attention they can monopolize, the more money they can make from selling chunks of it to advertisers and people developing software on their platforms.
Whether you like their motivations or not, the result is a desire to map the world in higher fidelity and at larger scale than even they can afford to accomplish independently. And that has, for better or worse, brought their interests into alignment with the grassroots OSM community.
Well, anytime the wealthiest institutions in history are quietly collaborating on something, I think it’s worth noting. I’m not sure there is a precedent for such a collaboration — if you know of a case where otherwise embittered mega-corporations worked with a global community of volunteers on a public dataset…let me know. I’d love to learn about it.
The question on my mind is how idiosyncratic this situation really is. Does OSM represent a model for strategic corporate sponsorship of public goods moving forward? Or is it tragically inimitable?
For instance: I work for a company called Azavea that, among many noble efforts, maintains Cicero. It’s a database of elected officials and legislative districts in several countries around the world that gets updated daily. You can imagine that this should be a public good — like, doesn’t the government already have this information? Turns out…nah. Cicero requires ceaseless, grueling work to keep updated, and that means serious investment of time and money.
One of the key differences between Cicero and OSM is a community of contributors. Community is what makes OSM special. Without it, the project is “default dead,” as they say in Silicon Valley. Much like elected official information, map data goes stale fairly quickly and therefore requires constant life support.
OSM’s community seems conflicted about whether or not corporate participation is ok (let alone good) for the future of the project. And yet the community is precisely what attracts corporate contributors. OSM provides two advantages over just buying privately collected data:
Existing data is free and growing apace
Some may squirm at the idea that their contributions to OSM help FAAM…after all, do they really need the help? But what’s beautiful is that FAAM is contributing (rather than passively mooching) because of the compounding value of having any/all data make it into the community’s growing number of hands.
I’m kind of shocked to be saying it, but somehow — almost inexplicably — the goals of the OSM community and corporate contributors seem to be largely aligned. They all want an accurate, ubiquitous map of the world that can be maintained in perpetuity as sustainably as possible.
It’s the opposite of the Tragedy of the Commons — all of the private property holders, acting in their own self interest, are enriching the common resource rather than depleting it.contributors account for ~90% of the edits to OSM. This roughly adheres to something called the 1% rule of online communities which states that, “1% of Internet users are responsible for creating content, while 99% are merely consumers of that content.”
Written by Joe Morrison
Google sait où vous êtes, les annonceurs aussi.
Avec un milliard d'utilisateurs actifs par mois, Google Maps sait tout. Non seulement les noms de toutes les rues, cafés, bars et magasins, mais aussi les endroits où les gens se rendent. Mais s’il a le pouvoir de suivre chacun de nos pas, cela ne veut pas forcément dire qu'il abuse de ce pouvoir. Mais il pourrait le faire s’il le voulait, ce qui est un problème en soi, d'autant plus que le siège de Google se trouve aux États-Unis, où la législation sur la vie privée est moins stricte qu'en Europe et où les agences de renseignement ont l'habitude de surveiller les particuliers (on vous voit, la NSA).
Oui, Google Maps est incroyablement utile. Mais voici quelques raisons qui vous inciteront à vérifier vos paramètres de confidentialité et à vous demander quelle quantité de données personnelles vous êtes prêt à sacrifier au nom de la commodité.
Dans les paramètres, il est dit que l’option « Activité sur le Web et les applications » permet à l’utilisateur de bénéficier d’une expérience plus rapide et plus personnalisée. En clair, cela signifie que chaque endroit que vous consultez dans l'application – qu'il s'agisse d'un club de strip-tease, d'un kebab ou de la localisation de votre dealer – est enregistré et intégré dans l'algorithme du moteur de recherche de Google pendant une période de 18 mois.
Google sait bien que tout cela est un peu flippant. C'est pourquoi l'entreprise utilise des dark patterns, c'est-à-dire des interfaces utilisateur conçues pour nous tromper ou nous manipuler, par exemple en mettant en évidence une option avec certaines polices ou des couleurs plus vives.
Nous avons donc créé un nouveau compte Google pour tenter de repérer ces dark patterns. Après avoir cliqué sur « Créer un compte », une fenêtre pop-up nous indique que le compte est « configuré pour inclure des fonctions de personnalisation » en petites lettres grises. En cliquant sur « Confirmer », nous acceptons d’activer l’option « Activité sur le Web et les applications » mentionnée ci-dessus. L’autre bouton, « Plus d'options », est moins visible et redirige vers une nouvelle page avec des explications denses et compliquées. Nous devons désactiver l’option manuellement.
Si vous ouvrez l’application Google Maps, vous verrez un cercle avec votre photo de profil dans le coin supérieur droit qui indique que vous êtes connecté à votre compte Google. Ce n'est pas nécessaire, et il vous suffit de vous déconnecter. Évidemment, le bouton pour se déconnecter de votre compte est légèrement caché, mais vous pouvez le trouver comme ceci : cliquez sur le cercle > Paramètres > faites défiler vers le bas > Se déconnecter de Google Maps.
Autre fonctionnalité problématique : « Vos trajets Google Maps » qui « affiche une estimation des lieux que vous avez visités et des itinéraires que vous avez empruntés d’après l’historique de vos positions. » Cette fonction vous permet de consulter les informations figurant dans vos trajets, y compris les modes de transports utilisés, comme en voiture ou à vélo. L'inconvénient, bien sûr, est que tous vos déplacements sont connus de Google et de toute personne ayant accès à votre compte.
Et il n’y a pas seulement les hackers dont vous devez vous méfier ; Google peut aussi fournir vos données à des agences gouvernementales comme la police. Sur sa page FAQ à ce sujet, Google indique que son équipe juridique évalue chaque cas individuellement. Tous les six mois, l'entreprise publie un rapport de transparence, mais rien n'est disponible pour 2020. Entre juillet et décembre 2019, Google a reçu 81 785 demandes de divulgation d'informations concernant 175 715 comptes dans le monde entier et a répondu favorablement à 74 % d’entre elles.
Si votre « historique des positions » est activé, votre téléphone « indique les positions des appareils sur lesquels vous êtes connecté à votre compte ». Cette fonction est utile si vous perdez votre téléphone, mais elle en fait surtout un véritable dispositif de suivi.
Les avis Google peuvent être très utiles, mais une recherche rapide peut révéler des informations sensibles que les utilisateurs ont oubliées par inadvertance. Un exemple est celui d'un utilisateur (qui semble utiliser son vrai nom) qui a écrit la critique suivante sur un supermarché à Berlin : « Depuis quatre ans, j'y vais deux ou trois fois par semaine pour faire les courses pour ma famille. » Il va sans dire que le fait de partager ce type d'informations avec tout le monde peut être risqué.
Google Maps demande souvent aux utilisateurs de partager une évaluation publique rapide. « Comment était le Berlin Burger ? », demande l’application après votre dîner. Cette question a priori désinvolte et légère donne l’impression d’aider les autres, mais toutes ces informations sont stockées sur votre profil Google et toute personne qui le lira pourra facilement savoir si vous avez été quelque part pendant une courte période (par exemple en vacances) ou si vous vivez à proximité.
Si vous finissez par regretter un avis, Google vous donne au moins la possibilité de le rendre privé après l’avoir publié. Pour ce faire : Photo de profil > Modifier le profil > Profil et confidentialité > Faites défiler vers le bas > Profil limité. Si vous activez cette option, vous devrez approuver les personnes qui peuvent suivre votre profil et voir vos avis.
Vous vous souvenez de la navigation GPS ? Elle était peut-être maladroite et lente, mais il n’était pas nécessaire d'être connecté à Internet pour être dirigé. En fait, d'autres applications offrent une navigation sans connexion Internet. Dans l'application Google, vous pouvez télécharger les cartes, mais la navigation hors ligne n'est disponible que pour les voitures. Il semble assez improbable que le géant de la technologie ne soit pas en mesure de guider les piétons et les cyclistes sans Internet.
« La mission de Google consiste à proposer des expériences utiles et enrichissantes, pour lesquelles les données de localisation jouent un rôle essentiel », explique l'entreprise sur son site. Elle utilise ces données pour toutes sortes de choses utiles, comme la « sécurité » ou les « paramètres linguistiques ». Et, bien sûr, pour vendre des annonces. Google offre également aux annonceurs la possibilité de « mesurer le degré de notoriété de leur marque ».
Parfois, il existe de bonnes alternatives aux applications problématiques. C'est vrai pour WhatsApp, par exemple, mais pas pour Google Maps. Apple Maps a une politique de confidentialité plus stricte, mais elle n'est pas disponible pour Android. Des applications comme Here WeGo collectent aussi des données et ne sont pas aussi bonnes, mais si vous êtes un marcheur qui préfère rester hors ligne, OsmAnd et Maps.me peuvent au moins vous montrer le chemin sans passer par Internet.