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 La revue de web de Kat

Ces « villes et villages où il fait bon vivre » : faux classement scientifique et vraie opération commerciale - La Montagne

Sun 30 Jan 2022 - 10:52

Votre ville ou village brille dans le classement des « Villes ou villages où il fait bon vivre » en France ? Ou pas du tout ? Dans les deux cas, rien d'important. Surtout s'il ne vous vient pas l'idée de payer le « label ».

Habiter dans un endroit où « il fait bon vivre » n'est-il pas la douce espérance de chacun ? Et donc une info « concernante » dans le langage des communicants. Ainsi, des « études » et « classements » des communes « où il fait bon vivre », se diffusent régulièrement dans la presse. Et certains en ont fait profession.

On peut s'intéresser au tout dernier publié, le 11 avril dans le Journal du Dimanche. Celui-ci est un « palmarès établi par l'association Villes et villages où il fait bon vivre » indique le média. Quelle est cette association loi 1901, c'est-à-dire une structure dont l'objet doit être à un but non lucratif ?

Une « association loi 1901 »

Son site internet n'est pas très disert sur sa vie associative et son nombre d'adhérents, mais indique que l'association est « présidée par Thierry Saussez, créateur du Printemps de l’optimisme ». Les mentions légales précisent que le siège social de l'association est situé au 7, rue Laurin à Rueil-Malmaison et que le directeur de la publication du site est Alexandre Saussez. Soit le fils de Thierry Saussez (lien vers son autobiographie). Thierry Saussez est un spécialiste de la communication politique, surnommé par le milieu professionnel « le Jacques Séguéla de droite », et l'ancien responsable du système d'information du gouvernement (SIG) sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

Méthodologie, limites et biais

Ces présentations faites, comment est établi le « classement des Villes et villages où il fait bon vivre » ?

Un bon point sur la transparence d'abord, tous les éléments pour analyser la situation sont contenus dans les documents mis à disposition sur le google drive de l'association.

L'association explique qu'il est « construit sur les priorités des Français, de nouveau consultés par un sondage exclusif OpinionWay ». Ce « Sondage OpinionWay pour Le Printemps de l’Optimisme » (mention légale) est un sondage auto-administré en ligne, c'est-à-dire rempli de façon autonome par les personnes interrogées, sans assistance d'un enquêteur. Il mentionne l'interrogation « d’un échantillon de 1.010 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus » Les répondants étaient payés (incentives légalement parlant) ou « pouvaient faire don à une association ».

La société OpinionWay crédite son sondage de « marges d'incertitude de 1,5 à 3 points au plus ».

Ce sondage classe les 8 critères qui étaient proposés (plusieurs réponses possibles en même temps, mais dans cette liste limitée) dans cet ordre d'importante : la qualité de vie ; la sécurité ; le commerce ; les transports ; la santé ; l'éducation ; la solidarité ; les sports et loisirs.

S'il est indiqué que ces huit critères majeurs et leur classement « pondèrent » les notes ensuite basées sur 183 types de données venues de l'Insee et d'organismes publics, la formule de calcul précise de cette « pondération » n'est pas explicitée.

En revanche, la prime aux plus faibles kilométrages est très explicite. Pour tous les critères d'accès à des infrastructures, services ou loisirs, la note de chaque commune dépend directement d'une tranche de distance : 100 points, soit le maximum, si l'équipement est dans la ville ; 0 s'il se situe à plus de 15 km, 30 km ou 60 km (équipements plus rares, comme les aéroports).

Joli biais de raisonnement donc de résultats ? On peut le penser en observant que le « classement » distingue 45 villages de Moselle et aucun en Creuse. Ou encore que toutes les zones montagneuses de France semblent – à l'exception des belles d'en bas comme Annecy – ne pas être des lieux « où il fait bon vivre ».

On notera d'ailleurs que les associations d'élus ruraux, lorsqu'elles se penchent sur les questions de leurs équipements, raisonnent non en kilomètres, mais en temps de parcours pour les habitants.

Ces incohérences pourraient simplement faire sourire et sont, c'est vrai, l'apanage de toute tentative de classement de milliers de communes sur N facteurs. Mais d'autres éléments dans la démarche sont curieux.

Un paiement dû à une société commerciale

L'association – jusqu'ici on parle encore d'elle – promet aux mieux notés d'intégrer « un cercle fermé de territoires distingués sur les 34.837 communes de France métropolitaine, qui, grâce à leur excellence dans les thématiques importantes aux Français, sont éligibles pour exploiter le label des villes et villages où il fait bon vivre. » Rien que ça ! Et comment « exploiter » un tel honneur ? Très simplement en payant une cotisation, via le mandat et le RIB fourni. À l'association « Villes et villages où il fait bon vivre » ? Non. À la société Taléus, « spécialiste » des systèmes d'informations, des bureaux informatiques virtuels et propriété d'Alexandre Saussez. Ceci dit, le chèque du petit village ne sera pas perdu, l'adresse de ladite société privée étant le 7, rue Laurin à Rueil-Malmaison.

Pour en savoir plus sur le Printemps de l'optimisme et ses actions, il est aussi possible de parcourir son site internet, dont la communication a été confiée à une autre société « experte ». L'agence AS-Tek, domiciliée au 7, rue Laurin à Rueil-Malmaison, et qui appartient à... Alexandre Saussez.

Vous souhaitez comparer ? Ces données sont gratuites

Simple citoyen, entrepreneurs, collectivités, vous souhaitez utiliser les statistiques pour analyser votre territoire, ses forces et faiblesses, et vous comparez à d'autres territoires comparables ? En vertu des lois sur la transparence, tous les organismes de l'État et, une foule d'autres acteurs publics, donnent librement et gratuitement accès à leurs données. Parmi les plus faciles à utiliser, le comparateur de territoire des statistiques locales de l'Insee et la plateforme de ressources data.gouv.fr.

Julien Bigay

arnaque classement villes
https://www.lamontagne.fr/paris-75000/actualites/ces-villes-et-villages-ou-il-fait-bon-vivre-faux-classement-scientifique-et-vraie-operation-commerciale_13939799/

Le nom de l’Amérique vient-il d’Amerigo Vespucci ?

Sat 22 Jan 2022 - 10:55

Nous avons généralement appris à l’école que l’Amérique avait reçu son nom à la Renaissance, en hommage au navigateur florentin Amerigo Vespucci. Il est ainsi communément admis qu’un groupe d’érudits de Saint-Dié-des-Vosges, gravitant dans l’entourage du duc René II de Lorraine, aurait décidé en 1507 de forger le mot « America ». Ces savants humanistes, guidés par le chanoine Vautrin Lud, seraient partis du postulat que Vespucci avait été le premier à prendre conscience que les terres ouvertes à la connaissance des Européens à la fin du XVe siècle n’étaient pas une partie inconnue de l’Asie, mais un « Nouveau Monde ». Il convenait dès lors de nommer ces terres nouvelles.

Allégorie du voyage d'Amerigo Vespucci vers les Amériques, Estampe, 1589. Musée du Nouveau Monde, La Rochelle Allégorie du voyage d'Amerigo Vespucci vers les Amériques, Estampe, 1589. Musée du Nouveau Monde, La Rochelle

Cette explication fait généralement consensus (tout en suscitant de nombreuses indignations) depuis la mort de Vespucci lui-même, alors que ce dernier n’a sans doute jamais eu conscience que son prénom avait été donné à une partie des terres nouvelles qu’il avait explorées à plusieurs reprises au tournant du XVIᵉ siècle.

Un mot qui fait débat

Pourtant, depuis le dernier tiers du XIXe siècle, certains auteurs ont cherché à prouver que la filiation supposée entre le prénom de Vespucci et la dénomination du Nouveau Monde n’était qu’une grossière confusion. Usant d’arguments très variés, et surtout de motivations diverses, ils ont redoublé d’efforts pour faire admettre à la communauté historienne internationale, mais aussi au grand public que le nom de l’Amérique avait une tout autre provenance que celle qui était le plus communément admise.

C’est en particulier au début des années 1890, dans le contexte particulier du quatrième centenaire du premier voyage de Christophe Colomb (1892-93) et de l’approche de l’Exposition universelle de Chicago (ou World Columbian Exposition), que la polémique autour de l’origine du nom de l’Amérique connaît un certain essor.

On note une effervescence intellectuelle autour du mot « Amérique ». Certaines théories sont échafaudées pour tenter de prouver que ce mot n’est pas d’origine européenne, mais qu’il aurait au contraire une provenance indigène. C’est en particulier Jules Marcou, un Jurassien résidant à Cambridge (Massachusetts), qui se fait pendant deux décennies le héraut de cette théorie, à travers ses ouvrages et ses articles.

Brillant géologue, ami intime de Louis Pasteur avec qui il a partagé les bancs du lycée, il est parti aux États-Unis en 1848, s’est marié avec la fille d’un riche américain en 1850, le mettant ainsi à l’abri des contingences matérielles et lui permettant de se consacrer exclusivement à ses recherches. Il est connu pour s’être fait beaucoup d’ennemis et avoir émis des théories très controversées dans de nombreux domaines.

Carte géologique des États-Unis et des possessions britanniques de l’Amérique du Nord, d’après Jules Marcou. Gallica-BnFCarte géologique des États-Unis et des possessions britanniques de l’Amérique du Nord, d’après Jules Marcou. Gallica-BnF

Sur la question spécifique du nom de l’Amérique, il cherche à prouver que ce nom proviendrait d’une chaîne de montagnes appelée Amerrique ou Amerriques, située entre le lac Nicaragua et la mer des Antilles. La région serait habitée par une tribu d’Indiens nommée Amerriques. En langue Maya, ce nom signifierait « le pays du vent », « le pays où le vent souffle toujours ». Ayant entendu ce nom lors de l’une de ses explorations, Vespucci (qui se serait prénommé en réalité Alberico), aurait alors choisi de modifier son prénom en hommage à ces contrées sauvages.

Ces remises en cause ont été fort discutées lors de la huitième session du Congrès des Américanistes en octobre 1890 à Paris. Les conclusions en furent sans appel, réfutant totalement les conclusions de Marcou et d’autres chercheurs. Ainsi, le géographe Lucien Gallois, spécialiste de la cartographie de la Renaissance et disciple de Paul Vidal de la Blache, considère que la théorie de Jules Marcou manque de solidité et ne peut être acceptée en l’état.

Un enjeu identitaire

Il faut dire que, pour les savants et politiques de l’ancien et du nouveau monde, l’enjeu est alors de taille. Il s’agit de savoir si l’Amérique a un nom de baptême d’origine européenne ou indigène. Si les théories de Marcou ont été réfutées assez facilement en raison de leur manque de solidité et du manque de preuves pour les étayer, cette polémique a montré qu’il existait alors un enjeu identitaire fort autour de la captation de ce nom. En effet, dans les années 1890, les États-Unis ont achevé de panser les plaies de la guerre de Sécession et sont en passe de devenir une grande puissance.

Déjà devenus la première puissance industrielle du monde, ils sont au seuil de devenir également un empire. La doctrine Monroe, élaborée en 1823, connaît alors une nouvelle lecture nationaliste, que l’on résume parfois par l’expression « l’Amérique aux Américains ». Les États-Unis ont, depuis leur indépendance, progressivement capté à leur profit le nom qui devrait normalement échoir au continent dans son ensemble, America.

Or, la question de savoir si ce nom est un toponyme originaire du Nouveau Monde ou bien s’il est un avatar dérivé du nom d’un obscur Florentin, considéré qui plus est comme un imposteur par des générations d’auteurs, est tout à fait centrale dans la construction de l’identité nationale états-unienne.

Théories en cascade

C’est pourquoi des médias américains et européens se font régulièrement l’écho, tout au long du XXe siècle, de nouvelles théories essayant de renouveler l’approche du sujet. Ainsi, en 1908, l’antiquaire de Bristol Alfred Hudd publie un article dans lequel il affirme que le nom de l’Amérique proviendrait en fait de Richard Ap Meyrick, sheriff de cette ville du sud-ouest de l’Angleterre au début du XVIe siècle et qui avait contribué financièrement aux voyages de Jean et Sébastien Cabot. Pour le remercier, ces derniers auraient décidé de donner son patronyme à l’étendue continentale sur laquelle ils avaient accosté. Cette théorie, qu’aucune étude historique sérieuse n’est venue valider, a pourtant été largement relayée depuis lors, en particulier au Royaume-Uni où l’idée que le nom de l’Amérique ait pu être originaire de Bristol s’avère séduisante.

En octobre 2019, c’est le Guardian qui publie dans son courrier des lecteurs une autre explication. Selon Colin Moffat, c’est bien Colomb qui est à l’origine du nom America. Au cours de son voyage en Islande en 1477-1478, il aurait entendu parler d’une terre nommée « Markland ». Pour convaincre les Rois Catholiques de financer son expédition, il leur aurait parlé de cette terre pleine de promesses en hispanisant son nom : ajoutant le préfixe A, puis remplaçant « land » par « -ia », « Markland » serait devenu « Amarkia », puis « America ». Peu de temps après cette explication aussi alternative qu’iconoclaste, le Guardian n’a pas tardé à publier un nouvel article contestant les propos de M. Moffat et redonnant à Vespucci la place qui est la sienne dans le panthéon des figures de l’ère des découvertes européennes.

Une telle polémique, qui pourrait prêter à sourire, montre que la question des origines du nom de l’Amérique demeure une histoire vivante et discutée, même si les arguments avancés par ceux qui rejettent la version la plus couramment admise sont rarement étayés par des preuves convaincantes. Depuis les travaux de Jules Marcou à la fin du XIXe siècle, et quelles que soient les motivations qui sous-tendent ces contestations, personne n’a jamais pu apporter la preuve irréfutable que Saint-Dié-des-Vosges ne pouvait pas réellement prétendre au statut de « marraine de l’Amérique », pour avoir abrité les travaux ayant abouti au « baptême » du Nouveau Monde en 1507.

America
https://theconversation.com/le-nom-de-lamerique-vient-il-damerigo-vespucci-174281

Le port du masque ne peut être imposé en extérieur qu’à certaines conditions - Conseil d'État

Mon 17 Jan 2022 - 11:37

Saisi en urgence par un particulier, le Conseil d’État précise que les préfets ne peuvent imposer le port du masque en extérieur qu’à certaines conditions : il doit être limité aux lieux et aux heures de forte circulation de population quand la distanciation physique n’est pas possible, et uniquement si la situation épidémiologique locale le justifie. Mais le préfet peut délimiter des zones suffisamment larges pour que la règle soit compréhensible et son application cohérente.

Un particulier a saisi le juge des référés du Conseil d’État pour qu’il ordonne la suspension de la décision par laquelle le Premier ministre a donné instruction aux préfets de mettre en œuvre l’obligation de port du masque en extérieur. Le juge des référés du Conseil d’État, statuant en formation collégiale, relève d’abord que la possibilité de mettre en œuvre cette obligation est prévue par le décret du 1er juin 2021.

Le juge des référés du Conseil d’État précise toutefois dans quelles conditions le masque peut être légalement imposé en extérieur. Tout d’abord, il faut que la situation épidémiologique locale le justifie. Ensuite, le port du masque doit être limité aux lieux et aux heures de forte circulation de population ne permettant pas d’assurer la distanciation physique, ainsi qu’aux lieux où les personnes sont amenées à se regrouper (tels que les marchés, les rassemblements sur la voie publique ou les centres-villes commerçants). Les périodes horaires doivent aussi être appropriées aux risques identifiés. En effet, bien que le risque de contamination au covid-19 soit plus faible en plein air, il n’est pas manifestement exclu par les recommandations scientifiques qu’une contamination se produise en extérieur lorsqu’il existe une forte concentration de personnes.

Cependant le préfet peut délimiter des zones d’obligation de port du masque suffisamment larges pour que sa mise en œuvre soit compréhensible et cohérente.

Le juge des référés du Conseil d’État rappelle que le Premier ministre devra tenir compte des éventuelles évolutions des connaissances scientifiques pour adapter si besoin ses instructions aux préfets, voire de mettre fin à cette obligation si l’utilité du port du masque n’était plus établie.

Compte tenu de ces éléments, le juge des référés du Conseil d’État rejette la demande de suspension de la décision du Premier ministre.


COMMUNIQUÉ DE PRESSE

[Décision de justice]

Le port du masque ne peut être imposé en extérieur qu’à certaines conditions

Saisi en urgence par un particulier, le Conseil d’État précise que les préfets ne peuvent imposer le port du masque en extérieur qu’à certaines conditions : il doit être limité aux lieux et aux heures de forte circulation de population quand la distanciation physique n’est pas possible, et uniquement si la situation épidémiologique locale le justifie. Mais le préfet peut délimiter des zones suffisamment larges pour que la règle soit compréhensible et son application cohérente.
Un particulier a saisi le juge des référés du Conseil d’État pour qu’il ordonne la suspension de la décision par laquelle le Premier ministre a donné instruction aux préfets de mettre en œuvre l’obligation de port du masque en extérieur. Le juge des référés du Conseil d’État, statuant en formation collégiale, relève d’abord que la possibilité de mettre en œuvre cette obligation est prévue par le décret du 1er juin 2021.
Le juge des référés du Conseil d’État précise toutefois dans quelles conditions le masque peut être légalement imposé en extérieur. Tout d’abord, il faut que la situation épidémiologique locale le justifie. Ensuite, le port du masque doit être limité aux lieux et aux heures de forte circulation de population ne permettant pas d’assurer la distanciation physique, ainsi qu’aux lieux où les personnes sont amenées à se regrouper (tels que les marchés, les rassemblements sur la voie publique ou les centres-villes commerçants). Les périodes horaires doivent aussi être appropriées aux risques identifiés. En effet, bien que le risque de contamination au covid-19 soit plus faible en plein air, il n’est pas manifestement exclu par les recommandations scientifiques qu’une contamination se produise en extérieur lorsqu’il existe une forte concentration de personnes.
Cependant le préfet peut délimiter des zones d’obligation de port du masque suffisamment larges pour que sa mise en œuvre soit compréhensible et cohérente.
Le juge des référés du Conseil d’État rappelle que le Premier ministre devra tenir compte des éventuelles évolutions des connaissances scientifiques pour adapter si besoin ses instructions aux préfets, voire de mettre fin à cette obligation si l’utilité du port du masque n’était plus établie.
Compte tenu de ces éléments, le juge des référés du Conseil d’État rejette la demande de suspension de la décision du Premier ministre.
Décision n° 460002 du 11 janvier 2022

Conseil-d'État Covid masque
https://www.conseil-etat.fr/actualites/actualites/le-port-du-masque-ne-peut-etre-impose-en-exterieur-qu-a-certaines-conditions

Grève des profs… en 1229 ! – Actuel Moyen Âge

Sun 16 Jan 2022 - 11:23

Aujourd’hui, les enseignants – mais aussi les AED, les AVS, les AESH, les CPE, dont on ne parle pas assez – font grève pour dénoncer la manière dont leur ministre, Jean-Michel Blanquer, les traite depuis presque cinq ans. La gestion catastrophique du COVID n’est que l’apogée dans une destruction planifiée de l’école publique, qui, à coups de mensonges et de mépris, épuise les personnels et accroît les inégalités entre élèves. Pour l’occasion, on republie cet article écrit en juin 2019, à l’occasion d’une autre grève (contre le même ministre).

« Un énorme abus d’autorité »

Nous sommes en 1229, à Paris. Dans cette ville, alors la plus peuplée d’Occident, une nouvelle institution tente de trouver sa place : l’université. Apparue au milieu du XIIe siècle, elle a été officiellement reconnue par le roi en 1200 et par le pape en 1215. Spécialisée dans la théologie, discipline reine du cursus scolaire à l’époque, elle attire tellement d’étudiants, venus de tous les coins de la chrétienté occidentale, que le quartier qui l’entoure finira par être appelé le quartier latin. Ces étudiants sont souvent très turbulents, d’où de nombreux heurts, parfois très violents, avec la police.

En mars 1229, suite à une soirée trop arrosée, plusieurs étudiants saccagent une taverne. En répression, les gardes de Paris tuent plusieurs étudiants. Or, ceux-ci sont des clercs, car l’université est une institution religieuse, et traditionnellement les clercs ne peuvent être jugés et punis que par l’Eglise (c’est ce qu’on appelle le privilège du for ecclésiastique).

Les maîtres de l’université de Paris prennent très au sérieux cette agression : permettre aux gens d’armes laïcs de s’en prendre aux étudiants clercs, c’est menacer la place et l’autonomie de l’université. Comme le note le chroniqueur anglais Matthieu Paris, il s’agit d’un « énorme abus d’autorité ». Aussi les maîtres décident-ils de recourir à une pratique nouvelle : la grève.

Tous en grève

Le lendemain de l’exécution de plusieurs étudiants, les professeurs arrêtent de faire cours. Tous. D’un seul coup. Une délégation de maîtres va trouver la reine et régente Blanche de Castille et demande justice : mais elle refuse. Vingt-et-un maîtres, élus par leurs pairs, signent alors une déclaration : ils expliquent qu’ils vont arrêter les cours et quitter la ville pendant les six prochaines années, en punition.

Surtout, ils rappellent qu’ils feront en sorte d’interdire que d’autres enseignent à Paris pendant ce temps-là, « ni en privé ni en public ». Le but n’est pas d’être remplacé mais bien de paralyser l’activité de l’université parisienne. Face à ce beau coup de force, on ignore par contre si Blanche de Castille a parlé de « prise d’otages »…

Finalement, la grève ne dure que deux ans. Le pape Grégoire IX, lui-même passé par l’université de Paris, s’emploie à réconcilier les maîtres et le pouvoir royal. En 1231, dans la bulle Parens Scientiarum, il confirme l’autonomie de l’université et, surtout, reconnaît que la grève est une pratique légale. Les maîtres ont le droit de suspendre leurs cours et de « disperser » leurs élèves dès qu’ils sont confrontés à un ensemble de menaces que la bulle détaille avec soin. Pendant plusieurs siècles, la grève reste une arme puissante, capable de faire céder le pouvoir royal et de le forcer à respecter les privilèges universitaires.

Le poids de la grève

Il faut dire que la grève a un énorme impact. Elle envoie d’abord un message symbolique, car le pouvoir royal s’enorgueillit du prestige de l’université parisienne. Matthieu Paris écrit que « Paris demeura privée des clercs qui faisaient sa gloire ». Et c’est d’autant plus terrible que cela profite à des rivaux de la royauté française : le roi d’Angleterre ou le comte de Toulouse se frottent les mains et font tout pour attirer les étudiants et les professeurs dans leurs universités à eux.

En outre, les conséquences économiques sont évidentes. Des milliers d’étudiants quittent la ville, pour retourner chez eux ou pour rejoindre une autre université : Reims, Toulouse, ou la toute nouvelle Oxford. Or ces étudiants jouent un rôle essentiel dans l’économie urbaine : ils consomment, se logent, font tourner tavernes, libraires et bordels. Il s’agit donc d’une perte sèche pour la ville. Et on peut imaginer que pendant deux ans, la reine a dû recevoir des demandes de la part des artisans urbains réclamant le retour de ces si profitables clients…

Comme aujourd’hui, la grève pose un défi de communication. Aujourd’hui, les profs en grève, à défaut d’être présentés sur les médias installés, investissent les réseaux sociaux pour alerter sur la façon dont le bac a été corrigé autour du hashtag #ChaosBlanquer. A l’époque, on trouve d’autres formats pour expliquer les raisons de la grève. Eudes de Châteauroux, maître en théologie, s’adresse ainsi à la population parisienne dans un sermon extrêmement violent. Selon lui, le pouvoir royal a trahi l’université en massacrant des étudiants : bien plus, il s’en prend à l’Église elle-même. Il s’agit d’arguments puissants, à même d’attiser les émotions populaires pour que la foule soutienne la cause des grévistes. On ne sait pas vraiment cependant si cela a fonctionné ou non : comme souvent, on ignore la réaction des auditeurs face à ce beau discours, chef d’œuvre de la rhétorique prédicatoire de l’époque. Aujourd’hui, les profs tentent également de mobiliser la population, en employant des mots aussi forts que « justice », « égalité de traitement », « consignes illégales » : l’absence quasi-totale de réaction des principaux médias est, par contraste, assez inquiétante.

Évidemment, cette grève médiévale n’a guère à voir avec la grève des profs d’aujourd’hui. Les profs du secondaire ne sont pas les maîtres de l’université médiévale : ils sont à la fois beaucoup plus nombreux et beaucoup plus divers (sociologiquement, politiquement, etc.), comme le sont les élèves contemporains par rapport aux étudiants du XIIIe siècle. La grève contemporaine n’est même pas réellement l’héritière de la grève médiévale des universitaires, plutôt de celles des ouvriers du XIXe siècle. Cependant, même si les enjeux comme les modalités sont bien différents, on relève un certain nombre de points communs. Dans les deux cas, il s’agit bien de s’opposer au pouvoir politique, au nom d’une certaine vision de l’institution éducative : l’université autonome, d’un côté ; l’école publique visant la réussite de tous, de l’autre. Dans les deux cas, l’enjeu est également le rapport à l’Etat : la grève est une façon de refuser la soumission aveugle, pour rappeler que l’avis des professeurs, premiers spécialistes de l’éducation, doit être pris en compte.

La grève de 1229 réussit, après un long bras de fer. Celle de 2019 échoue, face à la violence du pouvoir, tant réelle que symbolique. Les maîtres médiévaux pouvaient, en dernier recours, quitter la ville. Faudra-t-il un exil généralisé de tous les profs de France pour que l’on réalise l’état dans lequel se trouve actuellement l’éducation nationale… ?

Pour en savoir plus

  • Jacques Verger, L’Essor des universités au XIIIe siècle, Paris, Éditions du Cerf, 1997.
  • Serge Lusignan, La Construction d’une identité universitaire en France (XIIIe -XVe siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, 1999.
  • Sophie Cassagnes-Brouquet, La Violence des étudiants au Moyen Âge, Rennes, OuestFrance, 2012.
  • Antoine Destemberg, L’Honneur des universitaires au Moyen Âge, Paris, PUF, 2015.
enseignement grève Moyen-Age
https://actuelmoyenage.wordpress.com/2022/01/13/greve-des-profs-en-1229/

Les nouvelles perles de la «novlangue» pédagogiste

Sat 15 Jan 2022 - 15:08

Les nouveaux programmes scolaires, censés entrer en vigueur en 2016, font la part belle à un jargon «pédagogiste» ravivé. Un paradoxe alors qu'ils sont présentés par le Conseil supérieur des programmes comme «plus simples et plus lisibles».

Se déplacer (…) dans un milieu aquatique profond standardisé. (Page 22, cycle 4)

Le «milieu aquatique profond» est tout simplement… une piscine. Ce type de jargon foisonne dans les programmes d'éducation physique et sportive (EPS), une des disciplines scolaires les plus récentes (1981). Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué?

«Créer de la vitesse» et «traverser l'eau en équilibre horizontal par immersion prolongée de la tête». (Page 22, cycle 4)

Toujours en EPS, discipline friande de termes pédants, «créer de la vitesse» signifie «courir», tandis que «traverser l'eau en équilibre horizontal» signifie nager. Et comment appelle-t-on un plongeon?

«Produire des messages à l'oral et à l'écrit» en histoire-géographie. (Page 5 du cycle 4)

Le collégien à la sauce 2016 n'aura plus besoin de rédiger un devoir ou de répondre verbalement à une question de son professeur. Il se contentera de «produire des messages» écrits ou oraux. En «montrant un raisonnementconstruit».Tout de même…

«Aller de soi et de l'ici vers l'autre et l'ailleurs». (Page 17, cycle 4)

La «visée générale» des programmes de «langues étrangères et régionales» est d'«aller de soi et de l'ici vers l'autre et l'ailleurs». Cette visée se veut poétique mais semble un rien prétentieuse. Il est possible que beaucoup se perdent en chemin.

L'éducation aux médias est mise en œuvre, et organisée de façon spiralaire. (Page 53, cycle 4)

Selon Sylvie Queval, philosophe de l'éducation, la notion de pédagogie «spiralaire», inventée en 1960, a «vite rencontré un large écho chez les pédagogues, qui trouvent dans la métaphore de la spirale une façon juste d'exprimer qu'apprendre est un processus continu qui suppose une reprise constante de ce qui est déjà acquis». À en perdre l'équilibre.

langue novlangue
https://www.lefigaro.fr/actualite-france/2015/04/16/01016-20150416ARTFIG00421-les-nouvelles-perles-de-la-novlangue-pedagogiste.php

Pourquoi le ciel est bleu ? - Couleur-Science

Thu 13 Jan 2022 - 22:09

C’est une question classique, que je n’avais pas encore traitée ici. C’est en faisant un autre article sur un autre sujet que je m’en suis rendu compte, et c’est donc l’occasion de l’écrire.

Ciel bleu image de Artem PechenkinCiel bleu image de Artem Pechenkin

Le bleu n’est pas la couleur de l’air

Déjà, non, le ciel n’est pas bleu à cause d’un pigment. L’univers et le ciel nocturne, sont essentiellement noirs à cause de l’absence de lumière. Là où il n’y a pas d’étoiles pour émettre de la lumière, il n’y a pas de lumière (visible en tout cas) et c’est donc noir.

Le bleu n’est pas non plus la couleur intrinsèque de l’air : l’air, et le dioxygène gazeux, sont transparents.
Le dioxygène liquide est en revanche légèrement bleuté, et l’ozone — ou trioxygène — liquide est lui d’un bleu foncé intense, mais leurs versions gazeuses ne sont pas colorées.

L’origine de la couleur bleue du ciel n’est donc pas pigmentaire (l’atmosphère n’est pas bleue « par nature »), mais d’origine entièrement physique.

Une couleur d’origine physique

À l’instar des plumes de paon, des bijoux à cristaux liquides, ou encore la couleur de l’or, la couleur bleutée du ciel est d’origine physique.

Dans ces exemples, les différentes longueurs d’ondes, ou couleurs, de la lumière du soleil ne sont pas absorbées et filtrées comme c’est le cas avec un pigment coloré. Elles sont annulées ou amplifiées par interférence, déviées ou partiellement réfléchies.

Dans le cas du ciel, les couleurs formant la lumière blanche sont déviées. On dit aussi diffusées. En l’occurrence, il s’agit de la diffusion de Rayleigh.

Cette diffusion se fait quand l’atome se trouve sur la trajectoire d’un rayon lumineux. L’onde, qui n’est autre qu’une oscillation périodique du champ électrique et magnétique local, provoque une oscillation des nuages d’électrons des atomes qu’elle rencontre.
En somme : les atomes sur la trajectoire de l’onde sont mis en vibration. Les atomes, pour se désexciter, vont rayonner une onde dans toutes les directions :

Principe de la diffusion de RayleighPrincipe de la diffusion de Rayleigh

Avec la diffusion de Rayleigh, l’onde émise a la même longueur d’onde que l’onde incidente (la diffusion est élastique). La couleur ne change donc pas, seule la direction de l’onde est modifiée ; et comme elle va d’une seule direction à plusieurs, on dit qu’elle est diffusée.

Toutes les longueurs d’onde sont diffusées, mais pour la diffusion de Rayleigh, l’effet est d’autant plus prononcé que la longueur d’onde est courte.

Il s’agit d’une action de la matière sur la lumière, et c’est ceci qui permet d’agir sur des couleurs précises même sans qu’il n’y ait des pigments en jeu.

La diffusion de Rayleigh

La diffusion de Rayleigh a lieu dans le ciel et ce phénomène dépend de la longueur d’onde. Si la lumière incidente est blanche, et donc composée de toutes les longueurs d’onde, les courtes longueurs d’onde (violet, bleu…) vont être nettement plus diffusées que les grandes longueurs d’onde (rouge, jaune…).

Depuis le sol, ce qu’on observe est donc :

de la lumière rouge, jaune, orange qui provient directement de la source lumineuse (le soleil)
de la lumière bleue, violette, qui provient de partout, vu que l’atmosphère la diffuse un peu partout.

La diffusion de Rayleigh rendant le ciel bleuLa diffusion de Rayleigh diffuse les courtes longueurs d’onde beaucoup plus que les grandes longueurs d’onde

Si vous voulez une petite analogie, considérez une forêt avec des arbres, des arbustes et des brindilles. Ce sont les atomes. Considérez également des boulets de canon, des ballons de football et des balles de ping-pong.

Si vous envoyez un boulet de canon dans la forêt, ce dernier ira essentiellement tout droit : traversant les brindilles, les arbustes et même les arbres. Ils ne sont pas déviés, pas diffusés.
Les ballons de football, quant à eux, sont déviés par les arbres mais arrivent à repousser les petits arbustes et les brindilles sans changer de direction. Au final, ils ne sont que peu déviés.
Les balles de ping-pong, en revanche, sont tellement légères qu’elles sont déviées par les moindres brindilles et rebondissent dessus et finissent envoyées partout en rebondissant dans toutes les directions.

En supposant que la forêt soit en pente, quelqu’un situé en bas pourra voir précisément d’où viennent les boulets de canon en regardant leur trajectoire. Les boulets n’étant pas déviés, leur trajectoire rectiligne prend obligatoirement naissance à leur source, le canon.
Les balles de ping-pong proviennent, vues d’en bas, de tous les côtés. Il sera très difficile de remonter à leur source simplement en regardant où elles tombent !

Dans le cas du ciel, c’est un peu pareil : le bleu est diffusé partout dans le ciel et chaque molécule de l’air nous en envoie un peu : le ciel nous apparaît donc clairement bleu.

Les couleurs de longueur d’onde plus grandes, moins déviées, ne proviennent-elles que de la source : c’est pour ça que le soleil nous apparaît jaune orangé.

Quelques questions que cela soulève

De ce qui précède, quelques questions peuvent être posées.

Pourquoi le ciel n’est pas violet ?

Si la diffusion de Rayleigh diffuse d’autant plus que les longueurs d’onde sont petites, le violet devrait être encore plus diffusé que le bleu. Pourquoi le ciel n’est donc pas violet ?

Dans les faits, le violet est dévié, et bien plus encore que le bleu. L’astuce ici c’est que, bien que le violet fasse effectivement partie du spectre solaire, notre étoile émet nettement moins de violet que de bleu.

Ces très courtes longueurs d’onde ne sont pas très présentes dans la lumière Soleil. D’ailleurs, le pic dans le spectre, c’est-à-dire la longueur d’onde la plus émise dans le spectre solaire, est le vert. Il y a donc plus de vert que de bleu, que de violet, et même de rouge ou d’orange. On ne le voit cependant pas, car le mélange que l’on perçoit est globalement blanc, ou jaune, au niveau du sol.

Si le soleil était beaucoup plus chaud au point d’émettre davantage de violet que de bleu, le ciel serait bleu violacé.

D’ailleurs, les ultraviolets, dont la longueur d’onde est encore plus courte, sont tellement diffusés que les images des caméras UV sont naturellement floues à cause de ça, même pour un paysage pas trop éloigné.

Le soleil est-il jaune ou blanc ?

La lumière que le Soleil émet est blanche. On le voit très bien sur les photos prises depuis l’espace, sans les effets filtrants de l’atmosphère.

Vu du sol, le bleu est diffusé et ce qui nous provient directement du Soleil est donc du blanc, moins le bleu, donc globalement du rouge, du jaune, et du vert, ce qui fait bien du jaune.

Quid du coucher du Soleil ?

Quand le Soleil est couchant (ou levant), il se situe proche de l’horizon. La couche d’air que la lumière traverse est alors bien plus épaisse que si le soleil est à son point de culmination dans le ciel.

Dans ces conditions, même la faible déviation des longueurs d’onde que sont le vert, le jaune, le rouge finit par se voir. Le vert et le jaune sont également diffusés partout (le ciel semble plus turquoise) et seul le rouge et l’orange proviennent encore directement du Soleil dans le ciel : le Soleil couchant est alors rouge.

Soleil couchant

Sous certaines conditions, quand le ciel est particulièrement pollué (pollen, poussière, pollution, eau…), ou si l’horizon est très dégagé et loin, le rouge commence également à être diffusé de façon notable. Le ciel est dès lors entièrement rougeoyant.

Le coucher du Soleil peut par ailleurs être sujet au phénomène du rayon vert, lié à la diffusion de Rayleigh et à la diffraction, voyez mon article dédié.

Conclusion

Pour conclure, le ciel est bleu, car l’atmosphère diffuse le bleu de la lumière solaire nettement plus que les autres couleurs. Le bleu est donc comme étalé dans tout le ciel, alors que le vert, le jaune ou le rouge ne le sont pas (ou alors beaucoup moins).
Vu du sol, la lumière bleue nous arrive de partout, de tout le ciel, et le jaune/rouge nous provient seulement de l’endroit où apparaît le Soleil. Le ciel nous apparaît donc bleu et le Soleil davantage jaune que blanc.

Cette forme de diffusion, appelée diffusée de Rayleigh provient de l’interaction des rayons lumineux avec les molécules de l’air, qui absorbent la lumière, vibrent, puis la renvoient dans tous les sens.

Le ciel n’est pas le seul endroit où l’on rencontre cette forme de diffusion. L’aérogel, une mousse solide très légère, ou certaines pierres fines comme les opales présentent également une couleur bleutée caractéristique à cause de cela.

bleu couleur
https://couleur-science.eu/?d=0417f3--pourquoi-le-ciel-est-bleu

L’utilisation de Google Analytics viole le droit européen, selon l’autorité autrichienne de protection des données – EURACTIV.fr

Thu 13 Jan 2022 - 22:05

L’utilisation de Google Analytics viole le droit européen, juge l’autorité autrichienne de protection des données. L’autorité autrichienne de protection des données a décidé que l’utilisation de Google Analytics violait le règlement général sur la protection des données (RGPD). D’autres États membres de l’UE pourraient lui emboîter le pas, car les régulateurs coopèrent étroitement au sein d’une cellule spéciale du Comité européen de la protection des données.

La décision est fondée sur un certain nombre de plaintes déposées par l’ONG autrichienne noyb à la suite de l’arrêt «  Schrems II  » de la Cour de justice de l’Union européenne. La CJUE a jugé que l’accord de transfert de données entre les États-Unis et l’Union européenne, le «  Privacy Shield  », n’était pas conforme à la législation européenne sur la protection des données et a annulé l’accord en 2020, ce qui a rendu illégaux la plupart des transferts de données vers les États-Unis.

Toutefois, Google a partiellement ignoré cette décision. Au cours de la procédure, le géant de la technologie a admis que «  toutes les données collectées par Google Analytics […] sont hébergées (c’est-à-dire stockées et traitées ultérieurement) aux États-Unis  », ce qui inclut les utilisateurs européens.

Comme de nombreuses entreprises de l’UE utilisent Google Analytics, beaucoup ont transmis leurs données à Google, permettant ainsi que leurs données soient traitées aux États-Unis.

L’autorité autrichienne de protection des données vient de décider que ce comportement constitue une violation de la législation européenne.

«  Au lieu d’adapter les services pour qu’ils soient conformes au RGPD, les entreprises américaines ont essayé d’ajouter simplement un texte à leurs politiques de confidentialité et d’ignorer la Cour de justice. De nombreuses entreprises de l’UE ont suivi le mouvement au lieu de se tourner vers des options légales  », a déclaré Max Schrems, président honoraire de noyb, dans un communiqué.

«  Cela fait maintenant un an et demi que la Cour de justice l’a confirmé une deuxième fois, il est donc plus que temps que la loi soit également appliquée  », a ajouté M. Schrems.

La décision des autorités autrichiennes n’est que la première des 101 plaintes que noyb a déposées dans presque tous les pays de l’UE. L’ONG s’attend à ce que «  des décisions similaires tombent progressivement dans la plupart des États membres de l’UE  », a déclaré M. Schrems.

Mardi, le contrôleur européen de la protection des données a déjà rendu une décision similaire, soulignant que l’utilisation de Google Analytics par le Parlement européen violait le RGPD.

(Oliver Noyan | EURACTIV Allemagne)

Google Google-Analytics RGPD
https://www.euractiv.fr/section/lactu-en-capitales/news/lutilisation-de-google-analytics-viole-le-droit-europeen-selon-lautorite-autrichienne-de-protection-des-donnees/

Une boîte noire obligatoire dans les voitures neuves à partir de mai 2022

Tue 11 Jan 2022 - 08:33

A partir de mai 2022, les voitures neuves devront être équipées d'une boîte noire enregistrant les paramètres de conduite. Les données collectées seront anonymes mais pourront servir à la police en cas d'accident.

"Big Brother is watching your car !" Non, il ne s'agit pas de la suite automobile de 1984 de Georges Orwell mais bien d'une nouvelle loi européenne visant à rendre obligatoire de nombreux équipements sur les voitures neuves dès mai 2022 (mai 2024 pour les véhicules neufs homologués avant juillet 2022.). Parmi eux, la tant décriée boîte noire, autrement dit un enregistreur de données capable de récolter les paramètres de conduite.

Voté en 2019 par les élus européens et le Conseil européen des ministres, ce règlement précise que le boîtier enregistrera par tranches de cinq secondes, avant et après un accident, de nombreuses données telles que la vitesse, l'accélération, le freinage, l'angle du volant, le port de la ceinture, la force de la collision ou encore les coordonnées GPS de l'accident. En revanche, contrairement aux boîtes noires installées dans les avions, les conversations dans l'habitacle ne seront pas enregistrées et les données resteront anonymes.
Un éthylomètre antidémarrage

Pour éviter le piratage, l'enregistreur sera positionné à un endroit inaccessible pour le propriétaire et il sera impossible de le désactiver. D'autres équipements seront également rendus obligatoires comme un détecteur de somnolence ou un limiteur de vitesse intelligent capable de lire les panneaux.

Enfin, les voitures devront pouvoir faciliter l'installation d'un éthylomètre antidémarrage ainsi qu'un système de surveillance de la pression des pneumatiques. Bref, autant de nouvelles technologies qui risquent de faire grimper encore plus la facture.

auto surveillance
https://www.turbo.fr/actualite-automobile/une-boite-noire-obligatoire-dans-les-voitures-neuves-partir-de-mai-2022-178941

La justice algorithmique s’installe en France

Tue 11 Jan 2022 - 08:32

Le Conseil d'État vient de valider le système informatique d’aide à la décision, DataJust, permettant aux tribunaux d’établir les indemnisations auxquelles ont droit les victimes de préjudices corporels. Les associations de défense des libertés fondamentales dénoncent l'utilisation des données personnelles sans le consentement préalable des justiciables.

L’objectif du programme DataJust est d’apporter une assistance aux magistrats pour évaluer, par exemple, les montants des indemnisations auxquelles peuvent prétendre les victimes d’agression physique ou d’accident de la route. Le lancement de cette expérimentation qui a été annoncée par décret le 27 mars 2020, « vise à développer un algorithme, chargé d’extraire de manière automatique et d’exploiter les données contenues dans les décisions de justice portant sur l’indemnisation des préjudices corporels » précisait alors le ministère de la Justice sur son site.

Pour « s’entraîner » ce système qui est basé sur des programmes d’intelligence artificielle puise dans un fichier contenant des milliers de données sensibles. Parmi celles ci, les noms, prénoms des victimes ainsi que des informations liées à de potentielles blessures, des expertises médicales, mais aussi leur situation professionnelle ou financière. Si la plupart de ces informations ont été rendues anonymes, certains éléments d’identification comme la date de naissance ou encore les éventuels liens de parenté entre les victimes et leurs proches figurent en clair dans la base de données.

Les associations de défense des libertés fondamentales mobilisées

Cette méthode de traitement informatique contreviendrait au RGPD, le dispositif européen de protection des données personnelles et à la loi Informatique et libertés, selon plusieurs avocats. Même constat du côté des associations. « L’État s’affranchit avec cette expérimentation de justice algorithmique, des lois qui protègent les données personnelles et la vie privée », estime Bastien Le Querrec, juriste et membre du groupe contentieux à la Quadrature du Net, l’association de défense des libertés fondamentales dans les environnements numériques.

« Cette méthodologie qui consiste à apposer une étiquette d’expérimentation pour s’autoriser à aller piocher encore plus d’informations à caractère personnel, nous dérange. À chaque fois, on décrète que c’est expérimental, ne vous inquiétez pas, nous allons vérifier si le résultat proposé par l’algorithme est proportionné, alors qu’en réalité on joue à l’apprenti sorcier. Cette croyance qu’un algorithme peut prendre de meilleures décisions qu’un être humain se généralise, nous l’observons dans le secteur de la police, maintenant celui de la justice, en matière de contrôle social dans les systèmes de la Caisse d’allocations familiales… nous constatons que ces algorithmes s’immiscent de plus en plus dans la vie quotidienne des citoyennes et des citoyens et c’est vraiment un choix de société. À la Quadrature du Net, nous essayons de lutter contre les biais qu’engendrent ces programmes automatiques, parce que la technologie parfois peut amener à des dérives, comme c’est le cas aujourd’hui avec le dispositif DataJust », regrette Bastien Le Querrec.

L’algorithme DataJust validé par la plus haute juridiction

Le Conseil d'État saisi par la Quadrature du Net indique dans ses conclusions que ce projet étant d’intérêt public, alors le consentement des personnes figurants dans le fichier n’est pas nécessaire pour procéder au traitement de leurs données personnelles. Le dispositif DataJust dont l’efficacité n’a pas encore été dévoilé devrait être opérationnel fin mars 2022, prévoit le ministère de la Justice.

IA justice robot
https://www.rfi.fr/fr/technologies/20220106-la-justice-algorithmique-s-installe-en-france

Thousands of websites taken offline in Brexit domain name change – POLITICO

Tue 11 Jan 2022 - 08:26

Around 48,000 internet domain names belonging to U.K. citizens and organizations — including pro-Brexit site Leave.eu — have been indefinitely taken offline from Monday, following the revocation of their .eu domain names by the agency in charge of registrations.

The move marks the final step in an ongoing process since the U.K. withdrew from the EU on January 31, 2020.

U.K.-based owners of .eu domains were told that they needed to prove eligibility for an EU domain; otherwise, they would risk suspension, meaning their domains would be unable to support website-hosting or email functionality.

To register a .eu domain, individuals must be either citizens or residents of the bloc, and organizations should be established within the EU.

More than 80,000 websites had been hit with a "suspended" status, following the end of the Brexit transition period on December 31, 2020. By July of last year, those that failed to prove eligibility were placed into a "withdrawn" status until Monday, when their .eu domains were revoked indefinitely.

“Over the past 12 months our staff has been working tirelessly to support the holders of these domain names and follow up on the numerous requests to reinstate a domain name into the registered status as soon as the eligibility criteria were met,” an EURid spokesman said on Monday.

Those in possession of European Union residency or citizenship will be able to immediately re-register the .eu domains revoked as of Monday.

A spokesperson from EURid, the EU’s domain registry manager, said that the 48,000 domain names would “become available for general registration on a first come, first serve[d] basis” in batches throughout Monday.
Leave.eu could be back in EU hands

One case that caught the headlines last year was the domain Leave.eu — registered to the organization of the same name, which had been spearheaded by former Brexiteer MEP Nigel Farage and bankrolled by erstwhile UKIP funder Arron Banks.

Ahead of the Brexit withdrawal date, the organization migrated its registrant address to a location in Waterford, Ireland, in an attempt to prove eligibility for a .eu domain.

However, following an investigation by EURid, the domain was issued with a "withdrawn" status, because the domain holder failed to respond to data verification requests, EURid said on Monday.

As of Monday, the Leave.eu domain name will become available for re-registration by an EU citizen or resident.

Brexit domaine
https://www.politico.eu/article/thousand-website-taken-offline-brexit-domain-name-change/

En Espagne, l’autonomie énergétique progresse à pas de géant

Tue 11 Jan 2022 - 07:54

L’autoconsommation en électricité solaire se développe à grande vitesse en Espagne. Les cinq entreprises qui contrôlent le marché de l’électricité ont longtemps cherché à freiner ce mouvement. Elles changent de stratégie et tentent maintenant d’en prendre le contrôle.

« Si tu ne peux le combattre, embrasse ton ennemi. C’est un peu la réaction des grandes sociétés électriques en Espagne », ironise Laura Feijóo, responsable énergie citoyenne chez Ecooo. En plein cœur de Madrid, cette petite « entreprise à but non lucratif » installe des panneaux solaires sur les toits pour que les habitants produisent et consomment leur propre énergie. Elle vit des années fastes depuis 2018. Depuis la suppression de « l’impôt sur le soleil », qu’on disait instauré par et pour les grandes sociétés de production d’électricité — qui règnent en maître sur ce juteux marché — afin d’empêcher le développement de l’autoconsommation d’énergie, les temps ont changé. La pratique est en plein essor et le gouvernement doit bientôt adopter un plan pour renforcer cette dynamique. Mais les « grandes électriques » n’ont pas dit leur dernier mot.

« En 2017, nous n’avions qu’une centaine de bâtiments en autoconsommation, après douze ans d’existence, se souvient Héctor Pastor, assis devant son poste de travail dans le quartier général d’Ecooo. Aujourd’hui, nous en avons près de 500. La demande a explosé après le confinement. » En 2014, 22 mégawatts (MW) de capacités de production solaire avaient été installés en autoconsommation dans tout le pays. En 2021, le chiffre a atteint 714 MW juste pour les sept premiers mois de l’année.

Sur son écran, Héctor fait défiler des graphiques comparant la consommation totale des bâtiments équipés par Ecooo à l’électricité que produisent leurs panneaux solaires respectifs. Ces derniers couvrent 30 à 50 % des besoins en moyenne. Les plaques photovoltaïques ne peuvent combler la totalité de ces besoins, notamment quand le soleil ne brille pas. Le réseau conventionnel prend alors le relais. À l’inverse, aux heures où l’astre du jour donne plus d’énergie que le bâtiment n’en consomme, l’électricité excédentaire est versée dans le réseau général, et l’usager qui l’a produite est rétribué pour cela.

« Un jour, il n’y aura pas un toit sans panneau solaire »

Outre ses bienfaits environnementaux, ce système entraîne une baisse substantielle de la facture. Il est déjà très demandé pour les propriétés individuelles. Et Ecooo passe désormais aux choses sérieuses : les immeubles. Près des deux tiers des Espagnols vivent en appartement. « Un jour, il n’y aura pas un toit sans panneau solaire dessus », répète Laura Feijóo, comme un mantra. Son rêve ? Voir émerger de petits réseaux de producteurs-consommateurs, locaux et décentralisés, dont le but ne soit pas de faire de l’argent, mais simplement d’approvisionner ses usagers. L’entreprise à but non lucratif équipe ses clients de panneaux solaires prêts à fonctionner, et tente de faire prendre conscience aux citoyens du potentiel de transformation sociale que représente l’autoconsommation.

Il y a des raisons d’espérer. Depuis son arrivée au pouvoir en 2018, la coalition réunissant le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) et la formation de gauche radicale Podemos s’est employée à lever les obstacles à cette pratique. Aujourd’hui, le gouvernement s’apprête à adopter une « feuille de route de l’autoconsommation », avec trente-sept mesures pour encourager son développement. Adossées au plan de relance économique post-Covid, elles mobiliseront environ 1,5 milliard d’euros sur cet objectif, selon le ministère de la Transition écologique.

La feuille de route compte « mettre le citoyen au centre du système énergétique » et permettre plus « d’indépendance au consommateur face au secteur énergétique traditionnel », comme le demande l’Union européenne. Le document insiste aussi sur le rôle clé des réseaux informels de citoyens, et surtout des « communautés d’énergies renouvelables », autonomes, contrôlées par leurs adhérents et dont « la finalité sera de fournir des bénéfices environnementaux, économiques ou sociaux pour leurs membres [...] au lieu de [générer] des gains financiers ».

L’émergence de petits réseaux décentralisés pourrait aussi renverser la table sur un marché détenu à 65 % par trois acteurs en 2019 : Endesa (32 %), Iberdrola (24 %) et Naturgy (9 %). En tout, cinq entreprises contrôlent près des trois quarts de la production, distribution et commercialisation d’électricité en Espagne. Elles sont réunies dans l’association Aelēc, pour défendre leurs intérêts, avant que Naturgy ne déserte cette année.

Le gouvernement table sur l’installation de 9 à 14 gigawatts (GW) de capacités de production en autoconsommation d’ici 2030. Cela représente au moins un quart des 39 GW de l’ensemble des capacités de production solaire que l’Espagne compte installer pour cette date, soit entre 5,6 et 8,7 % de la production électrique totale à la fin de la décennie. L’actuel gouvernement projette d’atteindre 100 % d’énergie renouvelable en 2050, soit trois fois plus qu’en 2030, et le soleil est sa meilleure option. Autant dire que l’autoconsommation devrait bientôt peser très lourd.

Un puissant lobbying

« Les grandes électriques ne vont pas laisser n’importe qui se mettre dans ce business. Elles essaieront de capter une quantité très importante de ces petites installations en donnant certaines garanties à leurs clients », anticipe Eduardo Collado. Ancien cadre d’Endesa, ex-directeur des opérations de l’Union espagnole du photovoltaïque et ancien président de l’Association de l’industrie photovoltaïque, il est professeur du master en énergies renouvelables de l’université internationale de Valence. « Ces entreprises ne veulent pas perdre de parts de marché. Aujourd’hui, elles sont toutes en faveur des énergies renouvelables. Ce n’était pas le cas il y a quelques années. »

« L’autoconsommation ne s’est pas développée comme elle aurait pu en Espagne, en grande partie en raison d’obstacles notamment politiques, impulsés par des grandes électriques », affirme Juan López de Uralde, député de Podemos et président de la commission parlementaire Transition écologique.

En 2015, un décret royal avait établi une série de règles rendant l’autoconsommation individuelle compliquée et l’autoconsommation collective presque impossible. La mesure la plus décriée demandait à tout usager qui versait de l’énergie dans le réseau de payer une taxe, baptisée « impôt sur le soleil » dans le langage courant. Mais le gouvernement annonçait déjà l’entrée en vigueur de cette norme depuis deux ans, ce qui avait largement refroidi les candidats à l’installation de plaques solaires, un investissement long à amortir.

« La première fois qu’on a entendu parler de “l’impôt sur le soleil”, c’était dans un document qu’Iberdrola devait présenter à ses actionnaires, avec un nom très redondant. Le même concept, avec le même nom, se retrouve dans le décret royal », raconte Laura Feijóo pour expliquer le soupçon, largement partagé, selon lequel cette norme vient des électriques. Selon Juan López de Uralde, ces entreprises exercent un puissant lobbying au Parlement : « De hauts cadres politiques du Congrès des députés vont souvent travailler dans les conseils d’administration des grandes électriques à la fin de leur carrière. En Espagne, nous avons un long historique, qui inclut deux anciens présidents : Felipe González (PSOE, pour Naturgy) et José María Aznar (PP, pour Endesa). »

Une OPA sur l’autoconsommation

Depuis, les temps ont changé. « Le passage à l’autoconsommation est inévitable, nous allons donc parier dessus, être aux côtés de nos clients pour trouver les meilleures solutions, les meilleurs équipements, les meilleurs installateurs aux meilleurs tarifs... leur offrir une solution complète pour qu’ils le fassent avec nous, et qu’ils se connectent au réseau à travers nous », explique dans un grand titre de presse économique Alejandro Sánchez, responsable produits solaires chez Endesa, dans un podcast sponsorisé par l’entreprise. Assurance tous risques gratuite pendant dix ans, panneaux solaires garantis jusqu’à douze ans. Même les subventions publiques sont un argument de vente : « Jusqu’à 40 % d’économie sur l’installation [en sollicitant la subvention] », assure le site web de l’entreprise. Le tout est assorti d’une offre maison pour relier le client au réseau, avec la promesse d’économiser jusque 40 % aux heures où le soleil ne brille plus.

« Les grandes électriques jouent avec un avantage : elles contrôlent le réseau et la commercialisation, et mettent tous les obstacles possibles à l’entrée de nouveaux acteurs », dénonce María Prado, responsable des campagnes énergie citoyenne de Greenpeace Espagne. Malgré leur changement d’attitude publique, le club des cinq influencerait toujours le législateur pour réduire la portée de ses réformes. « Nos intérêts et les leurs sont très distincts. Avec la démocratisation de l’énergie, les gens s’impliquent, ils comprennent les enjeux et peuvent participer aux décisions de politiques énergétiques, faire des économies, gagner en efficience, être plus solidaires avec la planète. L’oligopole va parier sur le contraire : plus de consommation, et l’opacité pour garder le contrôle. »

énergie-solaire
https://reporterre.net/En-Espagne-l-autonomie-energetique-progresse-a-pas-de-geant

Les îles Anglo-Normandes, ces morceaux de France «ramassés par l'Angleterre» - Slate

Mon 10 Jan 2022 - 12:17

La géographie les rattache à la Normandie mais l'histoire les relie à la reine. Cette discrète présence anglaise en Normandie fut longtemps paisible. Du moins, jusqu'au Brexit...

Vue aérienne de l'île de Guernesey-EmmaLeP via Flickr Vue aérienne de l'île de Guernesey-EmmaLeP via Flickr

Des pêcheurs français qui bloquent un port de Jersey; les navires de guerre britanniques qui patrouillent pour réaffirmer leur bon droit dans ces eaux; des menaces françaises de couper l'alimentation électrique des îles Anglo-Normandes. Pas de doute, le Brexit a électrisé la Manche et ce pacifique archipel devient un peu l'équivalent de Gibraltar pour l'Espagne: une pomme de discorde diplomatique. Les îles en soit ne soulèvent aucun différend. Ce sont ses eaux territoriales poissonneuses qui exacerbent les tensions entre les pêcheurs français et cet archipel de la Manche avec lequel la France voisinait jusque-là paisiblement.

Elizabeth II, «duc» de Normandie

Ces îles sont un vestige des origines normandes de la monarchie anglaise. Les bailliages de Jersey et Guernesey possèdent chacun leur gouvernement et reconnaissent la reine comme souveraine. Elizabeth II n'est pas seulement reine de quinze États et présidente du Commonwealth, elle porte également le titre de «duc» de Normandie. «C'est peu connu car elle n'en fait pas étalage pour des raisons diplomatiques évidentes», constate l'historien Christophe Maneuvrier, enseignant-chercheur à l'université de Caen.

Cet héritage remonte à Guillaume le Conquérant qui traversa la Manche en 1066 pour ajouter la couronne d'Angleterre à son titre de duc de Normandie. Normandie et Angleterre partagèrent un siècle et demi de destin commun. Jusqu'en 1204, lorsque le roi de France Philippe Auguste incorpora l'ancienne province viking à son domaine royal. Toute la Normandie fut occupée. Toute? Non! Un archipel au large du Cotentin demeura encore et toujours rattaché à son duc, c'est-à-dire au roi d'Angleterre.

Par la suite, la France tenta bien, à plusieurs reprises, de débarquer sur ces îles Anglo-Normandes. Las, les expéditions se fracassaient sur la protection naturelle que confère son insularité. Des récifs et des bas-fonds dans la Manche, une mer que Victor Hugo qualifiera d'«insoumise», où il faut se défier des «coups de théâtre de l'océan». «Si vous n'êtes pas un ancien pilote et un vieil habitué», gare à vous, «c'est fini, le navire se disloque et sombre», avertissait l'écrivain alors exilé sur ces îles, dans Les travailleurs de la mer.

Un archipel longtemps peu stratégique

Côté français, arracher ces îles normandes au roi d'Angleterre ne tourna guère à l'obsession. Aux XIVe et XVe siècle, il y eut bien quelques incursions françaises au cours de la guerre de Cent Ans, mais rien de très durable. Jersey et Guernesey ne possédaient aucune richesse susceptible d'attiser les convoitises. «Et l'enjeu stratégique des îles était quasi nul puisque les grandes routes maritimes passaient plus au nord», analyse Christophe Maneuvrier. Même Napoléon, le grand ennemi de l'Angleterre, ne fut pas tenté de faire main basse sur elles.

«Il n'y avait pas d'intérêt à envoyer une grande armée pour envahir trois cailloux, d'autant que sa marine était mal en point après Trafalgar», ajoute l'historien. Les seuls à avoir récemment conquis l'archipel de la Manche furent les Allemands en 1940. Ils prévenaient ainsi un débarquement allié vers le Cotentin, mais leur objectif n'était pas que militaire.

Symboliquement aussi, ils envahissaient un archipel lié à une Angleterre résistant farouchement à Hitler. L'occupation fut d'ailleurs éprouvante et s'éternisa bien au-delà du Débarquement en Normandie puisque sa libération n'aboutit qu'après la capitulation allemande du 8 mai 1945. Entretemps, les troupes de Sa Majesté n'avaient rien tenté pour les récupérer. Prouvant une nouvelle fois leur faible intérêt stratégique.

«Les milieux populaires ont parlé français jusqu'à la Seconde Guerre mondiale.» Christophe Maneuvrier, historien

L'archipel n'a pivoté vers les îles britanniques que récemment. Longtemps tournées vers le continent, les îles ont attiré sur leur sol les huguenots, indésirables en France après la révocation de l'édit de Nantes (1685), et des prêtres réfractaires fuyant la Révolution. Quand Victor Hugo y a séjourné, il fut marqué par la proximité culturelle de ces îles avec la France. Dans Les Travailleurs de la mer, il écrit «les îles de la Manche sont des morceaux de France tombés dans la mer et ramassés par l'Angleterre». Il remarque que «les fleurs de lys abondent» et qu'«en fait de mode, Guernesey copie Paris». L'écrivain note aussi que «l'archipel normand parle français, avec quelques variantes […] Paroisse se prononce paresse». Hugo respecte ce «patois», «une vraie langue, point méprisable du tout». Il popularise un normandisme qu'il découvre sur place: la pieuvre. Le succès du mot fut tel qu'il s'est partiellement substitué au poulpe du français standard.

La société insulaire que découvrit Hugo était bilingue, avec des journaux anglais qui cohabitaient avec la presse en français. «Les élites partaient étudier en Angleterre mais les milieux populaires ont parlé français jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, rappelle Christophe Maneuvrier. Aujourd'hui, ce français y est presque moribond… Même s'ils n'aimeraient pas que je dise cela!» En effet, si les Anglo-Normands ont basculé en anglais, ils restent profondément attachés à leur identité normande. À leurs bailliages, à leur droit coutumier et à leur toponymie française. Pareil pour les patronymes: un francophone ne sera pas dépaysé par un ministre en chef à Jersey dénommé John Le Fondré ou un ministre à Guernesey qui se nomme Jonathan Le Tocq.

Des dizaines d'années de rapprochement

Longtemps négligé, presque oublié par les conquérants français, l'archipel est aujourd'hui riche et stratégique dans le jeu diplomatique. Cela fait belle lurette que Jersey, Guernesey, Sark, Herm ou Aurigny ne sont plus revendiqués par Paris mais la Normandie continentale tente de se rapprocher de ces îles, qui sont anglophones mais dont les habitants se considèrent comme Normands.

«Le bailli vient très fréquemment à Caen, le président de la région Normandie se rend aussi dans les îles, souligne Christophe Maneuvrier. Il y a une convention universitaire entre l'État de Jersey et l'université de Normandie à Caen pour accueillir des étudiants. Le Brexit qui nous est tombé dessus vient donc à rebours de dizaines d'années de rapprochement!» Et la crise sanitaire, qui a raréfié depuis près de deux ans les communications maritimes avec le continent, n'a rien arrangé…

anglo-normandes Normandie
http://www.slate.fr/story/221355/iles-anglo-normandes-anglaises-jersey-guernesey-reine-angleterre-diplomatie

État civil et généalogie - Quelques repères historiques - Blog de Geneafinder

Sat 8 Jan 2022 - 17:43

Ancien Régime

Août 1539 : Ordonnance de Villers-Cotterêts
Cette ordonnance royale, décrétée par François Ier, impose aux prêtres de tenir des registres des baptêmes dans toutes les paroisses du royaume. Elle fait aussi du français la langue officielle en France.

Mai 1579 : Ordonnance de Blois
Désormais, les mariages et les sépultures doivent eux aussi être inscrits dans les registres paroissiaux par les prêtres. Cette même ordonnance instaure l’obligation de consentement des parents des mariés et la célébration du mariage devant quatre témoins.

Avril 1667 : Ordonnance de Saint Germain en Laye
Cette ordonnance promulguée par Louis XIV exige la tenue des registres paroissiaux en double en cas de destruction d’un dossier. Chaque copie doit être déposée aux greffes des sénéchaussées. Elle implique également que les parrains et marraines doivent signer les actes de baptême, que les mariés et leurs témoins doivent signer leur acte de mariage et que les parents ou amis du défunt doivent signer les actes de sépulture.

Avril 1736 : Ordonnance du Chancelier d’Aguesseau
Celle-ci prescrit l'obligation de la tenue de deux registres originaux identiques et non plus d’une simple copie comme en 1667.

Après la Révolution

Septembre 1792 : Institution de l’état civil laïc et obligatoire

Selon l’article 7 du titre II de la Constitution du 3 septembre 1791 : « Le pouvoir législatif établira pour tous les habitants, sans distinction, le mode par lequel les naissances, les mariages et les décès seront constatés ; et il désignera les officiers publics qui en recevront et conserveront les actes ». Les registres de BMS (baptême, mariage et sépulture) sont donc remplacés par les registres de NMD (naissance, mariage et décès). Les mairies sont également tenues de rédiger des tables décennales.

Mars 1877 : Circulaire de Jules Simon
Suite à la destruction totale de l’état civl parisien en 1871, la circulaire de Jules Simon, adressée à tous les préfets, permet la création du livret de famille sur tout le territoire français. Distribué gratuitement aux époux lors de la célébration du mariage, y seront recensés tous les actes de naissance et décès de la famille nucléaire.

De 1804 jusqu’à 1985 : Ajout progressif de mentions marginales
Les mentions marginales sont des notes ajoutées à côté de l’acte de naissance, de mariage ou de décès d’une personne. Celles sur l’acte de naissance concernent depuis 1804 la reconnaissance d’un enfant naturel, le mariage depuis 1897, le décès depuis 1945, entre autres ; sur l’acte de mariage le divorce depuis 1886 (entre autres également) ; et sur l’acte de décès, la mention « mort pour la France » depuis 1915 ou « mort en déportation » depuis 1985.

Généalogie état-civil
https://geneafinder.com/blog?id=13:284

Les origines de la généalogie -Blog de Geneafinder

Sat 8 Jan 2022 - 17:37

Alors que plus de 7 Français sur 10 disent s’intéresser à leurs racines et que beaucoup essaient de remonter jusqu’aux origines de leur arbre généalogique, vous êtes-vous déjà demandé quelles étaient les origines de la généalogie .
Le Larousse définit la généalogie comme la « science qui a pour objets la recherche de l’origine et l’étude de la composition des familles ». Cela a-t-il toujours été le cas ?

La généalogie pour légitimer les religions et les peuples

Parce que la généalogie est une des sciences les plus anciennes et présente dans de nombreuses cultures, son origine est indissociable des religions et des premiers Dieux.

L’œuvre « La Théogonie » du poète grec Hésiode, qui livre un récit sur l’origine des dieux, est pour certains considérée comme l’une des œuvres fondatrices de la généalogie. Au même titre que l’Iliade et l’Odyssée qui rapportent les liens de parenté des familles de dieux et humains mortels et qui fondent la mythologie grecque.

Aussi, Confucius, né le 28 septembre 551 av. J.-C., sera le point de départ d’une généalogie descendante comptant plus de 80 générations et 2 millions de personnes. Cet arbre est aujourd’hui reconnu comme le plus grand arbre généalogique du monde.

Plus tard, c’est la Bible qui dans le Livre de la Genèse tend à prouver le lien de parenté entre les élus de Dieux et Adam. On y retrouve également une liste des descendants de Noé avec la Table des peuples ainsi que la parenté entre Jésus et le roi David au sein de l’arbre de Jessé, une œuvre reconnue comme étant l’une des premières représentations d’arbre généalogique avec des branches et un tronc.

On retrouve ce principe de liste de parentés dans de nombreuses civilisations, comme chez les Vikings, les Égyptiens (avec la liste d’Abydos - une gravure comptant les 76 rois prédécesseurs de Séthi Ier), les Romains (qui gardaient des traces des filiations dans chaque clans familiaux) ou encore les Arabes qui cherchaient à établir un lien avec le prophète Mahomet.

L’idée principale de ces généalogies résidait surtout dans l’objectif de légitimer une religion, un divin, un chef, voire même un peuple.

Au Moyen Âge, l’Église chrétienne répand un nouveau genre de généalogie, la généalogie hagiographique, ou le récit des vies des saints. Ainsi, les clercs rapprochaient les saints des rois pour assurer leur influence. A cette époque, l’Arbre de Jessé est toujours utilisé pour représenter les relations familiales. L’étude des liens de famille est d’autant plus importante que le droit canon chrétien interdit le mariage entre personnes du même sang, ainsi sont nés les premiers registres de baptêmes, mariages (et des dispenses de consanguinité) et sépultures.

La généalogie pour les nobles

Pendant de longues années la généalogie était surtout utile pour garantir aux nobles une « noblesse de sang » et ainsi leur droit à bénéficier de privilèges. Alors que les titres de noblesse étaient vérifiés lors des réformations de la noblesse, ils se devaient de démontrer les titres de leurs ancêtres sur plusieurs générations pour échapper à l’amende. En 1595 sera d’ailleurs créée la charge de Généalogiste des ordres du roi qui regroupe des experts chargés d’authentifier les généalogies nobles. Autre intérêt à justifier d’une lignée noble : la transmission héréditaire des titres et des privilèges fiscaux. Cet intérêt vaudra par ailleurs à la généalogie d’être qualifiée de « science occupée de flatter les vanités et de conserver un ordre social périmé, héritage haïssable des siècles d’obscurantisme » par les encyclopédistes du siècle des Lumières.

A cette même époque, Pierre d’Hozier, un marseillais d’origine, devient juge d’armes de France - comprenez - commis royal chargé de certifier la noblesse. Comme un titre de noblesse d’ailleurs, il transmettra ce rôle à ses descendants. Généalogiste français, il est considéré comme l’un de ceux qui ont fait de la généalogie une science. Il a, de par sa charge et entre autres, rédigé la Généalogie des principales familles de France (en 150 volumes !).

Mais à la Révolution française le ton change et la généalogie est un peu plus discréditée puisque sont donnés des titres de noblesse à quiconque pouvant les acheter. Cette science tombe plus ou moins dans l’oubli tandis qu’en parallèle les registres d’Etat civil sont de plus en plus rigoureux et accessibles. Il faudra attendre la fin du XIXe siècle pour que la généalogie soit de nouveau pratiquée, mais par les populations les plus bourgeoises, toujours.

La généalogie individuelle et locale

Désormais et depuis la moitié du XXe siècle la généalogie est un loisir qui se démocratise, une passion pour beaucoup même. On la pratique pour le plaisir de l’enquête, pour l’Histoire, pour mieux (se) comprendre ou encore pour les nombreuses découvertes qu’il y a à faire. Que l’on soit un généalogiste enquêteur, un généalogiste collectionneur, un généalogiste amateur ou professionnel, la quête de ses racines familiales et remplir son arbre généalogique sont aujourd’hui des activités accessibles à tous.

Notez que la religion est toujours présente dans la généalogie de nos jours. C’est par exemple le cas pour les Mormons (Family Search) qui baptisent leurs morts et qui ont, de ce fait, entamé depuis quelques dizaines d’années la numérisation et la compilation des archives mondiales. Des archives disponibles pour beaucoup en ligne.

Aujourd’hui les ressources à notre disposition sont nombreuses et accessibles sur Internet, ce qui facilite grandement les recherches des généalogistes. Les associations de généalogie y jouent un rôle important puisqu’elles mettent à disposition des registres (indexés souvent) et d’autres revues sur l’histoire locale - de quoi avancer un peu plus dans la découverte du quotidien de nos ancêtres.

Et vous, pourquoi vous intéressez-vous à la généalogie ?

Généalogie histoire
https://geneafinder.com/blog?id=13:282

Les enfants sans vie peuvent avoir un nom de famille | La Revue française de Généalogie

Fri 10 Dec 2021 - 11:43

Depuis le 6 décembre 2021, une nouvelle possibilité est offerte aux parents d'enfants nés sans vie : leur donner un nom et un (des) prénom(s), alors qu'auparavant, ces enfants ne pouvaient pas légalement apparaître à l'état civil. Portée par le milieu associatif et soutenue par les parlementaires sans difficulté aussi bien au Sénat le 10 juin 2021, qu'à l'Assemblée nationale le 26 novembre 2021, cette loi vient donc d'être promulguée.

Ce texte vise à donner un nom de famille aux enfants nés sans vie pour accompagner le deuil des parents, sans pour autant accorder de droits supplémentaires, afin d'écarter expressément tout éventuel effet, notamment en matière de filiation et de succession. Il n'est donc pas fait mention d'un « état civil » dont l'enfant sans vie est dépourvu, n'ayant pas de personnalité juridique. Logiquement pour ces enfants nés sans vie, la loi n'a prévu l'établissement que d'un seul acte, celui du décès.

Un article unique vient donc modifier l'article 79-1 du code civil et insère deux phrases ainsi rédigées : « Peuvent également y figurer, à la demande des père et mère, le ou les prénoms de l'enfant ainsi qu'un nom qui peut être soit le nom du père, soit le nom de la mère, soit leurs deux noms accolés dans l'ordre choisi par eux dans la limite d'un nom de famille pour chacun d'eux. Cette inscription de prénoms et nom n'emporte aucun effet juridique. »

état-civil
https://www.rfgenealogie.com/infos/les-enfants-sans-vie-peuvent-avoir-un-nom-de-famille

Y comme... Ya des cousins acadiens partout! - Traces et Petits Cailloux

Mon 29 Nov 2021 - 06:39

Très prolifiques et résilients face à l'adversité, les pionniers acadiens ont aujourd'hui une très vaste descendance : nous serions environ 3 millions, parmi lesquels de nombreuses personnes connues...

J'ai déjà évoqué Matt LEBLANC. Je me contenterai de quelques autres exemples.

En 1785, l'un des Acadiens passés par la Virginie, l'Angleterre, Morlaix et Belle-Isle, Joachim TRAHAN, tout juste veuf de Marie DUON, embarque à Nantes avec ses quatre enfants sur le Saint Rémi qui part pour la Louisiane. Il s'installe à Saint Martinville, et son fils Auguste, âgé de 7 ans quand il quitte la France, va s'y marier en 1793, et mourra à 33 ans, sans savoir qu'une de ses futures petites-filles, Marie Virginie TRAHAN, connaîtra une vie incroyable, épousant tout d'abord Claude Vincent de TERNANT, héritier d'une plantation près du Mississipi. A la mort de son mari, elle se remarie avec le colonel Charles PARLANGE, qui donnera son nom à ladite plantation, puis, devenue de nouveau veuve, elle défendra grâce à son charme et sa diplomatie sa terre et sa demeure pendant la guerre de Sécession.Cette plantation existe toujours et est tenue aujourd'hui par les descendants de Marie-Virginie, qui deviendra dans les années 70 l'une des héroïnes de la série de romans de Maurice Denuzière intitulée Louisiane - Fausse-Rivière - Bagatelle, sous le nom de Virginie TREGAN.

Une petite-fille de Marie Virginie, Virginie Amélie AVEGNO GAUTREAU, née en 1859 à La Nouvelle Orléans, deviendra une personnalité bien connue du Tout-Paris de la fin 19°-début 20°. Son portrait, exécuté par John Singer Sargent et intitulé Portrait de Madame X, est aujourd'hui exposé au Metropolitan Museum of Art in New York City. Elle est également un personnage des romans de Denuzière.

Virginie TRAHAN et Virginie AVEGNO, devenues héroïnes de romans, inattendues descendantes du maréchal de tranchant de Bourgueil, du passementier transfuge, et de l'un des malheureux déportés errants de Virginie en Angleterre, partis plein d'espoir de Belle-Isle-en-Mer pour se créer une nouvelle vie en Louisiane...

Dans un tout autre genre, le lexicographe Paul ROBERT, l'auteur du fameux dictionnaire, oui oui!, avait des origines acadiennes par sa branche maternelle, et nous partageons nos ancêtres BOUDROT, BOURG, LANDRY, BOURGEOIS...

Mais on retrouve également Jean CHRETIEN, premier ministre du Canada de 1993 à 2003, Pierre Elliott TRUDEAU, également ancien premier ministre du Canada, et logiquement le fils de celui-ci, Justin TRUDEAU, premier ministre actuel (depuis 2005).

Justin TRUDEAU était d'ailleurs présent au Tintamarre de 2019 à Dieppe, au Nouveau Brunswick. Le Tintamarre est une manifestation de la fierté acadienne qui a lieu le 15 août (date de la fête "nationale" acadienne) : il s'agit d'un défilé aux couleurs de l'Acadie dans lequel on fait le plus de bruit possible pour rappeler au monde la présence et la vitalité des Acadiens.

Et enfin, peut-être la "cousine" la plus inattendue : Beyoncé !

En effet, Gisèle BEYONCE est l'arrière-petite-fille d'Odilia BROUSSARD (patronyme bien acadien), elle-même arrière-petite-fille de Marie-Françoise TRAHAN, née à ... Belle Isle en Mer, paroisse de Bangor, le 17 janvier 1774!!!

Et Marie Françoise était l'une des filles de Pierre TRAHAN et Marguerite DUON, Marguerite elle-même nièce de "mon" Cyprien... Quant à Pierre, je n'ai pas creusé le détail, mais c'est forcément un descendant de "'mon" Guillaume...

Pierre et Marguerite, mariés le 9 mai 1758 à Liverpool puis installés à Belle Isle, embarquèrent en 1785 avec leurs enfants - dont la petite Marie Françoise âgée de 11 ans et demi - en direction de la Louisiane sur Le Saint Rémi, et arrivèrent à la Nouvelle Orléans le 10 septembre. (Sur le bateau se trouvait également Joachim TRAHAN, cité plus haut, l'arrière grand-père de la future propriétaire de la Plantation Parlange).

En tout cas, connu ou inconnu, pour l'instant je n'ai trouvé aucun descendant d'Acadien avec lequel je ne cousine pas (lointainement) d'une façon ou d'une autre.

Acadie
https://tracesetpetitscailloux.over-blog.com/2021/11/y-comme.ya-des-cousins-acadiens-partout.html

«iel», ma grammaire! | Slate.fr

Thu 25 Nov 2021 - 18:24

Par Laurent Sagalovitsch

Si l'idée d'imposer un nouveau pronom censé représenter le genre neutre n'est pas mauvaise en soi, son application pose trop de problèmes pour emporter l'adhésion.

J'avoue. Avant que Le Petit Robert ne décide d'officialiser dans son dictionnaire en ligne l'emploi du pronom «iel», j'ignorais jusqu'à son existence. Non seulement je ne l'avais jamais entendu autour de moi mais tout au long de mes lectures qui sont tout de mêmes multiples et variées, à aucun moment il ne m'était arrivé de tomber dessus –je dois avoir un esprit et des fréquentations plus étriqués que je ne pensais.

Il est vrai aussi que je ne suis guère sensible aux questions de genre ou de race. Je crois même que je les abomine, du moins dans la manière dont elles sont utilisées de nos jours. À force de revendiquer tout et n'importe quoi, de défragmenter la société en autant de communautés bien distinctes, on en vient à dresser les individus les uns contre les autres, dans une sorte de surenchère victimaire où la souffrance des uns vient concurrencer l'apparente normalité des autres. Or je ne crois pas au concept de normalité; mieux, je l'exècre. Chaque personne compose avec ses tragédies personnelles, ses blessures intimes, ses drames, la litanie de ses malheurs qui définissent la condition humaine dans tout ce qu'elle a de grandiose et de pathétique.

Et les identités de genre en font partie.

Pour autant, de toute évidence –ce serait médisance que de prétendre le contraire– il existe dans nos sociétés, notamment au sein de la jeunesse, un nombre significatif de personnes qui refusent de se voir assimilées à un genre bien défini, qu'il fut masculin ou féminin. C'est évidemment leur droit le plus strict –qui suis-je pour dire qui est une femme, qui est un homme, qui est ni l'un ni l'autre ou tous les deux confondus? En soi, cette affirmation identitaire ne me pose aucun problème tant qu'elle demeure l'expression d'une sensibilité qui puise son authenticité dans la profondeur de l'être, qu'elle est en adéquation avec les tremblements de l'âme.

Sitôt qu'elle devient un objet de fantasme, une sorte d'appétence à s'approprier un mal-être qu'on pare des vertus de l'indifférenciation sexuelle, quand elle est utilisée comme une arme de propagande, de singularisation outrancière, lorsqu'elle quitte le domaine de la psyché pour investir celui de la simple imitation, de l'effet de mode, elle perd de son authenticité originelle avec comme risque patent, par simple effet d'entraînement, d'influencer des esprits qui n'étaient disposés en rien à endosser ce particularisme, si ce n'est un trouble plus ou moins prononcé propre à l'adolescence de chacun.

Ceci établi, la langue, notre grammaire, a-t-elle vocation à épouser la cause de ces revendications genrées au point de procéder à une refonte de son fonctionnement interne? À la marge, il me semblerait que oui. Dans l'absolu, je ne vois pas bien au nom de quoi on refuserait à certains l'emploi d'un pronom qui leur permettrait de se sentir mieux intégrés au monde qui les entoure. La langue est assez riche, assez forte dans ses considérations fondamentales pour s'autoriser des écarts qui auraient juste valeur de reconnaissance.

Le seul problème, du moins en ce qui concerne l'emploi du pronom «iel», c'est que de facto, sa généralisation entraînerait un bouleversement en profondeur de notre grammaire puisque son adoption ne résoudrait en rien le problème afférent à la question du genre. Si je me mets à utiliser ce pronom, afin que cette pratique fasse sens, il faudrait aussi que l'adjectif qui lui est lié subisse à son tour un changement approprié sans quoi l'effet même de son emploi deviendrait caduc.

S'il est beau, si elle est belle, que dire quand on utilise le fameux «iel»? Dans ce cas de figure, «iel» est comment exactement? De toute évidence, il ne peut être ni beau ni belle puisque la déclinaison de ces adjectifs porte en eux la marque de leur genre. Il va devenir quoi notre «iel»? Babybel? Bébel? Beaubel? On écrira «iel est beau·bel·le»?!!! Nécessité serait alors d'inventer un nouvel adjectif propre à l'utilisation du pronom «iel», ce qui ne va pas sans poser tout une multitude de problèmes.

À mes yeux, cet écueil porte en lui les germes de sa défaite. On ne va pas commencer à triturer la langue dans tous les sens, inventer mille nouvelles expressions, revisiter de fond en comble l'ordonnancement de notre grammaire (par ailleurs déjà infiniment compliquée) dans le seul but de satisfaire les demandes de ce qui reste malgré tout une minorité de personnes. Une minorité a le droit d'être respectée dans sa pratique, voire même d'être encouragée dans sa singularité, tant qu'elle n'impose pas à la majorité des changements qui viendraient dénaturer des règles dûment ancrées dans ses habitudes séculaires.

Au Canada, on nomme cela des accommodements raisonnables, c'est-à-dire qu'on entend que la société peut, voire même doit accéder à des demandes particulières tant que ces dernières n'engendrent pas des conséquences qui iraient au-delà de ce qu'elle peut supporter comme contrainte. Il en va de même ici avec le pronom «iel». Son emploi en soi ne pose pas, à mes yeux, de réels problèmes. Ce sont les conséquences de son emploi –un éparpillement de la langue, une trop grande complexité de son utilisation, une hypertrophie linguistique– qui le disqualifient.

Il en va de même avec l'écriture inclusive. Tant qu'elle rectifie à la marge des singularités linguistiques qui sans raison objective ordonnent le masculin au détriment du féminin, comme avec la règle de l'accord de proximité, elle fait sens et œuvre pour le bien commun. Sitôt qu'elle entend imposer tout un corset de règles qui rend la grammaire encore un peu plus absconse qu'elle ne l'est déjà, elle devient un combat idéologique qui perd de sa légitimité originelle et dénature la cause qu'elle prétend défendre. La langue française à besoin d'être retouchée, pas refondée.

iel écriture-inclusive
http://www.slate.fr/story/219639/blog-sagalovitsch-iel-ma-grammaire-pronom-neutre-petit-robert

France 1 – Belgique 2

Fri 19 Nov 2021 - 07:27

Parfois, il faut bien l'admettre, l'administration française fait sourire la Belgique.
*Francis Van de Woestyne Éditorialiste en chef - Publié le 13-11-2021

Sans vouloir le moins du monde rallumer la guéguerre stérile qui survient chaque fois qu’un match de football oppose les équipes nationales belge et française, qu’il nous soit permis d’épingler un petit problème survenu ces derniers temps en France. Si pareille mésaventure s’était déroulée en nos contrées, nul doute que nous aurions fait les choux gras de nos amis français toujours prompts à épingler les failles de notre démocratie, les hérésies de nos choix politiques, les absurdités de notre système.

Voici.

Avec près de 20 ans de retard sur plusieurs pays européens, dont la Belgique, la France a décidé de remplacer les anciennes cartes d’identité de ses citoyens par un document au format carte bancaire où figurent désormais des données biométriques infalsifiables. La précieuse carte contient évidemment aussi les mentions habituelles, nom, prénom, date de naissance et adresse. Mais des milliers de Françaises et de Français ne peuvent actuellement pas en bénéficier. Ce qui pose des problèmes pour les déménagements, les examens de permis de conduire, etc. Pourquoi ?

Vingt-neuf lettres et pas une de plus

Les têtes si peu pensantes qui ont conçu la nouvelle carte ont limité de nombre de caractères des noms de commune à 29. Pourquoi 29 ? Parce que. Parce que c’est la place disponible sur la carte. Sauf que… 78 communes affichent un nombre de lettres supérieur à 30. Peut-être y êtes-vous déjà passés aux hasards de vos pérégrinations dans cette France profonde si belle. C’est, notamment, le cas de Saint-Remy-en-Bouzemont-Saint-Genest-et-Isson (45 lettres), Beaujeu-Saint-Vallier-Pierrejux-et-Quitteur (43), Saint-Martin-de-Bienfaite-la-Cressonnière (41) Montigny-Mornay-Villeneuve-sur-Vingeanne (40) La Vacquerie-et-Saint-Martin-de-Castries (40), Roche-sur-Linotte-et-Sorans-les-Cordiers (40), Escueillens-et-Saint-Just-de-Bélengard (38) Bonneville-et-Saint-Avit-de-Fumadières (38), Saint-Quentin-la-Motte-Croix-au-Bailly (38), Javerlhac-et-la-Chapelle-Saint-Robert (37), Villeneuve-Saint-Vistre-et-Villevotte (37).

Patience, ont assuré les services "compétents", le problème sera réglé à la fin de l’année. Comment ? On ne va pas changer la taille de la carte d’identité mais bien proposer aux communes certaines abréviations : Saint, par exemple, deviendra St ; Croix, Cx, etc. Parenthèse : peut-être faudrait-il suggérer aux autorités françaises de voir comment le Pays de Galles a géré le problème, c’est là que se trouve la commune au nom le plus long du monde (à lire à haute voix, SVP) : Llanfairpwllgwyngyllgogerychwyrndrobwlll¬lantysiliogogogoch. Il paraît que les habitants des villages français au nom le plus bref, sont, eux, très satisfaits : ils habitent à "Y", "By", "Eu", "Bu", "Py", et "Oz". Pas de changement en perspective, en revanche, pour les localités que, allez savoir pourquoi, certains prononcent à voix basse : Anus (Yonne), Le Fion (Haute-Savoie), Trécon (Marne), Montcuq (Lot), Sallespisse (Pyrénées-Atlantiques), Arnac-la-Poste (Haute-Vienne), La Trique (Deux-Sèvres), Sainte-Verge (Deux-Sèvres).

Les Français vont donc enfin bénéficier d’une nouvelle carte d’identité moderne, mais cela n’empêchera pas l’état civil français d’avoir toujours un train de retard. La Belgique, en effet, a le projet de la remplacer, dès 2023, par un portefeuille numérique. La carte d’identité et le permis de conduire, entre autres, y seront stockés afin que chaque citoyen puisse s’identifier via son smartphone… Un progrès qui accentuera encore la fracture numérique, mais cela est un autre débat.

Les chèques éternels

Cet épisode illustre le délire administratif dont souffrent certaines administrations françaises. Faut-il rappeler la géniale attestation de sortie, inventée pendant le confinement ? On pourrait aussi ajouter à ces particularités françaises, que nos voisins et amis ont maintenu, avant que l’euro ne vienne les libérer, des prix en anciens et en nouveaux francs, qu’ils ont dû attendre 2020 avant d’organiser le prélèvement à la source de l’impôt, en vigueur chez nous depuis quelque 80 ans et qu’ils utilisent toujours le chèque papier.

Ces petites remarques sur les retards français ne sont rien, bien sûr, au regard de leurs incommensurables atouts, de ce que nous aimons et admirons chez eux, à commencer par la soufflante beauté de certains paysages, la gastronomie, les vins, la culture, le RER, le Louvre, le musée d’Orsay, Le Lubéron, Bordeaux, la Baie de Somme, le Massif des Bauges, les Cévennes, l’île de Ré, de Noirmoutier, et tout ce qui pousse des millions de Belges à se précipiter dans l’Hexagone dès qu’ils ont quelques jours de congé.

Qui bene amat, bene castigat.

administration bureaucratie
https://www.lalibre.be/debats/opinions/2021/11/13/en-france-des-milliers-de-citoyens-ne-peuvent-beneficier-de-leur-nouvelle-carte-didentite-I2M6TDOXIBH3BL2TEIZHKEJWFY/

Je n'ai pas eu le temps de faire plus court.

Wed 17 Nov 2021 - 07:56

La question des formats sur le web est une chose fascinante. Comprendre l'émergence hier de Vine, et aujourd'hui de TikTok [et de Youtube Shorts, clone des précédents permettant de réaliser des vidéos de 6 secondes], c'est plonger dans l'histoire du web. De ce qui mena des premières pages "homepages" à la "statusphère" en passant par l'âge d'or puis le déclin des blogs (mon tout premier livre paru en 2008 ...) mais aussi l'imposition de la vidéo comme outil de captation attentionnelle semblant aujourd'hui indépassable.

Au commencement du web n'était que le texte. Les premiers navigateurs ne lisaient pas les images et dès que les images furent lues, il fallait de longues minutes avant de charger, ligne à ligne, un Gif mal dégrossi d'à peine quelques dizaines de kilos octets. Au commencement, donc, n'était que le texte. A l'époque déjà, on conversait pas mal sur IRC, l'ancêtre des Messenger et WhatsApp d'aujourd'hui. Et sur nos pages personnelles, sur nos "Homepages", si l'on pouvait faire long on se contentait bien souvent de faire court. Tout le monde faisait court. Les premières pages web des premiers sites marchands ou institutionnels en ligne se contentaient de courts paragraphes en texte noir sur fond gris. Avec parfois mais rarement, mais péniblement, quelques images en basse définition que l'on prenait des heures à regarder charger. Le format c'est le texte.

Au commencement du web c'était l'attente. On attendait. On attendait du texte. On attendait que les pages se chargent. On attendait que les images s'affichent. On attendait que la page suivant arrive. On attendait beaucoup. Et l'on était content lorsque l'attente cessait et que le texte s'affichait. Les débits augmentant (très très très mollement) et les forfaits des FAI (fournisseurs d'accès) devenant presque raisonnables (on parle quand même de plus de 30 euros par mois pour les premiers forfaits "illimités" avant quoi on était sur l'équivalent de 5 euros de l'heure !), on s'offrait la joie de payer pour poireauter. Le format c'était l'attente.

Petit à petit, tels des pionniers de canapé, quelque-un.e.s se lancèrent dans la création de leurs pages personnelles. Le web, ce web là en tout cas, devint une féérie chatoyante de mauvais goûts entremêlés où chacun se racontait sans se dire. Le format c'était le mauvais goût chatoyant et les premiers gifs animés jusqu'à la nausée.

Et puis il y eut, l'arrivée et l'explosion des blogs. Nous sommes début 2002. Les blogs et les premières 'plateformes' (Typepad, Live Journal, Blogger, etc.) c'est la possibilité de faire long sans avoir pour autant à se coller la nécessité du code HTML et de l'hébergement via FTP. Vous vous souvenez du FTP ? Le "File Transfer Protocol" qui faisait de chacun de nous des Franc Tireurs et Partisans de l'avènement d'un web où chacun, enfin, allait pouvoir écrire. Si dès le début des blogs l'empan scriptural ne souffre théoriquement plus aucune limite y compris technique, les blogs vont pourtant s'affirmer comme la forme d'une nouvelle brièveté, une brièveté ante-chronologique : il y a des journaux intimes et puis il y a tout le reste, les experts, les anonymes, les blogueurs influents, esquisse des actuels influenceurs. Sur les blogs on partage, et oui, déjà, on partage des étonnements, des choses lues, des images, et des liens, beaucoup de liens. Le format c'est le partage et l'expression de soi. Cela paraît peut-être anecdotique mais pour la première fois, un média, le web, devient saturé d'intime et d'expressions privées. Ce n'est pas anecdotique.

Youtube est créé en 2005 et racheté par Google en 2006. Lorsque c'est la vidéo qui devient le format de référence pour celles et ceux soucieux de conquêtes attentionnelles toujours plus vastes, la vidéo est souvent courte. En 2004 la 3G a débarqué en France. On peut commencer à naviguer en haut débit (pour l'époque) y compris sur des ressources et des formats excessivement gourmands en débit. Le streaming encore balbutiant au début des années 2000 va prendre définitivement son essor. En 2007 débarque le premier iPhone. 3G + smartphone + vidéo : plus rien, sur le web, ne sera jamais comme avant. Le format c'est du lourd. Lourd en poids, lourd en débit, lourd en équipement.

Faire court c'est aussi le format imposé par les réseaux sociaux, Facebook en 2004 et Twitter en 2007. On ne publie plus des contenus, on publie des "statu(t)s", des "états" (d'âme) des "positions" (géographiques), on "dit" (ce qu'on écoute, ce qu'on regarde, etc.). En un nombre de signes limité : 140 pour Twitter, 160 sur Facebook, avant extension (à 280 pour le premier, à ... 63 000 pour le second). Le format c'est "hic et nunc" : où je suis, ce que je fais, dans quel état, à quel endroit. Ici et maintenant et recommencement. Mais le web, fut-il celui des plateformes ne saurait être un étroit. Alors on ouvre et l'on peut insérer et partager des sons et des images, et comme par compensation de ce texte empêché en longueur, on peut en longueur "s'actualiser", et puis regarder les autres s'actualisant.

Vous vous souvenez du web où le format c'était l'attente ? Et bien on continue d'attendre. Mais on attend les autres cette fois, et non pas les pages. Et puisque c'est l'autre que l'on attend, et puisque l'on ne paie presque plus pour attendre, alors on ne supporte presque plus ... de l'attendre. Après la navigation, après la publication, le nouveau format c'est l'injonction. Cela peut paraître anecdotique, mais pour la première fois avec Facebook en 2004, on nous demande de dire quelque chose. C'est tout sauf anecdotique.

Le format c'est aussi celui du droit. Derrière chaque évolution, texte, image, vidéo, il y a des questions de droit. Des droits. Des droits d'auteur notamment. Alors faire court ce fut aussi un temps, s'affranchir de risques de poursuite dans une économie du remix mondialisée. A moindre coût. A moindre court. A moindre frais.

Dans la capsule. C'est la dernière étape. Jusqu'à ce jour en tout cas. Complémentaire des précédentes. Le temps qui est celui de "l'encapsulage" et qui préfigure les médias sociaux mainstream actuels. Progressivement, la capacité comme la nécessité de faire lien, de déployer des hyperliens, cette capacité s'amenuise alors qu'il devient de plus en plus facile "d'encapsuler" un contenu dans un autre. On ne renvoie plus vers un ailleurs, on ramène vers un "à soi". Les "widgets", les trucs rigolos genre "Bitty Browser", Netvibes bien sûr en 2005, et plus globalement la page web, cette entité documentaire première qui ne cesse de se fracturer, de se fragmenter. Or lorsque l'on arrête d'adresser des externalités, lorsque l'on ne fait plus qu'établir des internalités supposées se suffire à elles-mêmes, on cesse alors progressivement de naviguer, on s'habitue à faire défiler. Les réseaux sociaux arrivent et se déploient massivement dans ce contexte d'usage qui les précède et les prépare en un sens. Ils n'ont alors qu'à achever d'alléger la tâche d'encapsulage dans sa charge technique et cognitive, ils n'ont qu'à la rendre fluide pour qu'elle s'impose.

Le rêve du web est mort. Il n'est plus question d'un Homme, d'une page et d'une adresse, mais que toute l'humanité (connectée) réside à la même adresse, qu'à cette adresse on ne trouve qu'une seule et même page changeant et se rechargeant tout le temps, et que, selon les âges de la vie, comme dans l'énigme du Sphinx, cette page s'appelle Tik-Tok, Instagram ou Facebook. L'énigme du Sphinx vraiment, presque littéralement :

"Quel être, pourvu d'une seule voix, a d'abord quatre jambes le matin, puis deux jambes le midi, et trois jambes le soir ?"

Le corps à 4 membres sur TikTok, 4 membres qui dansent. Deux jambes sur Instagram, celles de l'adolescence, de l'autonomie que l'on se construit dans le regard des autres, des siens, des "comme soi" ou des "comment l'on voudrait être soi". Et puis Facebook le soir, toujours nos deux jambes et cette canne conversationnelle, cette béquille cognitive.

Ce n'est pas la taille, c'est le temps qui compte. Durant toutes ces années, la question de la durée de ce que l'on partage est devenue secondaire, derrière la question du temps nécessaire pour établir ce partage ; question elle-même reléguée à l'arrière-plan de celle du temps qu'occupera la publicité dans la durée du partage comme du visionnage. Avez-vous remarqué qu'il n'est pas rare aujourd'hui de passer davantage de temps à regarder la ou les publicités conditionnant l'accès à un contenu que ce contenu lui-même ? Mais dans la cour principale des plateformes, l'essentiel demeure de faire court. Le format c'est la vitesse. Il faut publier vite. Il faut partager vite. Il faut visionner vite. Il faut vite passer au visionnage suivant. On attend toujours, mais on n'attend plus des pages, on n'attend plus des gens, on attend que se maintienne un rythme, une cadence, un enchaînement, une ritournelle.

Longtemps chacun cherchait son court. Un court billet de blog à lire. Une courte vidéo à regarder. Chacun cherchait son court mais chacun suivait son lien. Il y avait bien sûr déjà des attracteurs étranges qui l'on n'appelait pas encore "influenceurs", le capitaine Gloasguen d'Embruns et quelques autres ; mais il n'y avait aucun mur sur l'océan et surtout il n'y avait aucune autre relance automatique que celle de notre propre curiosité ou du coût cognitif permettant de pallier notre ennui de surfeur dilettante en allant chercher un dernier lien, pour la route.

Tout est question de rythme. Sur le web et les plateformes aussi. 120 battements par minute pour la House des années 1990, celle des débuts du web. Et 24 images par seconde pour le cinéma. Et sur le web, tant d'autres formats. Mais toujours plus courts, 10 secondes, 15 secondes mais avec le plus souvent non plus 24 mais 30 images par seconde (comme le réclame la norme NTSC en vigueur aux USA). Comme le nombre de signes de la statusphère, dire toujours plus mais avec toujours moins de texte. Des vidéos toujours plus courtes mais avec toujours plus d'images.

"Less is More" écrivait et prônait l'architecte Mies Van Der Rohe. Il ne s'agit plus ici d'une forme d'épure, mais d'une recherche de tout ce qui sature.

Comme une contraction, un Big Crunch qui serait en cours plus de 30 ans après le Big Bang initial du web ; comme si nous étions au coeur de cette contraction sans savoir ce qui en sortira vraiment : un métavers, un tyran populiste, ou le compte TikTok d'un tyran populiste dans le métavers.

Comme chercheur, comme enseignant, comme parent, comme usager du web, je regarde ce temps passé à dilater du pouce ou de l'index des fragments signifiants d'insignifiance. Ces distractions. Souvent seulement vues uniquement comme des "dys-tractions", des anomalies de ce qui nous meut, de ce qui nous tire et nous attire ; distractions et dys-tractions qui, si elles en sont souvent, ne sont pas uniquement cela. Regarder et essayer de comprendre ce qui s'y invente, ce qui s'y déploie, et ceux qui s'y replient, aussi. A se demander où est la fiction pour sortir de l'affliction.

Jamais autant de gens n'ont raconté autant d'histoires. Et jamais autant d'histoires n'ont été aussi semblables. Communes ritournelles. La question est de savoir ce qui reste de la capacité de fiction quand toutes les histoires se publient sans friction et quand seules les frictions semblent capables de "faire histoire" dans le débat public.

La forme courte, les formes courtes ont toujours été présentes dans nos espaces sociaux, dans nos espaces publics, dans nos horizons culturels : litotes, métonymies, syllogismes, haïkus, apophtegmes, aphorismes, épigrammes, maximes, proverbes, feuilletons et aujourd'hui séries ... Les formes narratives, poétiques ou même rhétoriques courtes ont toujours été un essentiel de nos sociétés. Elles sont aujourd'hui au cœur de l'essentiel de nos usages numériques.

Des brièvetés en concurrence comme en co-occurence : celle de la série qui se déploie dans la longueur des saisons qui la composent ; celle du Tweet qui s'articule en Thread ou se déploie sans le défilement infini des autres gazouillis ; celle de la vidéo TikTok de 15 secondes qui fait collection au milieu d'autres dont le visionnage nécessiterait bien plus qu'une seule vie.

Faire court. Imiter le court. Reproduire le court. Faire rythme. Ce défilement est avant tout un battement, une pulsation. Le format aujourd'hui c'est la pulsation. C'est pourquoi il importe de savoir comment en contrôler la vitesse. La vitesse de ces enchaînements déterminés algorithmiquement dans le seul but de fabriquer des routines d'aliénation scopique, cette capacité à ne valoriser le court que tant qu'il concourt à fabriquer de l'artificiellement long en continu, ce refus total et programmatique du discontinu, cela interroge aujourd'hui notre capacité plus globale, plus politique, à nous confronter à des régimes narratifs nécessitant d'articuler le temps long comme autre chose que la simple agrégation de séquences courtes.

Je regardais mes étudiant.e.s faisant défiler leur compte TikTok. Je regardais mes enfants faire de même. J'avais envie d'écrire un billet. Je n'ai pas eu le temps de faire plus court.

"Je n'ai fait [cette lettre] plus longue que parce que je n'ai pas eu le loisir de la faire plus courte."
Blaise Pascal, Les Provinciales, lettre 16.

Imaginer ce monde où un autre Blaise Pascal écrirait aujourd'hui :

"Je n'ai fait ce Tweet plus court que parce que je n'ai pas eu le loisir de le faire plus long."

histoire web
https://www.affordance.info/mon_weblog/2021/11/le-temps-de-faire-pus-court.html

G comme... Grand Dérangement - Traces et Petits Cailloux

Mon 8 Nov 2021 - 07:49

Voici venu le moment d'aborder la Déportation, ce grand traumatisme historique qu'un sens aigu de la litote amena les Acadiens à appeler pudiquement "le Grand Dérangement"...

En 1713, par le traité d'Utrecht, les Français avaient perdu Terre-Neuve, la baie d'Hudson et la presqu'île de l'Acadie (qui devenait la Nouvelle-Ecosse -Nova Scotia-), dont les frontières étaient toutefois restées floues. Ils avaient conservé l'Ile Royale (aujourd'hui Cap-Breton) et les rives du Saint-Laurent.

Après le Traité d'Aix la Chapelle, en 1748, les britanniques, soucieux de garantir leur main-mise sur la Nouvelle-Écosse, y envoyèrent 2 500 colons et fondèrent le port de Halifax, sur la côte sud. Par ailleurs, depuis le traité d'Utrecht, ils avaient exigé des Acadiens un serment d'allégeance à la couronne d'Angleterre. La plupart l'avaient signé, mais en exigeant de pouvoir rester catholiques et de ne pas avoir à combattre les Français. Ils revendiquaient le statut de "Français Neutres".

Les Anglais n'ayant aucune confiance dans les Acadiens malgré le serment envisageaient régulièrement de s'en débarrasser. Sans compter que s'emparer de leurs bonnes terres serait un bonus appréciable. Mettant fin à des décennies de tergiversations, en 1755, Charles Lawrence, lieutenant-gouverneur de Nouvelle Écosse, prit l'initiative de les déporter. Londres n'avait pas donné l'ordre d' expulsion, mais Lawrence ne fut pas désavoué.

Après plusieurs semaines de préparatifs secrets, et l'arrestation de divers Acadiens à certains endroits, le lieutenant-colonel John Winslow, accompagné de 313 soldats britanniques, arriva par bateau le 20 août dans le bassin des Mines. Il se rendit à l'église Saint-Charles et s'y installa, après avoir fait enlever les objets de culte par quelques habitants. Le 21, les soldats construisirent une palissade autour de leur camp, puis une autre le 30 autour du cimetière.

Entre le 31 août et le 2 septembre, Winslow et ses hommes visitèrent les différents hameaux et villages des Mines. Ils observèrent que la moisson était en train de se terminer. Les Acadiens, habitués à la présence anglaise, poursuivaient leurs travaux. Winslow rédigea une proclamation qui leur fut signifiée le 4 septembre :

« Aux habitants du district de la Grand-Prée, rivière des Mines, rivière aux Canards, etc., [...] j’ordonne [...] à tous les habitants, y compris les vieillards, les jeunes gens ainsi que ceux âgés de dix ans, [...] de se réunir à l’église de la Grand-Prée, le vendredi, 5 courant à trois heures de l’après-midi, afin de leur faire part des instructions que nous sommes chargés de leur communiquer. [...] aucune excuse, de quelque nature qu’elle soit, ne sera acceptée et que le défaut d’obéissance aux ordres ci-dessus entraînera la confiscation des biens et effets."

Le capitaine Murray adressa une sommation équivalente aux habitants de Piziquid et alentours.

Le lendemain, vendredi 5 septembre, les hommes et garçons âgés de plus de dix ans de tous les villages des Mines - Grand-Pré, Habitants, Canard, Gaspereau...-, soit 418 personnes, se rendirent donc à l'église. Les soldats britanniques fermérent aussitôt les portes, et Winslow fit lire par un interprète la déclaration suivante :

Journal de Winslow p 178

« Messieurs,
J'ai reçu de Son Excellence le gouverneur Lawrence les instructions du Roi1 que je tiens en main. [...] Le devoir qui m'incombe, quoique nécessaire, est très désagréable à ma nature et à mon caractère, de même qu'il doit vous être pénible[...]
Je vous communique donc, sans hésitation, les ordres et instructions de Sa Majesté, à savoir que toutes vos terres et habitations, bétail de toute sorte et cheptel de toute nature, sont confisqués par la Couronne, ainsi que tous vos autres biens, sauf votre argent et vos meubles, et vous devez être vous-mêmes enlevés de cette Province qui lui appartient. C'est l'ordre péremptoire de Sa Majesté que tous les habitants français de ces régions soient déportés. [...] je veillerai aussi à ce que les familles s'embarquent au complet dans le même vaisseau [..] et j'espère qu'en quelque partie du monde que vous puissiez vous trouver, vous serez de fidèles sujets, un peuple paisible et heureux2. Je dois aussi vous informer que c'est le bon plaisir de Sa Majesté que vous restiez en sécurité sous la surveillance et la direction des troupes que j'ai l'honneur de commander et ainsi je vous déclare prisonniers du roi. »

Le 15 septembre, Winslow établit la liste des Acadiens emprisonnés dans l’église de Saint-Charles, liste dont+ l'original se trouve aujourd'hui à Boston, et dont on peut voir un fac-similé au Musée de Grand’Pré. On y trouve les noms des habitants français de Grand’Pré, Rivière des Mines, Habitant, Rivière-aux-Canards, le nombre de leurs enfants, et le détail de leur bétail.

Expulser des milliers de personnes demandait une lourde logistique. Il fallut attendre plusieurs semaines l'arrivée progressive de tous les bateaux nécessaires pour transporter les habitants des paroisses Saint Charles de Grand-Pré, Saint-Joseph de la Rivière aux Canards, Sainte-Famille et Assomption de Piziquid. Les femmes et les enfants furent chargés de fournir la nourriture aux prisonniers. Pour empêcher que les habitants qui avaient pu s'enfuir ne puissent revenir s'installer après le départ de la flotte, Winslow fit brûler les hameaux et les champs3. A Beaubassin au fond de la baie Française et à Port Royal sur la rivière Dauphin, la situation des acadiens était la même... (Deux ans plus tard, un officier britannique décrivit les villages acadiens de Port Royal en ruines et les poiriers et pommiers abandonnés croulant sous le poids des fruits...)

Le 10 septembre, Winslow note dans son journal :

« J'ai remarqué ce matin une agitation inaccoutumée qui me cause de l'inquiétude. J'ai réuni mes officiers, il fut décidé à l'unanimité de séparer les prisonniers... Nous avons convenu de faire monter 50 prisonniers sur chacun des cinq vaisseaux arrivés de Boston et de commencer par les jeunes gens. [...] Selon mes ordres, tous les habitants français furent rassemblés, les jeunes gens à gauche. J'ordonnai au capitaine Adams, aidé d'un lieutenant et de 80 officiers et soldats, de faire sortir des rangs 141 jeunes hommes et de les escorter jusqu'aux transports. J'ordonnai aux prisonniers de marcher. Tous répondirent qu'ils ne partiraient pas sans leurs pères. [...] J'ordonnai alors à toute la troupe de mettre la baïonnette au canon et de s'avancer sur les Français. [...] Ils s'avançaient en priant, en chantant, en se lamentant et sur tout le parcours d'un mile et demi, les femmes et les enfants venus au-devant d'eux, priaient à genoux et pleuraient à chaudes larmes. J'ordonnai ensuite à ceux qui restaient de choisir parmi eux 109 hommes mariés qui devaient être embarqués après les jeunes gens [...] Ainsi se termina cette pénible tâche qui donna lieu à des scènes navrantes...»

Les familles de Grand-Pré commencèrent à embarquer à leur tour le 8 octobre. Elles le firent, note Winslow, "à contrecœur, les femmes en grande détresse emportant leurs enfants dans leurs bras. D'autres portant leurs parents décrépits dans leurs charrettes et tous leurs biens. Se déplaçant dans une grande confusion [...] scène de malheur et de détresse5."

C'est dans ce contexte que mourut le vieux Jacques LEBLANC (mon sosa 1232), alors âgé de 75 ans, petit-fils de Daniel le pionnier et de Françoise GAUDET par leur fils René, certainement terrassé de chagrin alors que ses frères et sœurs, ses 13 enfants, ses nombreux petits-enfants et petits-neveux, étaient sommés de monter à bord de bateaux différents, avant d'être éparpillés sur des milliers de kilomètres. Car malgré la promesse de Winslow, dans la confusion des embarquements, bien des familles se retrouvèrent séparées, et les milliers d'Acadiens expulsés de leurs terres de Grand-Pré, Piziquid, Beaubassin ou Port Royal, furent envoyés vers différentes colonies de la Nouvelle Angleterre : Massachussetts, Pennsylvanie, Virginie, Caroline du Nord, Connecticut, Maryland... L'objectif de Lawrence était non seulement d'expulser les Acadiens de Nouvelle Écosse, mais également de les disperser, pour les empêcher de se regrouper et de reconstruire leurs communautés.

Le cas des enfants de Jean Baptiste DUON (sosa 624) et Agnès HEBERT (S 625) de Port Royal illustre bien cet éparpillement :

Agnès, veuve depuis 1746, avait 59 ans lors du Grand Dérangement, 11 enfants âgés de 16 à 40 ans, et un certain nombre de petits-enfants. Elle se retrouva brutalement et définitivement séparée de toute sa famille, excepté son fils Louis Basile, 27 ans, et sa plus jeune fille, Rosalie, 16 ans, transportés comme elle à New York.

Lorsque les rafles avaient commencé à Port-Royal, ses fils Honoré, 38 ans, Charles, 21 ans, et Claude,18 ans, étaient parvenus à s'enfuir dans les bois (où ils survécurent dans des conditions terribles de famine et de maladie avec des centaines d'autres acadiens en fuite pendant quelques années, avant d'être repris et emprisonnés par les Anglais).

Agnès vit ses autres enfants embarqués sur des bateaux qui allaient partir :

  • pour la Virginie, avec l'aîné, Jean Baptiste, 40 ans, Pierre, 35 ans, Euphroisine, 30 ans, et Cyprien (sosa 312), 25 ans
  • pour Boston : avec Jeanne, 36 ans, et Abel, 32 ans

    Pourtant, ceci n'était que le début d'une dispersion qui allait mener les enfants et petits-enfants d'Agnès bien plus loin encore (Québec, Louisiane, Angleterre, Martinique, France, etc...), et elle ne les revit jamais...

Les départs vers l'exil s'échelonnèrent de fin octobre au 20 décembre, et le voyage fut effroyable. Il faut dire que les bateaux affrétés n'étaient pas du tout adaptés à des passagers humains; la plupart servaient normalement au transport de bétail ou de marchandises, et malgré quelques modifications en prévision de la déportation, ils ne permettaient pas aux prisonniers de se tenir debout. De plus, l'air était irrespirable et vicié dans les cales surchargées de passagers (les capitaines britanniques étant rémunérés à la quantité d'acadiens embarqués n'avaient donc pas hésité à enfreindre les règlementations de l'époque), et la nourriture insuffisante. La maladie, le manque d'hygiène, la malnutrition et le désespoir firent des ravages. D'autant que si l'embarquement avait commencé le 10 septembre, les bateaux tardèrent des semaines avant de prendre la mer, et certains prisonniers y passèrent donc plusieurs mois 4.

Pour aggraver encore la détresse des déportés, la flotte partie fin octobre essuya une grosse tempête peu après le départ, obligeant certains bâtiments à faire relâche à Boston, le temps de réparer les avaries. Les autorités locales qui montèrent inspecter les bâtiments constatèrent la surpopulation, la présence de malades et le manque de provisions, ce qui n'empêcha pas les bateaux de reprendre leur route vers le sud...

Ce furent donc des prisonniers épuisés, affaiblis, souvent malades, qui arrivèrent à leurs destinations au fil des mois. Un certain nombre étaient morts pendant le voyage. D'autres moururent peu après l'arrivée, comme à Philadelphie où, sur les 454 acadiens débarqués en novembre, 237 furent rapidement emportés par la variole.

Les Anglais n'avaient pas pris la peine d'avertir leurs colonies de Nouvelle Angleterre de l'envoi de ces prisonniers. Les capitaines des navires étaient simplement chargés de remettre une lettre explicative aux autorités locales en débarquant... L'arrivée soudaine de ces exilés faméliques, malades, en haillons, étrangers et d'une autre religion (catholiques et considérés comme plus français que neutres), fut donc vue d'un très mauvais œil. Dans plusieurs colonies, on tergiversa des jours voire des semaines avant de les autoriser à débarquer, les laissant souffrir encore de la faim et du froid (novembre/décembre en Amérique du Nord...), toujours entassés sur les bateaux...

  • Entre la fin novembre et le 4 décembre, 4 bâtiments chargés de 900 Acadiens arrivèrent au Maryland. Une fois répartis dans différents villages de l'intérieur, il leur fut interdit de quitter la colonie.

Parmi ces malheureux passagers se trouvaient :

  • Marie Josèphe LEBLANC, 50 ans, fille du vieux Jacques mort de chagrin en octobre à Grand Pré, avec mari et enfants, et avec son frère Jacques6, 47 ans, leur soeur Madeleine, 43 ans, leur soeur Elisabeth, 28 ans

  • Anne LE PRINCE (sosa 1239 et 1255), veuve RIVET, 70 ans, avec son fils Michel RIVET et sa seconde femme , son fils Etienne avec sa famille, le mari de sa fille Anne décédée en Acadie en 1750, et les enfants de celle-ci, et sa petite-fille Françoise, 22 ans, fille de Marie Rose (sosa 619 et 627). Par contre, Marie-Rose fut envoyée en Virginie avec ses autres enfants, Jean,8 ans, Marie Joseph,6 ans, Anne (sosa), 16 ans, Marguerite (sosa) 20 ans

  • En Pennsylvanie, les Acadiens qui survécurent à la variole furent rassemblés dans un quartier misérable de Philadelphie. Comme dans d'autres colonies, les enfants et jeunes adolescents furent séparés de leurs parents afin de les assimiler à la culture anglaise. Les adultes furent généralement employés comme domestiques.

C'est là que fut transportée Catherine LEBLANC, 30 ans, autre fille du vieux Jacques.

  • Le Massachussetts était une colonie puritaine à l'intolérance religieuse extrême : Boston refusait toute présence de Quakers, de juifs, de catholiques ( tout prêtre catholique pénétrant dans la colonie serait condamné à mort)... Les pauvres, les indigents, les esclaves, y étaient réprimés violemment.

L'arrivée des "papistes" fut donc très mal acceptée. Là aussi, les enfants, employés comme domestiques dans des familles britanniques ou mis en apprentissage, furent volontairement séparés de leurs parents. La pratique de la religion catholique était interdite, et les Acadiens étaient assignés à résidence. Les débuts de la Guerre de Sept Ans au printemps 1756 aggravèrent encore leur situation, car les bostoniens craignaient qu'ils ne pactisent avec l'ennemi français et ne s'enfuient pour les rejoindre...

A Boston furent envoyés :

  • Jean TRAHAN, (sosa 630) , âgé de 58 ans, petit fils de Guillaume (lien) et de Madeleine BRUN, installé en Acadie à la Rivière aux Canards; je ne sais pas si sa femme Marie HEBERT l'accompagnait ou si elle était déjà décédée, ou si elle a été envoyée ailleurs. En tout cas il fut séparé de sa fille Marie Isabelle (dite aussi Elisabeth), 29 ans (ma sosa 315), envoyée en Virginie avec son (premier) mari et son fils de 6 ans

  • Marguerite DAIGRE, 31 ans, Marie-Josèphe 26 ans, filles d'Olivier (sosa 628) et Françoise GRANGER (sosa 629), qui eux seront déportés en Virginie avec leurs autres enfants Honoré (sosa 314), 29 ans, Françoise 24 ans, Olivier 23 ans, Simon Pierre, 19 ans, Jean Charles 14 ans, Paul 13 ans.

A New-York, Agnès HEBERT (sosa 625), qui avait déjà perdu presque toute sa famille au départ de la Nouvelle Écosse, fut séparée de sa fille Rosalie DUON, qui n'avait que 16 ans et dut rejoindre une famille locale.

Et enfin, en Virginie, où furent envoyés la plupart de mes Sosas, le gouverneur refusa absolument de les accueillir. Après leur avoir fait attendre une décision pendant des mois, les autorités de Virginie décidèrent finalement de rendre la pareille aux autorités anglaises, et d'expédier les pauvres expulsés survivants en Angleterre, sans prévenir la Couronne. C'est ainsi que le 10 mai 1756, quatre vaisseaux transportant 1044 Acadiens cinglèrent vers l'Europe, et après une pénible traversée, accostèrent à Falmouth, Liverpool, Bristol, et Portsmouth (puis Southampton).

10 de mes Sosas subirent ce pénible destin (sans compter leurs nombreux proches et tous les autres) :

Françoise GRANGER, 55 ans, Olivier DAIGRE, 52 ans, Rose RIVET, 48 ans, "Marie" Josèphe TRAHAN, 44 ans, Honoré DAIGRE 29 ans, Elisabeth TRAHAN, 29 ans, Cyprien DUON, 25 ans, Charles LEBLANC 21 ans, Marguerite LANDRY 20 ans, Anne LANDRY 16 ans

En tout, outre mes ancêtres directs et leurs enfants, près de 7 000 Acadiens furent déportés de Nouvelle Ecosse pendant le dernier trimestre de 1755. Beaucoup moururent dès les premières semaines, et la plupart des survivants connurent misère et dénuement pendant de nombreuses années*** , et encore bien des vicissitudes. Ils furent de fait les premières victimes de la Guerre de Sept Ans, qui allait commencer officiellement le 29 août 1756 et bouleverser définitivement Europe et Amérique. Le Traité de Paris en 1763, en les libérant du joug britannique, accentua leur éparpillement, et la diaspora acadienne a depuis semé des descendants un peu partout sur la planète...

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Notes :

1) En fait, c'était un mensonge, les instructions venaient de Lawrence

2) Ben voyons...

3) "depriveing those who shall escape of all meam of shelter or support by burning their houses and destroying everything that may afford them the means of subsistance in the countrey." (Instructions du 11 août 1755. Journal de Winslow. N. S. H. S. vol. III, p. 80.) ("privant ceux qui s'enfuiront de tous moyens d'abri ou d'aide en brûlant leurs maisons et en détruisant tout ce qui pourrait leur fournir des moyens de subsistance dans la région")

4) Grand Pré, 20 décembre 1755: le capitaine Phins Osgood écrit au Colonnel Winslow: "This serves to inform you that the French which you left under my care are all removed. The last of them sailed this afternoon, in two schooners, viz., the Race Horse, John Banks, master, with 112 persons. Ranger, Nathan Monrow, master, with 112 persons. Banks for Boston. Monrow for Virginia." (NSHS#3, p. 192.) ("Ceci pour vous informer que les Français que vous avez laissés à mes soins sont tous partis. Les derniers d'entre eux ont pris la mer cet après midi, dans deux schooners, le Race Horse, capitaine John Banks, avec 112 personnes; le Ranger, capitaine Nathan Monrow, avec 112 personnes. Banks parti pour Boston, Monrow pour la Virginie.")

5) "very sullenly and unwillingly, the women in great distress carrying off their children in their arms. Others carrying their decrepit parents in their carts and all their goods. Moving in great confusion and [it] appears as a scene of woe and distress."

6) En 1767, Honoré LEBLANC déclare Catherine envoyée au Maryland, et Jacques envoyé en Pennsylvanie; à voir où sont l'un et l'autre quelques années plus tard, c'est visiblement l'inverse : en 1763, Jacques est à Oxford, Pennsylvanie, et en 1762, Catherine est à Philadelphie. Il y a quelques erreurs dans la déclaration de leur frère Honoré à Belle-Isle. Il faut dire que les faits dataient de 15 ans, et les nouvelles circulaient difficilement. Il est même remarquable que les Acadiens de Belle Isle aient eu tant d'informations sur le devenir de leurs familles dispersées

  • Certains de ceux qui étaient en France dépendaient encore des Secours de l’État en 1794

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Sources principales :

  • Journal de Winslow : Nova Scotia Archives LIEN :

-The Collections of The Nova Scotia Historical Society (NSHS) et en particulier Les bateaux de la Déportation

  • L’accueil des exilés acadiens suite au Grand-Dérangement dans la colonie du Massachusetts de 1755 à 1775 Adeline Vasquez-Parra in International Journal of Canadian Studies Revue internationale d’études canadiennes :
Acadie Grand-dérangement
https://tracesetpetitscailloux.over-blog.com/2021/11/g-comme.grand-derangement.html
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