Une patiente toulousaine a remporté son combat judiciaire contre le laboratoire Merck dans l'affaire du Levothyrox, rapporte France Bleu Occitanie mardi 18 juillet. Le 11 juillet dernier, le tribunal judiciaire de Toulouse a condamné le laboratoire à indemniser la plaignante durant les six premiers mois de la commercialisation de la nouvelle formule du médicament, pour préjudice corporel. Selon son avocate, maître Stella Bisseuil, il s'agit d'une première dans cette affaire.
L'affaire du Levothyrox résumée en sept actes
Le Levothyrox - médicament commercialisé par le laboratoire Merck pour lutter contre des troubles de la thyroïde - a changé de composition en 2017. La nouvelle formule avait donné lieu à plusieurs procédures judiciaires. De nombreux patients s'étaient, en effet, plaints d'effets secondaires. En juin 2020, le laboratoire avait été condamné à verser 1 000 euros à chacun des 3 300 plaignants pour préjudice moral et pour défaut d'information sur la nouvelle formule.
Des souffrances endurées "pendant des mois"
L'avocate, qui représente près d'une cinquantaine de plaignants de la région toulousaine, explique : "Nous n'avions jamais réussi jusqu'à présent à obtenir l'indemnisation des souffrances endurées pendant les six mois durant lesquels il n'existait pas d'alternative thérapeutique à ce médicament".
Elle rappelle que "des personnes ont souffert de crampes, de maux de tête, de prise de poids, de perte de cheveux..." Et que "grâce à une expertise de deux médecins endocrinologues", sa patiente "qui ne prenait rien d'autre comme médicament que du Levothyrox, s'est vue reconnaître le préjudice corporel subi, avec une indemnisation de quelques milliers d'euros".
Contactée par France Bleu Occitanie, la patiente toulousaine (qui souhaite garder l'anonymat) se dit "contente de ce jugement, de cette reconnaissance". Elle raconte avoir souffert pendant des mois de "maux de tête, de ballonnements, de grosse fatigue, de prise de poids". La plaignante, qui a touché moins de 5 000 euros, juge cette somme trop faible et confie qu'elle espérait "une indemnisation plus élevée".
Le laboratoire mis en examen en octobre 2022
De son côté, Stella Bisseuil espère que "la reconnaissance de ce préjudice corporel finira par faire jurisprudence" et ajoute que le laboratoire Merck peut encore faire appel de la décision. En octobre 2022, Merck, le laboratoire, a été mis en examen pour "tromperie aggravée" et placé sous contrôle judiciaire. Dans la foulée de la mise en examen du laboratoire, en décembre 2022, l’ANSM (l'Agence nationale de sécurité du médicament) a, à son tour, été mise en examen pour "tromperie".
L'Agence nationale de sécurité du médicament a été mise en examen, début décembre, pour "tromperie". Retour sur les principales étapes du dossier.
Article rédigé par franceinfo avec AFP - France Télévisions Publié le 06/12/2022 17:08
Deux mises en examen à quelques semaines d'intervalle. Après des années de procédures judiciaires, le dossier du Levothyrox avance. L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a annoncé lundi 5 décembre sa mise en examen pour "tromperie". Un mois et demi plus tôt, la filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck, fabricant du médicament, avait déjà été mise en examen pour "tromperie aggravée".
Au cœur du scandale : une nouvelle composition du médicament contre les troubles de la thyroïde, prescrit à trois millions de personnes en France. Après sa mise sur le marché en 2017, des patients se sont plaints de nombreux effets secondaires. Franceinfo revient sur les principales étapes de cette affaire.
Fin mars 2017, la filiale française du laboratoire allemand Merck met sur le marché la nouvelle formule du Levothyrox, à la demande de l'ANSM. Cette nouvelle formule utilise le même principe actif, la lévothyroxine, mais avec de nouveaux excipients. Le but est de rendre sa concentration plus stable, élément crucial pour l'efficacité.
Crampes, maux de tête, vertiges ou perte de cheveux... Rapidement, des patients se plaignent de nombreux effets secondaires liés, selon eux, à cette nouvelle formule.
Les plaintes de patients s'accumulent. Une enquête préliminaire est confiée au pôle de santé publique du tribunal de grande instance de Marseille, dont la compétence s'étend jusqu'à Lyon, siège français de Merck. L'ancienne formule du Levothyrox fait son retour dans les pharmacies le 2 octobre 2017 sous le nom d'Euthyrox. Mais le nombre de boîtes est limité. A Lyon, le siège français de Merck est perquisitionné le 3 octobre 2017.
Les effets indésirables sont dus à "un déséquilibre thyroïdien" causé par le changement de traitement, pas à la nouvelle formule, assure l'ANSM, le 11 octobre. Sur le plan civil, une action collective est engagée le 24 octobre contre Merck à Lyon. Une mission parlementaire menée par le député LR et médecin Jean-Pierre Door conclut à un défaut d'information. Son travail est critiqué par des patients, qui considère que "les personnes auditionnées sont quasiment toutes des proches ou des gens qui ont travaillé pour le laboratoire", y compris le député.
Merck est condamné le 14 novembre 2017 à fournir "sans délai" l'ancienne formule, par le tribunal de grande instance de Toulouse. Au pénal, une information judiciaire contre X est ouverte à Marseille le 2 mars 2018 pour tromperie aggravée, blessures involontaires et mise en danger de la vie d'autrui, élargie en novembre à homicide involontaire. D'après le ministère de la Santé, un demi-million de Français ont cessé de prendre le Levothyrox depuis le lancement de la nouvelle formule.
L'Association française des malades de la thyroïde (AFMT) dénonce la présence de nanoparticules de métal dans la nouvelle formule ainsi que des anomalies de composition. Le laboratoire dément toute anomalie, tandis que l'agence du médicament confirme, le 5 juillet 2018, "la bonne qualité de la nouvelle formule".
Le 20 décembre, à l'issue d'une vaste étude sur plus de 2 millions de patients, le ministère de la Santé note l'absence d'augmentation de "problèmes de santé graves", ce que confirme son rapport final en juin 2019. D'autres études, comme celle d'avril 2019 réalisée par des chercheurs de l'université de Toulouse, concluent pourtant que la nouvelle formule ne présente pas de garanties suffisantes pour les patients.
En mars 2019, à l'issue du premier procès intenté au civil, le tribunal d'instance de Lyon déboute 4 113 plaignants, écartant tout "défaut d'information" de la part de Merck. Mais en juin 2020, la Cour d'appel de Lyon reconnaît que Merck a commis "une faute" lors du changement de formule. Le laboratoire est condamné à verser 1 000 euros à chacun des 3 329 plaignants toujours impliqués dans la procédure. Le laboratoire se pourvoit en cassation, mais son pourvoi est rejeté le 16 mars 2022.
L'arrêt de la commercialisation de l'ancienne formule du Levothyrox (Euthyrox), initialement annoncée pour septembre 2020, est repoussée à fin 2022 au moins. Une autre action collective est lancée en septembre 2021, contre l'agence du médicament pour "défaut de vigilance" et d'"anticipation", devant le tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis).
Un nouveau volet s'ouvre le 19 octobre 2022. La filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck est mise en examen pour "tromperie aggravée", quatre ans et demi après l'ouverture de l'enquête pénale à Marseille. Le président de Merck en France est entendu au pôle santé du tribunal judiciaire de Marseille. La société Merck Santé S.A.S.U est placée "sous contrôle judiciaire" avec le dépôt d'une caution de 4,3 millions d'euros, ainsi qu'une garantie de 7 millions d'euros.
Cette mise en examen est liée aux "modalités d'information mises en place au moment de la transition de l'ancienne à la nouvelle formule en 2017", explique l'entreprise. Selon l'avocat de Merck au pénal, Mario Stasi, "Merck avait coconstruit ce plan de communication avec différents partenaires, des experts et en dialogue avec des associations de patients, et sous l'autorité de l'agence du médicament qui l'a approuvé".
"La juge a écarté les infractions les plus graves – blessures et homicides involontaires et mise en danger de la vie d'autrui –, pour ne retenir que des manquements dans le plan de communication", insiste l'avocat, la qualité du médicament n'est pas en cause." Mais "l'instruction se poursuit sur l'ensemble des chefs visés lors de l'ouverture de l'information judiciaire", précise le parquet phocéen.
L'ANSM annonce lundi 5 décembre avoir été mise en examen pour "tromperie" dans le dossier. "L'ANSM n'a jamais nié les difficultés rencontrées par certains patients au moment du passage à la nouvelle formule du Levothyrox et se préoccupe de manière constante et quotidienne de la sécurité et de la santé des patients", se défend l'agence. L'ANSM "apportera sa pleine contribution à la manifestation de la vérité, mais conteste fermement les reproches formés à son encontre, car aucune infraction pénale n'a été commise", estime-t-elle.
L'agence est aujourd'hui visée par une action collective de quelque 1 100 plaignants, pour "défaut de vigilance" et "défaut d'anticipation".
Cette mise en examen intervient peu après celle de la filiale française du laboratoire allemand Merck, fabricant du médicament, pour « tromperie aggravée ».
SANTÉ - L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a annoncé avoir été mise en examen ce lundi 5 décembre pour « tromperie » dans le dossier du changement de formule du Levothyrox, ce médicament conçu contre les problèmes de thyroïde.
Cette mise en examen intervient un mois et demi après celle la filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck, fabricant de ce médicament, pour « tromperie aggravée ».
Au cœur de cette affaire : la nouvelle composition du Levothyrox, arrivée en France fin mars 2017 et utilisant le même principe actif, la lévothyroxine, mais avec de nouveaux excipients.
Or, des patients se sont plaints de nombreux effets secondaires : crampes, maux de tête, vertiges ou perte de cheveux. Une enquête pénale a été ouverte à Marseille en mars 2018 pour faire la lumière, alors que ce médicament est utilisé quotidiennement par 2,5 millions de patients en France, selon Merck.
« L’ANSM n’a jamais nié les difficultés rencontrées par certains patients au moment du passage à la nouvelle formule du Levothyrox et se préoccupe de manière constante et quotidienne de la sécurité et de la santé des patients », assure l’agence française contrôlant la sécurité des médicaments dans un communiqué diffusé ce lundi soir.
Elle « apportera sa pleine contribution à la manifestation de la vérité mais conteste fermement les reproches formés à son encontre, car aucune infraction pénale n’a été commise », estime-t-elle.
En juin 2019, l’ANSM avait mené une étude sur plus de deux millions de patients et conclu que le passage à la nouvelle formule n’avait pas engendré de « problèmes de santé graves ».
Cette agence est aujourd’hui visée par une action collective de quelque 1 100 plaignants, pour « défaut de vigilance » et « défaut d’anticipation ».
Dans un autre volet, au civil, la Cour de cassation avait rejeté en mars le pourvoi de Merck, condamné en 2020 à indemniser plus de 3 300 utilisateurs ayant souffert d’effets secondaires à la suite du changement de formule.
En France, moins de 100 000 patients sont traités avec l’ancienne formule, importée depuis fin 2017 sous le nom d’Euthyrox. La distribution de l’ancienne formule, qui devait s’arrêter en 2020, a été prolongée au moins jusqu’à la fin 2022.
"On va enfin nous croire !" : les victimes du Levothyrox saluent la mise en examen de Merck pour "tromperie aggravée"
La filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck a annoncé mercredi sa mise en examen pour "tromperie aggravée" dans l’affaire du changement de formule du Levothyrox, médicament conçu contre les problèmes de thyroïde.
Article rédigé par Mathilde Lemaire Radio France Publié le 19/10/2022 16:16
Un nouvel épisode dans la sage pharmaco-judiciaire du Levothyrox : la filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck a annoncé mercredi 19 octobre dans un communiqué sa mise en examen pour "tromperie aggravée" dans le dossier du changement de formule du Levothyrox, ce médicament conçu contre les problèmes de thyroïde. Cette décision est liée aux "modalités d'information mises en place au moment de la transition de l'ancienne à la nouvelle formule en 2017", précise l'entreprise dans un communiqué.
Mise en examen de Merck : "C'est un satisfecit", mais pas "une victoire", réagit l'avocat de plaignants Christophe Lèguevaques
Le laboratoire Merck est mis en examen pour "tromperie aggravée" : une tromperie sur une marchandise entraînant un danger pour la santé de l'homme ou de l'animal. La juge d'instruction du pôle santé du tribunal judiciaire de Marseille a décidé de cette mise en examen après l'audition mardi du patron de Merck France. Il est reproché à la filiale française du laboratoire allemand de ne pas avoir informé les patients – et pas suffisamment les médecins – que le changement de formule du Levothyrox allait occasionner des troubles chez certains malades, obligés quotidiennement de prendre ce traitement vital et non substituable. En 2017, Merck avait le monopole en France sur cette molécule.
A ce stade, il n'y a pas de mise en examen pour "homicide" ni pour "blessures involontaires" pour Merck, alors que l'enquête ouverte depuis 2018 au pôle santé du tribunal judiciaire de Marseille l'est bien pour ces motifs.
Cette mise en examen de Merck est une satisfaction pour les milliers de victimes du Levothyrox. La justice travaille depuis des années dans l'ombre et c'est le signe pour les victimes que les choses avancent : c'est l'espoir d'un possible procès un jour. Quelque 31 000 personnes ont déclaré souffrir d'effets secondaires à cause de la nouvelle formule du Levothyrox, en particulier des femmes de plus de 50 ans : fatigue extrême, douleurs dans les membres, maux de tête, vertiges, pertes de cheveux, dépressions lourdes parfois jusqu'au suicide.
Sylvie Chéreau avait fondé le tout premier collectif de victimes du Levothyrox, à une époque où on répondait aux malades que ce qui était en train de se produire était seulement un "emballement psychologique", une hystérie infondée émanant des réseaux sociaux. En apprenant la nouvelle de cette mise en examen, elle confie à franceinfo avoir "exulté de joie". "En arriver à une mise en examen, ça veut dire que le dossier est fondé. C'est une grande porte qui s'ouvre. Ouf ! On va enfin nous croire ! Ce sont des victimes qui se disent : cinq ans ont passé, et enfin aujourd'hui peut-être qu'il y a une lueur d'espoir sur la vérité. J'irai jusqu'au bout, je ne lâcherai pas, parce que moi, j'ai cru mourir avec ce médicament."
Même satisfaction pour Marie-Odile Bertella-Geffroy, avocate au barreau des Hauts-de-Seine en charge de plus de 3 000 patients dans cette affaire du Levothyrox et ancienne juge d’instruction au pôle de santé publique du tribunal de grande instance de Paris. "Les victimes n'espéraient plus après cinq ans. C'était vraiment long. Ce qui va venir ensuite – j'espère – ce sont des mises en examen pour 'blessures involontaires et homicides involontaires'."
Au titre du contrôle judiciaire, la juge a obligé mardi Merck à provisionner 11,3 millions d'euros en perspective d'un éventuel jugement, si le laboratoire devait payer une amende et des dommages et intérêts. Cette provision est de 4,3 millions d'euros pour une caution et 7 millions d'euros pour une garantie bancaire.
Cette mise en examen intervient dans le volet pénal de cette affaire Levothyrox. Au civil, la justice a déjà tranché en faveur des malades. Indépendamment de cette procédure pénale, Merck doit déjà indemniser 3 300 patients dont le préjudice moral a été reconnu en 2020 devant la justice civile. Le groupe a tenté tous les recours jusque devant la Cour de cassation mais son pourvoi a été rejeté en mars dernier. La condamnation est donc définitive et on sait que d'autres patients intentent les mêmes poursuites au civil dans de nombreuses régions de France.
De son côté, Merck souligne dans son communiqué que "cette mise en examen ne concerne en aucun cas la qualité de la nouvelle formule du Levothyrox". Selon l'avocat de Merck au pénal, maître Mario Stasi, "la juge a écarté les infractions les plus graves – blessures et homicides involontaires et mise en danger de la vie d'autrui – pour ne retenir que des manquements dans le plan de communication."
En 2017, le laboratoire a changé la formule du Levothyrox et de nombreux patients se sont plaints d’effets secondaires indésirables. La filiale française du laboratoire Merck a annoncé sa propre mise en examen dans le cadre du changement de formule du Levothyrox.
JUSTICE - Elle l’a annoncée elle-même dans un communiqué publié ce mercredi 19 octobre. La filiale française du laboratoire pharmaceutique allemand Merck a fait savoir sa propre mise en examen pour « tromperie aggravée » dans le volet pénal du dossier du changement de formule du médicament Levothyrox, prescrit contre l’hypothyroïdie. « Le président de Merck en France a été entendu » mardi au pôle santé du tribunal judiciaire de Marseille, peut-on lire dans le communiqué. La mise en examen est liée aux « modalités d’information mises en place au moment de la transition de l’ancienne à la nouvelle formule en 2017. »
La nouvelle composition de ce médicament, modifiant certains de ses excipients afin d’apporter davantage de stabilité au produit, a été incriminée, entre mars 2017 et avril 2018, par quelque 31 000 patients souffrant d’effets secondaires indésirables : notamment de maux de tête, insomnies, ou de vertiges. Une enquête pénale pour tromperie aggravée, homicide et blessures involontaires avait été ouverte en 2018.
« Cette mise en examen ne concerne en aucun cas la qualité de la nouvelle formule du Levothyrox », mais uniquement la communication de l’entreprise au moment du changement de formule, assure cependant le laboratoire, soulignant vouloir « apporter toute précision nécessaire afin de faire établir qu’aucune infraction pénale, de quelque nature que ce soit, n’a été commise. »
Dans le volet civil du dossier, la Cour de cassation avait rejeté en mars le pourvoi du groupe, condamné en 2020 à indemniser plus de 3 300 utilisateurs ayant souffert d’effets secondaires à la suite du changement de formule.
Dans son arrêt, la plus haute juridiction française avait estimé que « lorsque la composition d’un médicament change et que cette évolution de formule n’est pas signalée explicitement dans la notice, le fabricant et l’exploitant peuvent se voir reprocher un défaut d’information », pouvant « causer un préjudice moral ».
"On avait raison, c'est un grand pas": les malades du Lévothyrox saluent un rapport d'expertise embarrassant pour le laboratoire Merck
Publié le 26 mai 2021 à 17h01 Par Christophe CIRONE
C'est une étape importante dans un long combat judiciaire. A Marseille, la juge d'instruction qui mène l'enquête pénale autour du Lévothyrox vient d'adresser aux plaignants un rapport d'expertise de 130 pages. Les détracteurs du laboratoire Merck y voient la confirmation de ce qu'ils dénoncent depuis quatre ans. Le géant pharmaceutique réfute ces critiques.
Mise en danger d'autrui, blessures involontaires, et même homicide involontaire. Tels sont les faits visés par l'instruction ouverte en 2017. Grosse fatigue, insomnies, perte de poids, de cheveux... Plusieurs milliers de malades de la thyroïde dénonçaient d'importants effets secondaires, imputés au changement de formule du Lévothyrox. Dans le collimateur : le géant allemand Merck, mais aussi l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM).
"Nous avions sollicité cette expertise", explique Me Jean-Denis Flori. Cet avocat au barreau de Nice représente l'association APLF, près de 200 plaignants et plusieurs collectifs, dont bon nombre sont azuréens. Pour Me Flori, l'expertise "démontre clairement que l'ancienne et la nouvelle formule du Lévothyrox ne sont pas le même médicament. Et que les deux ne sont pas interchangeables."
Parmi les points critiques : le remplacement du lactose par du Mannitol et de l'acide citrique.
"L'expertise contredit les conclusions de Merck, constate Me Flori. Ce n'est pas plus efficace, ni plus stable. Pire : ça n'agit pas de la même manière dans le corps humain !"
L'expertise conteste en outre le choix de la "bioéquivalence moyenne" pour comparer les deux formules. Pour Me Flori, "le protocole n'était pas adapté". Il demande à la juge l'audition des parties concernées. Audition qui pourrait déboucher sur une mise en examen.
Dans le scandale du Levothyrox, les associations de plaignants bataillent en ordre dispersé.
Me Anne-Catherine Colin-Chauley, avocate au barreau d'Ajaccio, et présidente de l'association Alerte Thyroïde à Mougins (qui dit représenter 1.500 plaignantes), critique aussi le protocole Merck. "Les analyses ont été menées sur trois jours, sur 200 personnes qui n'avaient pas de problème de thyroïde. Or il y a bien des problèmes physico-chimiques chez différentes personnes. On n'est pas tous constitués pareil..." L'ANSM, quant à elle, se serait "montrée un peu trop laxiste" à ses yeux.
Contacté, le laboratoire incriminé réfute toutes ces critiques. "Merck réitère toute sa confiance dans la nouvelle formule du Lévothyrox, aujourd’hui prise quotidiennement par près de deux millions et demi de patients en France et grâce à laquelle ils maintiennent leur équilibre thyroïdien", indique son service communication.
Merck regrette la diffusion de "quelques extraits du rapport" aux médias, dont Nice-Matin. Ce rapport, le laboratoire n'y a pas accès en l'état. Merck "déplore que l’instruction soit une fois de plus instrumentalisée par certains pour proférer, sur la base de données parcellaires, de nouvelles accusations qui sont autant d’accumulations de contre-vérités assénées au fil des années."
Quoi qu'il en soit, les détracteurs du laboratoire jubilent. "On avait raison. C'est un grand pas, un espoir pour les malades. Enfin, on va les entendre !", salue la Niçoise Paqueta Bonillo, victime et secrétaire générale de l'APLF. "Il n'y a pas d'effet placebo, comme on a voulu le prétendre. Ce n'était pas "dans notre tête". Le moindre changement perturbe tout le système stéroïdien du corps. Et non, le Lévothyrox ancienne formule n'est pas interchangeable."
L’ancienne formule du médicament contre l’hypothyroïdie Levothyrox, dont la distribution devait s’arrêter fin septembre, sera finalement disponible jusqu’à fin 2021, selon un courrier du ministère de la Santé diffusé par une association de patients ce lundi 1 août.
Plusieurs associations réclamaient cette prolongation, estimant que ni la nouvelle formule du Levothyrox commercialisée par le laboratoire Merck depuis 2017 ni aucun des autres médicaments comparables récemment mis sur le marché ne convenaient à certains patients.
A l’issue d’un comité de suivi tenu le 6 juillet au ministère de la Santé, “l’ANSM a demandé aux laboratoires Merck de tout mettre en oeuvre pour maintenir la spécialité Euthyrox en France au-delà de septembre 2020. (...) Les laboratoires Merck ont répondu favorablement à cette demande. Ainsi le maintien d’Euthyrox en France se poursuivra-t-il en 2021”, explique la Direction générale de la santé (DGS) dans un courrier daté de vendredi, diffusé par l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT). Jointe par l’AFP, la DGS a confirmé l’envoi de ce courrier.
Un “temps supplémentaire” pour changer de traitement
L’Euthyrox est un médicament “initialement destiné au marché russe, correspondant strictement à l’ancienne formule de la spécialité Levothyrox, et faisant l’objet d’une importation à titre temporaire”, rappelle le ministère.
Au premier trimestre 2020, environ 95.000 patients étaient encore traités avec cette ancienne formule, “soit 3,1% des 3 millions de patients traités par lévothyroxine”, le principe actif de ce médicament, estimait le ministère en juillet.
“Cette prolongation de distribution d’Euthyrox offrira aux patients concernés un temps supplémentaire pour amorcer le changement de traitement dès que possible pour une alternative thérapeutique pérenne”, estime la DGS dans son courrier.
“Un immense soulagement”
Une annonce qualifiée par l’AFMT d’“immense soulagement” pour les patients concernés, qui ”étaient menacés d’être brutalement privés du médicament qui leur convient”.
Selon l’association, il s’agit d’un “changement radical de position” des autorités sanitaires, car à l’issue du comité de suivi du 6 juillet, le ministère qualifiait la fin de la distribution de l’Euthyrox en septembre d’“irrévocable” et évoquait seulement la nécessité “d’accompagner l’arrêt de distribution de ce médicament”.
Lors de ce comité de suivi, les associations AFMT, UPGCS et VST avaient réitéré leur opposition à cet arrêt, et évoqué “le risque sanitaire majeur qu’il y aurait à mettre en oeuvre une telle substitution (de traitement, NDLR) en pleine période de Covid”, avec un accès aux soins encore perturbé.
Selon l’AFMT, la DGS leur a expliqué ce changement par “la situation sur le front du Covid” et le retard pris par Merck dans le basculement vers la nouvelle formule du Levothyrox notamment en Russie.
Des effets secondaires mais pas de “problèmes de santé graves”
La nouvelle formule du Levothyrox, modifiant certains de ses excipients afin d’apporter davantage de stabilité au produit, a été incriminée, entre mars 2017 et avril 2018, par quelque 31.000 patients souffrant de maux de tête, insomnies, vertiges, etc.
Une étude de pharmaco-épidémiologie menée par l’Agence du médicament (ANSM) sur plus de deux millions de patients a conclu en juin 2019 que le passage à la nouvelle formule du Levothyrox n’avait pas engendré de “problèmes de santé graves”.
En juin 2020, plus de 3.000 consommateurs de ce médicament ont obtenu en appel à Lyon la reconnaissance d’un manque d’information du fabricant allemand Merck concernant le lancement de la nouvelle formule, avec une indemnisation de 1000 euros au titre du préjudice moral.
e laboratoire Merck, producteur d’Euthyrox (le nom sous lequel est vendue l’ancienne formule du Levothyrox), ne fournira plus la France à partir de la rentrée 2020.
AFP
L'ancien Levothyrox disparaîtra des pharmacies en septembre (photo
Emmanuel Foudrot / Reuters
L'ancien Levothyrox disparaîtra des pharmacies en septembre (photo d'illustration)
SANTÉ - La fin de l’ancien Levothyrox a été repoussée à plusieurs reprises, mais cette fois semble être la bonne: cette version du médicament ne sera plus vendue en France à partir de septembre, après avoir été temporairement distribuée aux patients mécontents du changement de formule en 2017.
“Cela avait été reporté plusieurs fois, à fin 2018 puis à fin 2019, mais là, la date butoir semble bien actée”, a réagi auprès de l’AFP Beate Bartès, de l’association de patients Vivre sans thyroïde, qui a désormais “assez peu d’espoir”.
L’annonce a été faite par le ministère de la Santé après la septième réunion du comité de suivi sur ce médicament pour la thyroïde, dont le changement de formule avait été accusé par des milliers de patients de provoquer des effets indésirables (maux de tête, insomnies, vertiges...).
“Un arrêt définitif”
“Le laboratoire (Merck) producteur d’Euthyrox (nom sous lequel est vendue l’ancienne formule du Levothyrox, ndlr) a informé les autorités sanitaires de la fin de distribution de ce produit en France en septembre 2020”, a indiqué le ministère dans un communiqué.
“La décision a été prise conjointement avec le ministère”, a précisé à l’AFP Valérie Leto, pharmacien responsable de Merck France. Le laboratoire se dit incapable d’assurer l’approvisionnement au-delà: “C’est vraiment un arrêt définitif”.
Selon le ministère, “plus de 110.000 patients sont traités par Euthyrox, soit 3,7% des 3 millions de patients traités par lévothyroxine”, la substance active de ce médicament pour la thyroïde.
Mais selon Merck, ce chiffre, qui date du troisième trimestre 2019, est “obsolète”: “Selon les derniers chiffres en notre possession, environ 88.000 patients sont actuellement sous Euthyrox”.
Cinq concurrents disponibles
A l’inverse, Bartès juge que ce nombre pourrait monter à 150 voire 200.000 patients, en comptant ceux qui s’approvisionnent à l’étranger.
La polémique autour du Levothyrox a éclaté en 2017 après le changement de formule, qui concernait certains des excipients du médicament (et pas la substance active). Son objectif, selon le laboratoire: renforcer la stabilité du produit.
Les protestations des patients mécontents ont poussé le gouvernement à demander fin 2017 l’importation de l’ancienne formule (sous le nom d’Euthyrox), ainsi que l’arrivée sur le marché de produits concurrents du Levothyrox, jusque-là en situation de quasi-monopole.
Cinq sont disponibles à ce jour (L-thyroxin Henning, Thyrofix, L-thyroxine SERB, TCAPS et TSOLUDOSE, les deux derniers n’étant pas remboursés). Selon les chiffres officiels, le marché est dominé par la nouvelle formule du Levothyrox (76% des patients), suivie du L-thyroxin Henning (19%).
La liste des endroits où l’ancien Levothyrox est toujours disponible se réduit: en comptant la France, premier à avoir sauté le pas, quinze pays d’Europe sont aujourd’hui passés à la nouvelle formule, selon Merck. C’est pourquoi l’Euthyrox, précédemment importé d’Allemagne, l’a été de Russie fin 2019.
Pas de “problèmes de santé graves”
“A terme, il est prévu qu’au niveau mondial, l’ancienne formule soit remplacée par la nouvelle, en fonction des décisions et des autorisations que nous recevrons des autorités”, a souligné Mme Leto.
Le ministère de la Santé publiera en février des recommandations destinées aux médecins, pharmaciens et patients “pour les accompagner dans tout changement” de traitement.
Selon une étude menée sur plus de deux millions de patients, publiée en juin par l’Agence du médicament ANSM, le passage à la nouvelle formule du Levothyrox n’a pas engendré de “problèmes de santé graves”.
D’après les rapports de pharmacovigilance de l’ANSM, 31.000 signalements d’effets indésirables ont été déposés entre mars 2017 et avril 2018. Les associations assurent que davantage de malades sont concernés.
L’affaire fait en outre l’objet de procédures judiciaires. Au pénal, elle est instruite par le pôle santé du tribunal de Marseille.
Au civil, le procès en appel a eu lieu mardi à Lyon et la décision a été mise en délibéré au 9 avril. Ce procès oppose Merck à quelque 3.300 malades, qui l’accusent de les avoir mal informés lors du changement de formule. En première instance, les plaignants avaient été déboutés.
Deux publications récentes mettent en cause l'étude de bioéquivalence qui a permis à Merck de remplacer l'ancienne formule du Levothyrox par la nouvelle en 2017. Les moyennes obtenues lors de cette étude masqueraient la réalité des situations individuelles.
En France, environ 2,5 millions de personnes prennent de la lévothyroxine, en grande majorité sous la forme de Levothyrox. Une nouvelle formule de ce médicament est arrivée dans les pharmacies en mars 2017. Seuls les excipients changeaient, le lactose de l'ancienne formule étant remplacé par le mannitol et l'acide citrique. Ce changement de formule a été justifié par le souci d'avoir une meilleure stabilité du produit.
Suite à l'arrivée du nouveau Levothyrox, des milliers de patients ont déclaré des effets secondaires. L'affaire est même arrivée devant la justice, avec une action collective au tribunal de Lyon, mais les plaignants ont été déboutés de leur demande. En parallèle, l'ANSM a considéré que seul 1,43 % des patients avaient déclaré des effets secondaires.
Cependant, les travaux d'une équipe franco-britannique semblent donner raison aux patients. Ils ont fait l'objet de deux publications scientifiques. Les chercheurs des universités de Toulouse et de Londres se sont intéressés à l'étude de bioéquivalence réalisée par Merck pour savoir si l'ancienne et la nouvelle formule du Levothyrox étaient interchangeables. Avant de commencer un traitement avec la lévothyroxine, un dosage des hormones thyroïdiennes est généralement préconisé pour estimer la bonne dose de médicament nécessaire. Si les deux formules de Levothyrox sont bien équivalentes, alors les patients peuvent passer de l'une à l'autre sans problème.
L'étude de bioéquivalence a inclus 204 personnes en bonne santé, âgées de 18 à 50 ans (59 % d'hommes). Pour savoir si les deux formulations étaient équivalentes, les volontaires ont pris une des deux formules, l'ancienne ou la nouvelle, et les variations de l'hormone ont été mesurées dans le sang. Plus tard, les scientifiques ont testé l'autre formule pour comparer et sont arrivés à la conclusion que l'ancien médicament pouvait être remplacé par le nouveau.
Un premier article paru dans la revue Clinical Pharmacokinetics a critiqué cette étude de Merck. En effet, les auteurs relèvent que chez plus de la moitié des participants, la bioéquivalence du produit n'était pas établie : le caractère substituable du médicament n'est donc pas démontré chez eux !
Plusieurs hypothèses pourraient expliquer que certaines personnes développent des effets secondaires. Par exemple, chez les patients, l'absorption du médicament peut être différente par rapport à des sujets en bonne santé. De plus, le mannitol, excipient présent dans la nouvelle formule et absent de l'ancienne, influencerait la fonction intestinale et donc la biodisponibilité de la lévothyroxine.
Dans un nouvel article paru cette semaine, la même équipe s'interroge sur le fait que Merck ait inclus plus de 200 personnes dans cette étude. En effet, ce type d'étude de bioéquivalence se réalise souvent sur bien moins de sujets. Or d'après Pierre-Louis Toutain, un des auteurs de cette recherche, plus le nombre de participants est important, plus il est facile d'obtenir un résultat qui entre dans l'intervalle de confiance fixé (0,9-1,1) : « Si on avait pris un nombre classique de sujets (entre 24 et 48, mais pas 200), ce ne serait pas passé. » L'intervalle de confiance donne un degré de sûreté du résultat. Un intervalle de confiance restreint à 0,9-1,1 semble assurer une certaine sécurité du résultat, mais ce choix « est annulé par le fait que l'on prend beaucoup de sujets ».
Ce qu'il faut retenir
Avant le changement de formule de Levothyrox, Merck a réalisé une étude de bioéquivalence sur plus de 200 personnes.
Une équipe franco-britannique signale que dans cette étude le médicament n’était pas substituable chez plus de la moitié des sujets.
Les études de bioéquivalence sont généralement réalisées sur des échantillons plus petits.
SANTÉ - Le passage à la nouvelle formule de Levothyrox n’a pas provoqué de “problèmes de santé graves” en particulier pas plus d’hospitalisations, y compris chez ceux qui se sont tournés vers les alternatives à ce médicament pour la thyroïde, selon le rapport final d’un vaste étude sur plus de 2 millions de patients, publié jeudi 13 juin par l’Agence du médicament (ANSM).
Les résultats de cette étude de pharmaco-épidémiologie, annoncée en décembre 2018 par le ministère de la Santé, ont permis d’analyser le nombre de décès, d’hospitalisations et d’arrêts de travail d’au moins sept jours, ainsi que la consommation de médicaments entre avril et juin 2017 (à l’arrivée de la nouvelle formule) en les comparant à la période d’avril à juin 2016 pour les patients prenant l’ancienne formule.
L’analyse a fait suite à la vague de déclarations d’effets indésirables inexpliqués qui avait suivi l’introduction par le laboratoire Merck, au printemps 2017, de la nouvelle version du Levothyrox, modifiant certains de ses excipients et destinée à apporter davantage de stabilité au produit.
L’étude n’a pas mis en évidence d’augmentation de problèmes de santé graves (décès, hospitalisations, arrêts de travail...) ni de consommation de médicaments destinés à traiter des symptômes déclarés (antidouleurs, corticoïdes, antimigraineux, antivertigineux, antidiarrhéiques...) en lien avec le passage à la nouvelle formule du Levothyrox en France.
En revanche, elle montre “une nette augmentation” des consultations équivalant à 360.000 consultations supplémentaires pour l’ensemble de la population traitée en France (quelque trois millions, majoritairement des femmes).
À ces consultations, particulièrement de généralistes et d’endocrinologues, concentrées sur la période d’août à octobre 2017, s’ajoute une hausse relative de l’utilisation de certains médicaments comme les benzodiazépines (pris généralement pour dormir ou contre l’anxiété, ndlr).
Dans l’étude, le risque de décès ne différait pas statistiquement entre les deux groupes “6355 dans le groupe nouvelle formule (0,6%) et 6387 dans le groupe ancienne formule (0,6%)”.
Les résultats complémentaires confirment les résultats principaux qui ne sont pas en faveur d’une toxicité propre de la nouvelle formule du Levothyrox, relève le docteur Rosemary Dray-Spira, épidémiologiste, co-auteure du rapport réalisé avec l’Assurance maladie/Cnam.
Consommation d’un peu plus de médicaments
Des analyses complémentaires concernent le groupe de patients (18%) qui ont arrêté la nouvelle formule fin 2017 pour prendre un autre médicament. “Chez eux non plus il n’y a pas eu plus d’hospitalisation”, remarque Rosemary Dray-Spira. “Ils ont en revanche consommé un peu plus de médicaments, mais dans des proportions qui restent modestes”.
2% ont arrêté la nouvelle formule, avec un arrêt dans leurs remboursements d’un traitement par hormone thyroïdienne.
À partir d’octobre 2017, des alternatives (L-Thyroxin Henning, Thyrofix, Tcap) au Levothyrox, sont devenues disponibles.
Dans l’ensemble, la nouvelle formule a entraîné une nette augmentation (+31%) de la fréquence des dosages de TSH, qui contribue à surveiller et adapter le traitement.
Extrapolé aux trois millions de patients traités, le nombre de dosages supplémentaires en 2017 est de “l’ordre de 1.080.000”.
L’AFMT pas surprise
Philippe Sopena, conseiller médical de l’Association française des malades de la thyroïde (AFMT), ne l’entend pas de cette oreille. Contacté par Franceinfo ce vendredi 14 juin, il estime que la parole des victimes est à nouveau minimisée. “En plus, ce sont des femmes, pas de chance! 85% de femmes, plus de 60 ans : typiquement le genre de personnes qui ne sont pas branchées sur internet, que l’on n’écoute pas. Cela faisait trente ans que l’on avait un médicament qui fonctionnait merveilleusement bien avec zéro plainte”, souligne-t-il.
Il estime par ailleurs que le changement de formule a été une “expérimentation grandeur nature”. Et qu’aujourd’hui, “nous sommes aujourd’hui à probablement un million de patients, sur trois millions qui la prenaient, qui ont abandonné la nouvelle formule. C’était des gens qui prenaient ce traitement depuis 30 ans, 15 ans, 5 ans… Ce n’était pas facile de trouver des alternatives. S’ils ont cherché à prendre autre chose, c’est qu’ils n’étaient pas bien.”
Me Jean-Denis Flori, qui défend les intérêts de 200 victimes présumées du Levothyrox, a déposé une requête auprès du juge d'instruction du pôle "santé" de Marseille qui enquête du chef "d'homicides involontaires, tromperie aggravée, blessures involontaires et mise en danger d’autrui."
Depuis avril 2017, des patients se plaignent d’effets secondaires parfois très invalidants de la nouvelle formulation du Levothyrox, médicament pris par trois millions de malades de la thyroïde.
La communauté médicale, longtemps dubitative, évoque un effet "nocebo" voire une hystérie collective amplifiée par les médias.
De fait, les associations qui menaient la fronde et réclamaient le retour à la nouvelle formule avaient du mal à apporter des arguments scientifiques.
Mais voilà qu’une étude publiée le 4 avril par la revue "Clinical Pharmacokinetics" rebat les cartes et donne raison aux patients.
Oui, la nouvelle formule du Levothyrox peut provoquer des effets indésirables chez certains malades, concluent des chercheurs en réanalysant les données du fabricant, le laboratoire Merck.
Non, les deux produits, pourtant bioéquivalents, "ne sont pas forcément interchangeables pour tous les patients."
Fort de ces conclusions, Me Jean-Denis Flori, demande que le juge interroge Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, le directeur de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) , et les chercheurs.
L'avocat s'interroge notamment sur le sérieux et l'indépendance de l'ANSM.
Une analyse statistique publiée dans une revue médicale affirme que la nouvelle formule du médicament pourrait avoir causé les effets indésirables ressentis par plusieurs malades de la thyroïde.
Des malades de la thyroïde affirment depuis des mois que le changement de formule du Levothyrox a engendré des dérèglements de leur équilibre hormonal.
SANTÉ - L’évaluation faite par le laboratoire Merck pour mettre sur le marché en 2017 la nouvelle version du Levothyrox ne prenait pas suffisamment en compte les variations possibles des effets du médicament d’un patient à un autre, selon une étude parue jeudi 4 avril.
Ces variations individuelles pourraient expliquer les effets indésirables ressentis avec la nouvelle formule de ce traitement pour la thyroïde dont se sont plaints plusieurs dizaines de milliers de patients, selon cette analyse publiée dans la revue spécialisée Clinical Pharmacokinetics.
Cela pourrait en particulier expliquer que les symptômes rapportés apparaissent contradictoires, relevant tantôt de l’hypothyroïdie tantôt de l’hyperthyroïdie, évoquant des sous et surdosages. Des plaintes parfois attribuées à un effet “nocebo” (apparition d’effets indésirables d’origine psychologique), au grand dam des patients.
Un nouveau médicament plus difficilement absorbable par certains patients?
Dans cet “article d’opinion” publié dans la revue, le professeur biostatisticien Didier Condorcet (Toulouse, Inra/Ecole nationale vétérinaire) et des collègues français et britanniques ont repris l’analyse des essais de “bioéquivalence” moyenne réalisés par le laboratoire allemand Merck et mis en ligne par l’Agence du médicament (ANSM) en 2017 par souci de transparence.
Ce type de tests est recommandé par l’Union européenne et conçu au départ pour pourvoir commercialiser des génériques. En dépit du fait que les résultats ont été jugés satisfaisants, permettant ainsi de remplacer l’ancienne formule de ce médicament par la nouvelle, les reproches des patients ont afflué en France.
Les chercheurs observent que “plus de 50% des 204 volontaires” sains qui ont participé à cet essai réglementaire se situaient en réalité en dehors de la plage de bioéquivalence, c’est-à-dire en dehors de la norme acceptée basée sur des moyennes statistiques.
Par conséquent, ils s’interrogent sur “l’aptitude” de ce type d’essai de bioéquivalence moyenne à garantir que nouvelles et anciennes formulations de l’hormone thyroïdienne lévothyroxine soient substituables chez les patients. Le changement d’excipients -le lactose a été remplacé notamment par le mannitol- serait susceptible d’altérer l’absorption du médicament chez certains patients, relèvent-ils.
Merck se défend et assure avoir suivi les procédures
En mars 2017, à la demande des autorités françaises, une nouvelle formulation de Levothyrox a été homologuée dans le but d’éviter des problèmes de stabilité de l’ancienne formulation.
Le laboratoire Merck a réagi à la parution de cet article en indiquant que dans les autres pays, “les lancements de la nouvelle formule de Lévothyrox, en Suisse et en Turquie, se sont très bien déroulés, sans problématique d’effets secondaires particuliers et sans changement de traitements pour les patients”.
Merck ajoute que “des experts indépendants se sont penchés sur ces études (de “bioéquivalence moyenne”) et ont conclu à la pertinence et à la rigueur scientifique de l’approche”. “L’objectif des études de bioéquivalence est de démontrer que les deux formules se comportent de façon identique dans l’organisme, et n’ont pas pour but d’évaluer leur tolérance.”
Une méthodologie contestée
“La nouvelle formule satisfait plus de 2,5 millions de patients en France (sur 3 millions de patients sous traitement de produit à base de lévothyroxine)”, ajoute le laboratoire.
Par ailleurs, la méthodologie de cette étude, qui est présentée d’emblée comme un article “d’opinion” a été contestée après la parution de l’article. Certains dénoncent notamment la méthode statistique employée dans le cadre de l’analyse.
Entre les patients traités avec l’ancienne formule du Levthyrox et ceux qui reçoivent la nouvelle, il n’y aurait ainsi que des différences négligeables observables mathématiquement.
La justice a débouté mardi les 4.113 malades de la thyroïde qui avaient assigné le laboratoire Merck pour "défaut d'information" autour du changement de formule de son médicament Levothyrox.
Sur la demande principale "tendant à établir l'existence d'une faute délictuelle" du laboratoire allemand, le Tribunal d'instance de Lyon a débouté les plaignants, estimant notamment que Merck avait œuvré dans les règles et de concert avec les autorités sanitaires françaises.
Le tribunal a également retenu dans son jugement que "la qualité et la valeur thérapeutique du médicament nouvelle formule" étaient "certaines" et que sa notice contenait des informations "suffisamment précises et pertinentes" pour les patients concernés.
La justice estime ainsi que le laboratoire n'a commis aucune faute. "Le juge a reconnu la pertinence, au regard du cadre réglementaire en vigueur, du dispositif d'information mis en place lors de la transition, entre mars et septembre 2017, de l'ancienne à la nouvelle formule du Levothyrox", s'est félicité le directeur juridique de la filiale française Florent Bensadoun dans un communiqué.
La nouvelle formule du Levothyrox, prescrit contre l'hypothyroïdie, a été incriminée, entre mars 2017 et avril 2018, par quelque 31.000 patients victimes d'effets secondaires (fatigue, maux de tête, insomnies, vertiges, etc.).
Au cours de l'audience, délocalisée le 3 décembre dans un centre de congrès de la banlieue de Lyon en raison du très grand nombre de requérants, les avocats des plaignants regroupés dans une action collective via une plateforme en ligne avaient réclamé une indemnisation de 10.000 euros pour chacun d'eux, soit plus de 41 millions au total.
L'affaire fait par ailleurs l'objet, au pénal, d'une information judiciaire contre X instruite par le pôle santé du TGI de Marseille.
Ouverte le 2 mars 2018 pour tromperie aggravée, blessures involontaires et mise en danger de la vie d'autrui, elle a été élargie depuis par le parquet au chef "d'homicide involontaire".
Au total, trois millions de patients prennent ce médicament en France (premier marché mondial) et 2,5 millions de malades utilisent la nouvelle formule, selon Merck.
La France a été le premier pays où la nouvelle formule a été introduite.
Depuis, la Suisse a suivi sans rencontrer de difficultés et Merck a prévu de la lancer dans 21 pays de l'Union européenne.
La justice a débouté mardi les 4.113 malades de la thyroïde qui avaient assigné le laboratoire Merck pour "défaut d'information" autour du changement de formule de son médicament Levothyrox. Anne-Catherine Colin-Chauley, la présidente de l'association Alerte Thyroïde, se dit déçue mais pas étonnée par cette issue.
Elle avait déposé la première plainte en France contre le laboratoire Merck, fin août 2017, pour "mise en danger de la vie d'autrui". La Mouginoise Anne-Catherine Colin-Chauley, avocate au barreau d'Ajaccio, a réagi ce mardi après-mardi après le déboutement des 4.113 malades qui avaient assigné le laboratoire Merck.
Un jugement "bien malheureux pour tous les patients qui se sont engouffrés dans ce genre de procédure mais ceci était prévisible, explique-t-elle à Nice-Matin. Car le défaut d'information provient de l'ANSM (agence nationale de sécurité du médicament, NDLR) et non du laboratoire Merck".
Selon elle, il aurait été "plus judicieux de solliciter l'annulation du brevet nouvelle formule pour manque d'action inventive par rapport à l'ancienne formule", voire aller "au pénal pour tromperie sur le médicament".
RELIRE. La justice a tranché, les milliers de victimes du médicament Levothyrox ne seront pas indemnisées
Le Tribunal d'instance de Lyon a débouté ce mardi matin les plaignants, estimant notamment que le laboratoire Merck avait œuvré dans les règles et de concert avec les autorités sanitaires françaises.
Aucune faute du laboratoire
Le tribunal a également retenu dans son jugement que "la qualité et la valeur thérapeutique du médicament nouvelle formule" étaient "certaines" et que sa notice contenait des informations "suffisamment précises et pertinentes" pour les patients concernés.
La justice a ainsi estimé que le laboratoire n'avait commis aucune faute.
La nouvelle formule du Levothyrox, prescrit contre l'hypothyroïdie, a été incriminée, entre mars 2017 et avril 2018, par quelque 31.000 patients victimes d'effets secondaires (fatigue, maux de tête, insomnies, vertiges, etc.).
Au cours de l'audience, délocalisée le 3 décembre dans un centre de congrès de la banlieue de Lyon en raison du très grand nombre de requérants, les avocats des plaignants regroupés dans une action collective via une plateforme en ligne avaient réclamé une indemnisation de 10.000 euros pour chacun d'eux, soit plus de 41 millions au total.
L'affaire fait par ailleurs l'objet, au pénal, d'une information judiciaire contre X instruite par le pôle santé du TGI de Marseille. Ouverte le 2 mars 2018 pour tromperie aggravée, blessures involontaires et mise en danger de la vie d'autrui, elle a été élargie depuis par le parquet au chef "d'homicide involontaire".
Les utilisateurs du Levothyrox ont-ils été suffisamment informés sur le changement de formule du médicament de Merck, soupçonné de leur avoir occasionné des troubles ? La justice tranche mardi dans le volet civil de ce vaste dossier.
A l'audience, le 3 décembre près de Lyon où le groupe pharmaceutique allemand a son siège français, les avocats de 4.113 malades de la thyroïde ayant utilisé ce traitement ont réclamé une indemnisation de 10.000 euros pour chacun d'eux.
"J'accuse Merck de savoir que le changement de formule allait avoir des conséquences néfastes, de faire peu de cas des malades et de privilégier les intérêts financiers de ses actionnaires", a lancé Me Christophe Lèguevaques devant le tribunal d'instance, délocalisé pour l'occasion dans un centre de congrès à Villeurbanne en raison d'une nombreuse assistance - quelque 200 requérants étaient présents au procès, en majorité des femmes.
"Depuis le début, nous disons que le sujet ce n'est pas le médicament mais l'information autour du médicament", a poursuivi Me Lèguevaques.
Mise sur le marché au printemps 2017, une nouvelle formule du Levothyrox, prescrit contre l'hypothyroïdie et fabriqué par le laboratoire Merck Serono, a été incriminée, entre mars 2017 et avril 2018, par quelque 31.000 patients victimes d'effets secondaires (fatigue, maux de tête, insomnies, vertiges, etc.).
Le fabricant nie toute sous-information: un plan de communication "extrêmement large", consistant en l'envoi de "300.000 communications par courrier, fax et mail auprès de 100.000 professionnels de santé", avait été engagé au moment du lancement en France, fait-il valoir.
L'un des avocats du laboratoire, Me Jacques-Antoine Robert, a assuré dans sa plaidoirie que "pas une réglementation n'a été violée", tout en critiquant l'action collective lancée par la partie adverse. "Dans 200 dossiers, il y a zéro pièce. Des milliers d'autres sont incomplets et pour 800, il y a lieu de se poser la question", a estimé le conseil, hué à la clôture des débats.
Selon l'agence du médicament (ANSM) qui avait réclamé la nouvelle formule du Levothyrox à Merck dès 2012 - afin, selon elle, de rendre le produit plus stable - quelque 2,2 millions de malades de la thyroïde suivent ce traitement.
Avec l'ancienne formule, la teneur en lévothyroxine (une hormone de synthèse) pouvait varier d'un lot à l'autre, voire au sein du même lot avec le temps. Le changement apporté ne porte pas sur le principe actif mais sur d'autres substances, les excipients. Principale modification: le lactose a été remplacé par le mannitol, très courant dans l'alimentation et d'autres médicaments.
Trois rapports de pharmacovigilance successivement remis à l'ANSM n'ont pas permis de percer le mystère des effets indésirables dénoncés par les victimes.
Le 20 décembre, le ministère de la Santé a fait état d'une étude selon laquelle la prise du nouveau Levothyrox n'a pas entraîné "d'augmentation de problèmes de santé graves" mais s'est traduite par une "augmentation notable" des consultations médicales. Il a ajouté que des analyses réalisées par l'ANSM sur de nouveaux lots de médicaments confirmaient leur "bonne qualité".
Autant de conclusions contestées par l'Association française des malades de la thyroïde (AFMT), pour qui le doute doit persister compte tenu de l'ampleur des signalements.
La France a été le premier pays où la nouvelle formule a été introduite. Depuis, la Suisse a suivi, sans connaître pareille crise. Merck a prévu de la lancer dans 21 pays de l'Union européenne, après "avis positif" des instances sanitaires, tout en continuant à fournir l'ancienne formule - importée d'Allemagne sous le nom d'Euthyrox - aux patients français en 2019.
L'affaire fait aussi l'objet, au pénal, d'une information judiciaire contre X instruite par le pôle santé du tribunal de grande instance de Marseille. Ouverte le 2 mars 2018 pour tromperie aggravée, blessures involontaires et mise en danger de la vie d'autrui, elle a été élargie depuis par le parquet au chef "d'homicide involontaire".
Objective To estimate the prevalence of hypothyroidism in a population of patients with Ménière's disease (MD).
Design Retrospective case-control study comparing the use of thyroid hormone supplements between patients with MD and controls.
Setting Outpatient neurology clinic specializing in the management of patients experiencing dizziness.
Patients Fifty patients who met the 1995 American Academy of Otolaryngology criteria for MD and 50 controls matched for age and sex also experiencing dizziness.
Results The 50 patients who met the criteria for MD were identified from a database of more than 2000 patients with dizziness seen over a 5-year period. Of these, 16 (32%) were taking thyroid hormone supplements in contrast to 2 (4%) of the 50 matched controls (P<.001). The median age of the patients with MD was 60 years, and 5 (19%) of the 26 patients younger than 60 years were taking thyroid hormone supplements, compared with 11 (46%) of 24 patients 60 years or older (P<.05). There were no statistically significant differences in the severity of hearing loss, pattern of hearing loss, or prevalence of bilateral hearing loss between patients with MD who were taking thyroid hormone supplements and patients with MD who were not.
Conclusion Ménière's disease is associated with corrected hypothyroidism.
L'enquête sur le Levothyrox a été élargie pour "homicide involontaire" depuis le 30 novembre 2018 après le décès d'une femme, annonce lundi le parquet de Marseille. Jusqu'à présent, l'enquête sur le médicament ne portait que sur la mise en danger de la vie d'autrui.
Le parquet de Marseille a élargi l'enquête du Levothyrox pour "homicide involontaire", a appris lundi 4 février franceinfo auprès du procureur de la République de Marseille, Xavier Tarabeux. "Nous avons pris des réquisitions supplétives du chef d'homicide involontaire le 30 novembre 2018", précise le procureur. Une décision qui intervient après le décès d'une femme. Jusqu'à présent les investigations concernant le médicament controversé de la thyroïde étaient ouvertes pour "mise en danger de la vie d'autrui".
"Une nouvelle dimension du dossier"
C'est "un véritable tournant dans ce dossier" selon David-Olivier Kaminski, avocat au barreau de Paris chargé de 200 dossiers sur le Levothyrox. "Certains politiques notamment estimaient qu'il ne s'agissait pas d'une crise sanitaire et avaient minoré les plaintes des victimes. En réalité, il apparaît que la justice enquête maintenant sur la possibilité que ce nouveau Levothyrox ait pu provoquer - de manière involontaire - un homicide."
"C'est une nouvelle dimension à ce dossier, c'est une dimension bien sûr de gravité, c'est une dimension de crise sanitaire et enfin je pense que maintenant les pouvoirs publics doivent prendre plus qu'au sérieux la réalité de ce dossier et des plaintes", a poursuivi l'avocat.
La mort provoquée par le médicament ?
"Un médicament, c'est bien sûr fait pour soigner mais en l'espèce, la nouvelle formule du Levothyrox a pu dérégler, a pu abîmer des gens, a pu porter atteinte à leur santé, à ce qui fait leur intégrité physique - puisqu'il y a également l'infraction de blessure dans ce dossier - et on découvre qu'il est possible que la mort ait été provoquée par la prise de ce médicament."
"La situation évolue vraiment sur le fond de l'affaire, sur la dimension de l'affaire, sur le retentissement de l'affaire et sur la gravité de ce dossier [...] On doit faire confiance à l'institution judiciaire pour qu'au plus vite l'étendue des responsabilités et le rôle de chacun puissent être appréciés et qu'on se retrouve en face d'indemnisations pour celles et ceux qui subissent un préjudice", a-t-il conclu.
Le passage à la nouvelle formule du Levothyrox ne semble pas avoir provoqué d'augmentation des "problèmes de santé graves" mais s'est malgré tout traduit par une "augmentation notable" des consultations médicales chez les patients, a annoncé jeudi le ministère de la Santé.
Les résultats d'une vaste étude portant sur plus de deux millions de patients utilisant le Levothyrox "ne mettent pas en évidence d'augmentation de problèmes de santé graves" en lien avec la prise de la nouvelle formule de ce médicament pour les troubles de la thyroïde, affirme le ministère dans un communiqué.
L'étude, présentée au ministère dans la matinée, a analysé le nombre de décès, d'hospitalisations et d'arrêts de travail d'au moins sept jours, ainsi que la consommation de médicaments entre avril et juin 2017 (juste après l'arrivée de la nouvelle formule) en les comparant à la période d'avril à juin 2016 (lorsque l'ancienne formule était encore délivrée).
Cette analyse, menée par l'Agence du médicament (ANSM), fait suite à la vague de déclarations d'effets indésirables inexpliqués qui avait suivi l'introduction par le laboratoire Merck, au printemps 2017, d'une nouvelle version de ce médicament, modifiant certains de ses excipients et destinée à apporter davantage de stabilité au produit.
Ces données montrent en revanche une "augmentation notable" (360.000 consultations supplémentaires) des consultations parmi les personnes ayant utilisé le Levothyrox nouvelle formule en 2017, ajoute le ministère.
"Elle a tout particulièrement concerné les recours auprès de médecins généralistes et d'endocrinologues et s'est concentrée sur la période d'août à octobre 2017."
Cette étude représente "de gros moyens pour peu de résultats", a déploré dans un communiqué l'Association française des malades de la thyroïde (AFMT), présente au comité de suivi au ministère.
RELIRE. Lévothyrox: une Azuréenne dépose plainte pour mise en danger de la vie d'autrui
Un déclin des ventes de la nouvelle formule
Certes, elle montre que "le passage à la nouvelle formule n'a pas déclenché une vague de décès", mais "nul ne l'avait jamais prétendu", argumente-t-elle, expliquant qu'une dizaine de décès supplémentaires par rapport au nombre de décès prévisibles "ne seraient pas statistiquement significatifs mais bien réels pour autant".
L'association affirme aussi que à la fin de la période analysée (fin 2017), plus de 15% des patients intégrés dans l'étude avaient abandonné la nouvelle formule du Levothyrox pour l'une des alternatives disponibles, ce qui n'a pas été pris en compte par les auteurs.
Le nombre de patients qui optent pour un autre traitement que le Levothyrox a continué à augmenter en 2018, montrent également les chiffres de ventes dans les pharmacies, également présentés jeudi.
Le Levothyrox nouvelle formule, qui détenait encore près de 90% de parts du marché français fin 2017 a décliné à 82% au premier trimestre 2018 puis 80% au deuxième trimestre, au profit principalement du médicament commercialisé par Sanofi-Aventis, la L-Thyroxin Henning (17% du marché).
RELIRE. Levothyrox: des patients alertent sur les effets indésirables de la nouvelle formule du médicament
Deux laboratoires mobilisés
"S'ils l'ont fait, c'est parce qu'ils n'étaient pas satisfaits avec la nouvelle formule", estime l'AFMT.
Des analyses réalisées par l'ANSM sur de nouveaux lots de médicaments "confirment la bonne qualité de la nouvelle formule du Levothyrox", ajoute le ministère.
Des conclusions contestées par l'AFMT, qui estime que face à l'ampleur de la crise constituée par ces effets indésirables inexpliqués, l'absence d'anomalies retrouvées dans les analyses "ne peut en aucune façon permettre de garantir la qualité" du médicament.
L'association a présenté au cours du comité les résultats des analyses menées par un chercheur du CNRS "qui a trouvé des différences structurelles significatives entre les comprimés" de l'ancienne formule et ceux de la nouvelle.
Après avoir déjugé en octobre son chercheur, qui avait mené ces travaux de sa propre initiative, le CNRS "a mobilisé deux de ses laboratoires pour vérifier et préciser les résultats obtenus", affirme l'AFMT.
La justice a commencé lundi 3 décembre à aborder le volet civil de ce dossier exceptionnel à Villeurbanne, près de Lyon.
"C'est un dossier exceptionnel car il regroupe 4.113 personnes et c'est un dossier exceptionnel par les questions posées", a lancé au début de sa plaidoirie l'avocat des plaignants, Me Christophe Lèguevaques, du barreau de Toulouse.
Cette action collective, lancée le 24 octobre 2017, vise à faire reconnaître un "défaut d'information" de la part du fabricant allemand du traitement Merck, dont le siège français est à Lyon. Et aussi un "préjudice d'angoisse" des plaignants, qui réclament chacun une indemnité de 10.000 euros.
"J'accuse Merck de savoir que le changement de formule allait avoir des conséquences néfastes, de faire peu de cas des malades et de privilégier les intérêts financiers de ses actionnaires sur les malades", a plaidé Me Lèguevaques.
"Exception d'incompétence"
L'audience, organisée dans un centre de congrès à Villeurbanne (Rhône) en raison du très grand nombre de requérants, a commencé par une "exception d'incompétence" soulevée par un des avocats de Merck, Me Jacques-Antoine Robert.
Celui-ci a estimé que l'affaire devait être renvoyée devant le tribunal de grande instance, seul habilité à se prononcer sur les préjudices corporels, réfutant le "préjudice moral pur", plaidé par la partie adverse devant le tribunal d'instance.
"Depuis le début, nous disons que le sujet ce n'est pas le médicament mais l'information autour du médicament", a rétorqué Me Lèguevaques.
L'affaire fait par ailleurs l'objet, au pénal, d'une information judiciaire contre X instruite par le pôle santé du TGI de Marseille.
plan de communication "extrêmement large"
Mise sur le marché au printemps 2017, une nouvelle formule du Levothyrox, prescrit contre l'hypothyroïdie et fabriqué par le laboratoire Merck Serono, filiale du groupe allemand, a été incriminée par quelque 31.000 patients victimes d'effets secondaires (fatigue, maux de tête, insomnies, vertiges, etc.).
Le laboratoire, qui plaide lundi après-midi et compte réclamer des expertises médicales, affirme qu'un plan de communication "extrêmement large" consistant en l'envoi de "300.000 communications par courrier, fax et mail, auprès de 100.000 professionnels de santé" avait été engagé au moment du lancement en France de la nouvelle formule.
"On ne peut pas globaliser l'approche", a assuré à la presse le directeur juridique de Merck, Florent Bensadoun, ajoutant que ce dossier comportait "beaucoup d'émotion".
"Je ne veux plus entendre parler de Merck"
Dans la salle, quelque 200 plaignants, en majorité des femmes, assistent à l'audience.
"Tout allait bien entre 1991 et 2017" pour Véronique Caute, 48 ans, patiente venue du Lot-et-Garonne, qui a ressenti avec le Levothyrox nouvelle formule des "maux de tête constants, des crampes, de la forte fatigue", ainsi qu'une rapide prise de poids.
"J'ai besoin qu'on nous reconnaisse comme victimes", a estimé cette conseillère en insertion professionnelle, qui souhaite "aller jusqu'au bout de la procédure".
Le récit de Corinne Lefranc, comptable de 52 ans, est quasi similaire: "une grosse fatigue et de la déprime" subitement au printemps 2017.
Après s'être procuré dans un premier temps l'ancienne formule à l'étranger, Mme Lefranc a changé de médicament, Merck n'étant désormais plus en situation de monopole en France. "Je ne veux plus entendre parler de Merck", a-t-elle dit.
Au total, trois millions de patients prennent ce médicament en France (premier marché mondial) et 2,5 millions de malades utilisent la nouvelle formule, selon Merck.
Les salles du Palais de Justice de Lyon sont littéralement trop petites pour accueillir la première audience du procès du Levothyrox ce lundi 3 décembre. 4113 plaignants accusent le laboratoire allemand Merk d'un "défaut d'information" sur la nouvelle formule du médicament, qui a selon eux causé de nombreux effets indésirables.
Face au nombre important de plaignants, la salle "Double Mixte" située à Villeurbanne a été réquisitionnée. Elle accueille d'ordinaire des événements festifs comme des concerts, des festivals ou encore des congrès ou des concours.
Le 24 octobre, le groupe allemand avait été assigné dans le cadre d'une action collective pour "défaut d'information" et "préjudice d'angoisse". En cause, une vague de critiques qui ont émergé au mois d'août 2017, à propos des effets secondaires indésirables de la nouvelle formule du médicament prescrit à 3 millions de Français souffrant d'hypothyroïdie.
"Quand je me couche, j'ai des tremblements, la nuit, des insomnies, la journée, des douleurs osseuses et articulaires. J'ai l'impression de devenir dépressive malgré moi, je ne sors même plus de chez moi pour aller à la boîte aux lettres", avait confié une des patientes sous Levothyrox au HuffPost.
Outre cette action civile à Lyon, l'affaire fait l'objet de plusieurs procédures, dont une information judiciaire contre X instruite par le pôle santé du TGI de Marseille.
Me Christophe Lèguevaques, l'avocat toulousain qui a assigné le laboratoire, réclame une indemnité forfaitaire de 10.000 euros pour chacun des plaignants.
Mi-juin l'Association française des malades de la thyroïde (AFMT) avait estimé, sur la base d'analyses qu'elle avait commanditées, que cette nouvelle formule comportait des anomalies dans sa composition, pouvant expliquer ces effets secondaires. Mais début juillet, l'Agence du Médicament (ANSM), sur la foi de nouvelles analyses, a "confirmé la bonne qualité de la nouvelle formule" du Levothyrox.
Merck a annoncé cet été qu'il prévoyait de lancer la nouvelle formule dans 21 pays de l'UE à partir de 2019.