Savez-vous que 38 % des pages internet qui existaient en 2013 sont désormais inaccessibles ? Cela représente plus de 250 millions de sites qui ont disparu dans les méandres du web ! Ce phénomène, appelé "dégradation numérique", touche tous les types de sites, des sites gouvernementaux aux réseaux sociaux, en passant par les sites de particuliers. Dans cet article, nous allons explorer les raisons de cette disparition massive de sites web et les conséquences que cela peut avoir pour les individus, les entreprises et les gouvernements. Prêt à plonger dans les profondeurs du web ?
Crédit image : DALL-E
Salut tout le monde ! Aujourd'hui, je vais vous parler d'un phénomène qui touche le monde numérique et qui est loin d'être drôle : la "dégradation numérique". Selon une étude réalisée par le Pew Research Center, 38 % des pages internet qui existaient en 2013 sont désormais inaccessibles. Oui, vous avez bien lu, plus de 250 millions de sites ont disparu dans les méandres du web !
Mais avant de rentrer dans le vif du sujet, laissez-moi vous donner quelques chiffres pour vous faire comprendre l'ampleur du phénomène. Selon les données du Real Time Statistics Project, le nombre de sites Internet en ligne a été multiplié par dix entre 2008 et 2017, passant de 172 millions à plus d’1,7 milliard. Et oui, en à peine 10 ans, le nombre de sites a explosé !
Mais alors, comment expliquer la disparition de tous ces sites ? Les raisons sont multiples et variées. Tout d'abord, les sites gouvernementaux sont concernés par ce phénomène. En effet, la plupart d'entre eux ont migré vers des adresses sécurisées "https", ont été transformés en documents "statiques" (comme des PDF) ou redirigent désormais vers une nouvelle adresse. Et oui, même les gouvernements ne sont pas à l'abri de la "dégradation numérique" !
Mais ce phénomène ne touche pas que les sites gouvernementaux, les particuliers sont également concernés. En effet, la maintenance d'un site génère des frais qui sont généralement compensés par le trafic. Mais lorsqu'une page cesse d'être visitée, elle perd la raison de son existence et finit par disparaître. Et oui, sur le web, il faut savoir se renouveler pour ne pas sombrer dans l'oubli ! (et là, je sais de quoi je parle !)
Mais le phénomène de la "dégradation numérique" ne s'arrête pas là. Selon une étude du Pew Research Center, 21 % des pages officielles comportent au moins un lien inaccessible. Et oui, même les pages officielles ne sont pas à l'abri des liens morts !
Mais ce n'est pas tout, les réseaux sociaux sont également concernés par ce phénomène. En effet, près d'un cinquième (18 %) des tweets publiés dans le cadre de l’étude du Pew ont disparu en à peine quelques mois. Et oui, même sur les réseaux sociaux, il faut savoir être réactif pour ne pas disparaître !
Enfin, dernier exemple et non des moindres, Wikipedia. Selon une étude, plus de la moitié (54 %) des références renvoient vers des pages qui n’existent désormais plus. Et oui, même la célèbre encyclopédie en ligne n'est pas à l'abri de la "dégradation numérique" !
Alors, que faire pour lutter contre ce phénomène ? Tout d'abord, il est important de bien référencer ses pages et de vérifier régulièrement les liens pour éviter les liens morts. Ensuite, il est important de mettre à jour régulièrement son site pour maintenir l'intérêt des visiteurs. Enfin, il est important de sauvegarder régulièrement son site pour éviter de tout perdre en cas de problème.
Voilà, vous savez tout sur la "dégradation numérique". Alors, n'oubliez pas de bien entretenir votre site et de sauvegarder régulièrement vos données pour éviter de disparaître dans les méandres du web !
Sources multiples :
Pew Research
Real Time Statistics Project
Le Grand Continent
Publié le 31 Mai 2024 par Technifree
La question des formats sur le web est une chose fascinante. Comprendre l'émergence hier de Vine, et aujourd'hui de TikTok [et de Youtube Shorts, clone des précédents permettant de réaliser des vidéos de 6 secondes], c'est plonger dans l'histoire du web. De ce qui mena des premières pages "homepages" à la "statusphère" en passant par l'âge d'or puis le déclin des blogs (mon tout premier livre paru en 2008 ...) mais aussi l'imposition de la vidéo comme outil de captation attentionnelle semblant aujourd'hui indépassable.
Au commencement du web n'était que le texte. Les premiers navigateurs ne lisaient pas les images et dès que les images furent lues, il fallait de longues minutes avant de charger, ligne à ligne, un Gif mal dégrossi d'à peine quelques dizaines de kilos octets. Au commencement, donc, n'était que le texte. A l'époque déjà, on conversait pas mal sur IRC, l'ancêtre des Messenger et WhatsApp d'aujourd'hui. Et sur nos pages personnelles, sur nos "Homepages", si l'on pouvait faire long on se contentait bien souvent de faire court. Tout le monde faisait court. Les premières pages web des premiers sites marchands ou institutionnels en ligne se contentaient de courts paragraphes en texte noir sur fond gris. Avec parfois mais rarement, mais péniblement, quelques images en basse définition que l'on prenait des heures à regarder charger. Le format c'est le texte.
Au commencement du web c'était l'attente. On attendait. On attendait du texte. On attendait que les pages se chargent. On attendait que les images s'affichent. On attendait que la page suivant arrive. On attendait beaucoup. Et l'on était content lorsque l'attente cessait et que le texte s'affichait. Les débits augmentant (très très très mollement) et les forfaits des FAI (fournisseurs d'accès) devenant presque raisonnables (on parle quand même de plus de 30 euros par mois pour les premiers forfaits "illimités" avant quoi on était sur l'équivalent de 5 euros de l'heure !), on s'offrait la joie de payer pour poireauter. Le format c'était l'attente.
Petit à petit, tels des pionniers de canapé, quelque-un.e.s se lancèrent dans la création de leurs pages personnelles. Le web, ce web là en tout cas, devint une féérie chatoyante de mauvais goûts entremêlés où chacun se racontait sans se dire. Le format c'était le mauvais goût chatoyant et les premiers gifs animés jusqu'à la nausée.
Et puis il y eut, l'arrivée et l'explosion des blogs. Nous sommes début 2002. Les blogs et les premières 'plateformes' (Typepad, Live Journal, Blogger, etc.) c'est la possibilité de faire long sans avoir pour autant à se coller la nécessité du code HTML et de l'hébergement via FTP. Vous vous souvenez du FTP ? Le "File Transfer Protocol" qui faisait de chacun de nous des Franc Tireurs et Partisans de l'avènement d'un web où chacun, enfin, allait pouvoir écrire. Si dès le début des blogs l'empan scriptural ne souffre théoriquement plus aucune limite y compris technique, les blogs vont pourtant s'affirmer comme la forme d'une nouvelle brièveté, une brièveté ante-chronologique : il y a des journaux intimes et puis il y a tout le reste, les experts, les anonymes, les blogueurs influents, esquisse des actuels influenceurs. Sur les blogs on partage, et oui, déjà, on partage des étonnements, des choses lues, des images, et des liens, beaucoup de liens. Le format c'est le partage et l'expression de soi. Cela paraît peut-être anecdotique mais pour la première fois, un média, le web, devient saturé d'intime et d'expressions privées. Ce n'est pas anecdotique.
Youtube est créé en 2005 et racheté par Google en 2006. Lorsque c'est la vidéo qui devient le format de référence pour celles et ceux soucieux de conquêtes attentionnelles toujours plus vastes, la vidéo est souvent courte. En 2004 la 3G a débarqué en France. On peut commencer à naviguer en haut débit (pour l'époque) y compris sur des ressources et des formats excessivement gourmands en débit. Le streaming encore balbutiant au début des années 2000 va prendre définitivement son essor. En 2007 débarque le premier iPhone. 3G + smartphone + vidéo : plus rien, sur le web, ne sera jamais comme avant. Le format c'est du lourd. Lourd en poids, lourd en débit, lourd en équipement.
Faire court c'est aussi le format imposé par les réseaux sociaux, Facebook en 2004 et Twitter en 2007. On ne publie plus des contenus, on publie des "statu(t)s", des "états" (d'âme) des "positions" (géographiques), on "dit" (ce qu'on écoute, ce qu'on regarde, etc.). En un nombre de signes limité : 140 pour Twitter, 160 sur Facebook, avant extension (à 280 pour le premier, à ... 63 000 pour le second). Le format c'est "hic et nunc" : où je suis, ce que je fais, dans quel état, à quel endroit. Ici et maintenant et recommencement. Mais le web, fut-il celui des plateformes ne saurait être un étroit. Alors on ouvre et l'on peut insérer et partager des sons et des images, et comme par compensation de ce texte empêché en longueur, on peut en longueur "s'actualiser", et puis regarder les autres s'actualisant.
Vous vous souvenez du web où le format c'était l'attente ? Et bien on continue d'attendre. Mais on attend les autres cette fois, et non pas les pages. Et puisque c'est l'autre que l'on attend, et puisque l'on ne paie presque plus pour attendre, alors on ne supporte presque plus ... de l'attendre. Après la navigation, après la publication, le nouveau format c'est l'injonction. Cela peut paraître anecdotique, mais pour la première fois avec Facebook en 2004, on nous demande de dire quelque chose. C'est tout sauf anecdotique.
Le format c'est aussi celui du droit. Derrière chaque évolution, texte, image, vidéo, il y a des questions de droit. Des droits. Des droits d'auteur notamment. Alors faire court ce fut aussi un temps, s'affranchir de risques de poursuite dans une économie du remix mondialisée. A moindre coût. A moindre court. A moindre frais.
Dans la capsule. C'est la dernière étape. Jusqu'à ce jour en tout cas. Complémentaire des précédentes. Le temps qui est celui de "l'encapsulage" et qui préfigure les médias sociaux mainstream actuels. Progressivement, la capacité comme la nécessité de faire lien, de déployer des hyperliens, cette capacité s'amenuise alors qu'il devient de plus en plus facile "d'encapsuler" un contenu dans un autre. On ne renvoie plus vers un ailleurs, on ramène vers un "à soi". Les "widgets", les trucs rigolos genre "Bitty Browser", Netvibes bien sûr en 2005, et plus globalement la page web, cette entité documentaire première qui ne cesse de se fracturer, de se fragmenter. Or lorsque l'on arrête d'adresser des externalités, lorsque l'on ne fait plus qu'établir des internalités supposées se suffire à elles-mêmes, on cesse alors progressivement de naviguer, on s'habitue à faire défiler. Les réseaux sociaux arrivent et se déploient massivement dans ce contexte d'usage qui les précède et les prépare en un sens. Ils n'ont alors qu'à achever d'alléger la tâche d'encapsulage dans sa charge technique et cognitive, ils n'ont qu'à la rendre fluide pour qu'elle s'impose.
Le rêve du web est mort. Il n'est plus question d'un Homme, d'une page et d'une adresse, mais que toute l'humanité (connectée) réside à la même adresse, qu'à cette adresse on ne trouve qu'une seule et même page changeant et se rechargeant tout le temps, et que, selon les âges de la vie, comme dans l'énigme du Sphinx, cette page s'appelle Tik-Tok, Instagram ou Facebook. L'énigme du Sphinx vraiment, presque littéralement :
"Quel être, pourvu d'une seule voix, a d'abord quatre jambes le matin, puis deux jambes le midi, et trois jambes le soir ?"
Le corps à 4 membres sur TikTok, 4 membres qui dansent. Deux jambes sur Instagram, celles de l'adolescence, de l'autonomie que l'on se construit dans le regard des autres, des siens, des "comme soi" ou des "comment l'on voudrait être soi". Et puis Facebook le soir, toujours nos deux jambes et cette canne conversationnelle, cette béquille cognitive.
Ce n'est pas la taille, c'est le temps qui compte. Durant toutes ces années, la question de la durée de ce que l'on partage est devenue secondaire, derrière la question du temps nécessaire pour établir ce partage ; question elle-même reléguée à l'arrière-plan de celle du temps qu'occupera la publicité dans la durée du partage comme du visionnage. Avez-vous remarqué qu'il n'est pas rare aujourd'hui de passer davantage de temps à regarder la ou les publicités conditionnant l'accès à un contenu que ce contenu lui-même ? Mais dans la cour principale des plateformes, l'essentiel demeure de faire court. Le format c'est la vitesse. Il faut publier vite. Il faut partager vite. Il faut visionner vite. Il faut vite passer au visionnage suivant. On attend toujours, mais on n'attend plus des pages, on n'attend plus des gens, on attend que se maintienne un rythme, une cadence, un enchaînement, une ritournelle.
Longtemps chacun cherchait son court. Un court billet de blog à lire. Une courte vidéo à regarder. Chacun cherchait son court mais chacun suivait son lien. Il y avait bien sûr déjà des attracteurs étranges qui l'on n'appelait pas encore "influenceurs", le capitaine Gloasguen d'Embruns et quelques autres ; mais il n'y avait aucun mur sur l'océan et surtout il n'y avait aucune autre relance automatique que celle de notre propre curiosité ou du coût cognitif permettant de pallier notre ennui de surfeur dilettante en allant chercher un dernier lien, pour la route.
Tout est question de rythme. Sur le web et les plateformes aussi. 120 battements par minute pour la House des années 1990, celle des débuts du web. Et 24 images par seconde pour le cinéma. Et sur le web, tant d'autres formats. Mais toujours plus courts, 10 secondes, 15 secondes mais avec le plus souvent non plus 24 mais 30 images par seconde (comme le réclame la norme NTSC en vigueur aux USA). Comme le nombre de signes de la statusphère, dire toujours plus mais avec toujours moins de texte. Des vidéos toujours plus courtes mais avec toujours plus d'images.
"Less is More" écrivait et prônait l'architecte Mies Van Der Rohe. Il ne s'agit plus ici d'une forme d'épure, mais d'une recherche de tout ce qui sature.
Comme une contraction, un Big Crunch qui serait en cours plus de 30 ans après le Big Bang initial du web ; comme si nous étions au coeur de cette contraction sans savoir ce qui en sortira vraiment : un métavers, un tyran populiste, ou le compte TikTok d'un tyran populiste dans le métavers.
Comme chercheur, comme enseignant, comme parent, comme usager du web, je regarde ce temps passé à dilater du pouce ou de l'index des fragments signifiants d'insignifiance. Ces distractions. Souvent seulement vues uniquement comme des "dys-tractions", des anomalies de ce qui nous meut, de ce qui nous tire et nous attire ; distractions et dys-tractions qui, si elles en sont souvent, ne sont pas uniquement cela. Regarder et essayer de comprendre ce qui s'y invente, ce qui s'y déploie, et ceux qui s'y replient, aussi. A se demander où est la fiction pour sortir de l'affliction.
Jamais autant de gens n'ont raconté autant d'histoires. Et jamais autant d'histoires n'ont été aussi semblables. Communes ritournelles. La question est de savoir ce qui reste de la capacité de fiction quand toutes les histoires se publient sans friction et quand seules les frictions semblent capables de "faire histoire" dans le débat public.
La forme courte, les formes courtes ont toujours été présentes dans nos espaces sociaux, dans nos espaces publics, dans nos horizons culturels : litotes, métonymies, syllogismes, haïkus, apophtegmes, aphorismes, épigrammes, maximes, proverbes, feuilletons et aujourd'hui séries ... Les formes narratives, poétiques ou même rhétoriques courtes ont toujours été un essentiel de nos sociétés. Elles sont aujourd'hui au cœur de l'essentiel de nos usages numériques.
Des brièvetés en concurrence comme en co-occurence : celle de la série qui se déploie dans la longueur des saisons qui la composent ; celle du Tweet qui s'articule en Thread ou se déploie sans le défilement infini des autres gazouillis ; celle de la vidéo TikTok de 15 secondes qui fait collection au milieu d'autres dont le visionnage nécessiterait bien plus qu'une seule vie.
Faire court. Imiter le court. Reproduire le court. Faire rythme. Ce défilement est avant tout un battement, une pulsation. Le format aujourd'hui c'est la pulsation. C'est pourquoi il importe de savoir comment en contrôler la vitesse. La vitesse de ces enchaînements déterminés algorithmiquement dans le seul but de fabriquer des routines d'aliénation scopique, cette capacité à ne valoriser le court que tant qu'il concourt à fabriquer de l'artificiellement long en continu, ce refus total et programmatique du discontinu, cela interroge aujourd'hui notre capacité plus globale, plus politique, à nous confronter à des régimes narratifs nécessitant d'articuler le temps long comme autre chose que la simple agrégation de séquences courtes.
Je regardais mes étudiant.e.s faisant défiler leur compte TikTok. Je regardais mes enfants faire de même. J'avais envie d'écrire un billet. Je n'ai pas eu le temps de faire plus court.
"Je n'ai fait [cette lettre] plus longue que parce que je n'ai pas eu le loisir de la faire plus courte."
Blaise Pascal, Les Provinciales, lettre 16.
Imaginer ce monde où un autre Blaise Pascal écrirait aujourd'hui :
"Je n'ai fait ce Tweet plus court que parce que je n'ai pas eu le loisir de le faire plus long."
Les navigateurs web étaient faits pour… naviguer.
Aujourd’hui on ne navigue plus sur internet, il n’y a plus d’exploration.
On reste entre des murailles bien définis. Celles de quelques gros écosystèmes, Facebook, Google…
Naviguer le web à perdu son sens, parce qu’il n’y a plus de navigation.
Pourtant, il existe encore quelque chose en dehors de ces murailles.
Un web sauvage, naturel, appelle-le comme tu veux.
Mais ce qui est sûr c’est qu’il y a beaucoup plus à découvrir, on y trouve beaucoup plus de liberté, de créativité qu’à l’intérieur des murailles...
Pour Tim Berners-Lee, l'Internet dont il avait rêvé échouera si l'on ne crée par un cadre strict pour lutter contre la désinformation et l'exploitation des données personnelles.
Il signe « Monsieur Tim » mais cette lettre est du père d'Internet, Sir Tim Berners-Lee. C'est à lui qu'on doit le Web tel qu'on le connaît aujourd'hui, et dans une longue lettre publiée sur le site de la Web Foundation, il revient sur son invention d'un « système de gestion de l'information » pour le plus grand nombre, et il évoque son avenir.
Lui qui souhaitait simplement donner accès à l'information avec la notion de partage constate aujourd'hui que le Web est devenu « une place publique, une bibliothèque, un cabinet de médecin, un magasin, une école, un studio de design, un bureau, un cinéma, une banque et bien plus encore ». S'il admire aussi le fait que la moitié de la population soit connectée et qu'Internet simplifie et enrichit la vie quotidienne, il regrette qu'il soit aussi devenu le terreau des « fraudeurs, une voix à ceux qui propagent la haine et facilitent la perpétration de toutes sortes de crimes ».
Pour freiner cette tendance et revenir à un espace bienveillant et sûr, Berners-Lee milite pour la mise en place de lois et d'un code, semblable à celui que l'on trouve dans la vie de tous les jours. Il prône de s'attaquer à la cause et non aux symptômes, et cela exige un travail en profondeur avec un esprit communautaire. Il prend ainsi exemple sur la Déclaration universelle des droits de l'homme, née de l'esprit de gens venus de tous bords et il souhaite qu'Internet soit reconnu comme « un droit humain et construit pour le bien public ». Cela passe forcément par le soutien des gouvernements, garants de la protection des droits et libertés des personnes en ligne, mais aussi capables de sévir lorsque les intérêts privés de sociétés menacent le bien public.
L'internaute peut contrôler ce qu'il partage sur les réseaux sociaux. Mais les failles sont nombreuses et des applications continuent de récolter les informations confidentielles pour les monnayer. © Futura
L'internaute peut contrôler ce qu'il partage sur les réseaux sociaux. Mais les failles sont nombreuses et des applications continuent de récolter les informations confidentielles pour les monnayer. © Futura
En tournée pendant deux jours à travers la planète pour fêter les 30 ans de son invention, Berners-Lee s'est aussi exprimé dans une interview auprès de journalistes, dont nos confrères de l’AFP. Il cible son combat contre la désinformation (fake news) et le manque de protection des données. « On devrait avoir le contrôle complet de ses données. Ce n'est pas de l'essence. Ce n'est pas un produit, rappelle-t-il. On ne devrait pas pouvoir les vendre contre de l'argent car c'est un droit. »
Très affecté par l'affaire Cambridge Analytica, il milite pour un navigateur plus anonyme et des applications qui ne stockent plus les données des utilisateurs. Là encore, il estime que seuls les gouvernements, avec des lois, sont capables de stopper les abus actuels : « Parfois, il faut que la législation stipule que les données personnelles, les données génétiques, ne doivent jamais être utilisées. »
Le tout en restant positif pour la suite : « Vu comment le Web a changé au cours des 30 dernières années, il serait défaitiste et dénué d'imagination de supposer que le Web tel que nous le connaissons ne puisse pas être amélioré dans les 30 prochaines années. Sinon ? On aura échoué », conclut-il.
Si Arthur Clarke a échoué à prédire le futur de la conquête spatiale pour le début du XXIe siècle il y a 50 ans, on ne peut qu'être impressionné par sa clairvoyance en ce qui concerne le monde des télécommunications qui est le nôtre. Une bonne occasion de s'en souvenir alors que l'on fête sur la toile, ce 12 mars 2019, les 30 ans de la naissance du Web au Cern.
Il y a longtemps déjà Arthur Clarke avait avancé la thèse que tout comme les États-Unis avaient été unifiés grâce au télégraphe et au train, l'Humanité et la Terre le seraient grâce aux satellites de télécommunications et aux avions de ligne. Dès les années 1960, on le voyait préciser cette thèse avec des prédictions visionnaires lors d'une émission de la BBC et encore au début des années 1970 comme le montre la vidéo ci-dessous. Lui faisait écho, dès 1962, la fameuse expression de « village global » que l'on doit au philosophe et sociologue des médias canadien Marshall McLuhan. Les deux hommes pensaient que les progrès des télécommunications et de l'informatique allaient aider l'Humanité à développer une conscience et une culture planétaires.
On peut constater dans cette vidéo datant de 1976 qu'Arthur Clarke anticipait clairement non seulement le World Wide Web et les utilisations que l'on en fait, d'arXiv à Skype en passant par Amazon et Google, mais aussi les téléphones portables connectés au World Wide Web qui nous permettent, par exemple, d'écouter des documentaires d'Haroun Tazieff au sommet du Vulcano dans les îles éoliennes. Nous pouvons également assister en direct aux 30 ans du World Wide Web ce 12 mars 2019, avec une manifestation au Cern qui sera notamment retransmise en direct sur les chaînes Facebook et YouTube du célèbre centre de recherche européen où l'on a fait la découverte du boson de Brout-Englert-Higgs.
Rappelons en effet que c'est au Cern, en mars 1989, que le Britannique Tim Berners-Lee (anobli depuis) a commencé à rédiger le contenu de sa proposition d'« un système hypertexte basé sur Internet permettant de relier différents ordinateurs et d'accéder ainsi à des informations », comme l'explique le communiqué du Cern pour les 30 ans de la toile. Si Internet, c'est-à-dire des protocoles de communication entre ordinateurs, remonte en fait aux années 1960 et est essentiellement une création anglo-saxonne principalement portée aux États-unis par l'Armée avec la Defense Advanced Research Projects Agency (Darpa) qui va donner naissance à Arpanet (Advanced Research Projects Agency Network), le jeune informaticien, qui était venu au Cern quelques années auparavant pour travailler sur le fameux Proton Synchrotron, va le conduire à une métamorphose qui, aujourd'hui, impacte plusieurs milliards de personnes sur Terre.
Mais à la base, il s'agissait de rendre disponible une même information centralisée à toute la communauté mondiale en physique des hautes énergies, que ce soit en Europe, aux États-Unis ou encore au Japon. Pour cela, Tim Berners-Lee va être amené à introduire des éléments qui nous sont désormais familiers comme le langage html, le protocole http avec URL et bien sûr les premiers serveur, navigateur et éditeur web. Il fut aidé à ses débuts par l'ingénieur et informaticien belge Robert Cailliau qui cosigna notamment avec Tim Berners-Lee, en novembre 1990, un document désormais entré dans l'Histoire et intitulé « WorldWideWeb : Proposition pour un projet hypertexte ».
L'Histoire se mettra vraiment en marche le 30 avril 1993 lorsque le Cern mettra gratuitement dans le domaine public la dernière version du logiciel derrière le World Wide Web. Et cela, conformément au statut même du Cern depuis sa fondation qui a pour principe de diffuser librement, in fine, les découvertes scientifiques et les avancées technologiques, et pas seulement entre les nations qui sont membres du laboratoire.
En France, le Web s'installe au début des années 1990 grâce à deux ingénieurs du CNRS travaillant à Lyon au Centre de calcul de l'Institut national de physique nucléaire et de physique des particules (plus connu sous le sigle de l'IN2P3) : Wojciech Wojcik et Daniel Charnay.
Créé dans un idéal d’échange libre et gratuit il y a trente ans, le web est désormais dominé par des géants marchands. Alors, quelle place pour la collaboration sur la Toile ?
On le connaît aujourd’hui sous son petit nom, « trois w ». Il y a trente ans, le 12 mars 1989, Tim Berners-Lee, chercheur britannique au CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire) à Genève en Suisse, mettait au point le world wide web pour permettre l’échange d’informations sur Internet dans le monde entier – et non entre réseaux locaux seulement. Aidé de son collègue belge Robert Caillaud, il invente le premier serveur web (info.cern.ch), le protocole http pour localiser les informations et le langage HTML pour créer les pages. En 1993, devant le succès de ces outils, le CERN livre le code source du www et le fait tomber dans le domaine public.
Mais les services marchands ont vite pris le dessus avec l’arrivée d’Amazon en 1995 ou de Google en 1998. La tendance est à une centralisation du réseau, certains acteurs devenant incontournables par leur taille et le nombre de leurs services. « Chaque invention vient avec son ombre, résume Flore Vasseur, journaliste et auteur du livre “ Ce qu’il reste de nos rêves ” (éd. des Équateurs). L’outil web est neutre, mais les nobles intentions perdent face aux lobbies très organisés du profit et de la manipulation. Il n’y a pas de lobby du bien commun. C’est ce que défendait Aaron Swartz [un génie de l’informatique américain, il s’est suicidé sous la menace d’un procès fédéral en 2013, NDLR], auquel je consacre mon livre, qui incarnait la défense du bien, ce qu’internet produit de mieux : l’accès libre au savoir, contre le flicage qu’on voit à l’œuvre désormais. »
L’application prochaine de la législation européenne – article 13 et article 11, qui rend responsables les plateformes internets de contenus qu’elles offrent, au risque de fortes amendes – menace aussi la liberté de création sur YouTube, selon Dead Will (alias Wilfried Kaiser), Tourangeau qui vulgarise des concepts sociétaux grâce à des extraits de films. « Les plateformes ne vont pas rendre de risque et ne feront pas du cas par cas. On risque de ne plus pouvoir utiliser les œuvres, ce qui dans mon cas est impossible. Même si j’ai déjà recours à Wikimedias pour avoir des contenus libres de droits. » Face à cette nouvelle situation menaçant une liberté d’expression, deux attitudes sont possibles : croire à un bluff de YouTube qui ne fera pas vraiment la chasse et ne rien changer, soit espérer que la plateforme passe des accords, avec Allocine par exemple.
Ce sont des entreprises toxiques pour nos vies et ce n’est pas ça que le web voulait au départ.
Pierre-Yves Gosset, délégué général de Framasoft
Mais des villages résistent toujours à l’envahisseur, en créant des logiciels libres. Pierre-Yves Gosset, délégué général de Framasoft, explique que son site associatif s’est créé « sur une idée de partage des savoirs, de transparence et d’entraide. Par exemple Wikipedia qu’on peut modifier, partager ou enrichir librement, à condition de citer l’auteur. » L’association existe depuis dix-huit ans et s’est fixée comme objectif, en 2014 de dégoogliser internet en proposant des services alternatifs. Avec les révélations d’Edouard Snowden, en 2013, sur le programme d’espionnage américain PRISM, « nous avons découvert qu’internet était aussi un outil de surveillance. Nous avons réorienté notre action vers plus de pédagogie, pour expliquer aux gens que les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) sont un aspirateur à données personnelles. Ce sont des entreprises toxiques pour nos vies et ce n’est pas ça que le web voulait au départ. » Framasoft prépare l’avenir en pariant sur un retour aux logiciels libres après un basculement du modèle du web vers une sobriété nouvelle. 30 ans, l’âge de la maturité, devrait voir éclore « une certaine lucidité des citoyens sur l’utilité d’internet » comme l’invoque aussi Flore Vasseur. Alors, Happy birthday, Tim !
Tipeee, la plateforme alternative
Il y a cinq ans, des Youtubeurs français ont créé la plateforme Tipeee, start-up dont les internautes rétribuent les vidéos – « tip » signifie pourboire en anglais. Ce modèle permet de s’affranchir de la publicité, une alternative efficace au monopole de YouTube. « C’est un bon moyen pour ne pas dépendre de la publicité, indique Dead Will, vulgarisateur en concepts sociétaux, Tourangeau lui aussi. On revient aux fondements du web pour la diffusion de la connaissance. » Des journalistes de Thinkerview, des dessinateurs ou récemment des podcasteurs ont choisi ce mode de diffusion direct.
Outre la publication des comptes rendus de session plénière et de délibérations de l’exécutif, la Région Centre-Val de Loire livre aussi des études dynamiques sur des thématiques précises. Par exemple, elle est la première en France à fournir, en accès libre, les données de ponctualité des trains régionaux, disponibles son portail en open data. « Nous avons fait le choix de ce portail, ouvert en octobre, pour rendre la donnée intelligible, détaille Laurent Ollivier, directeur du numérique à la Region. Ce n’est pas tout de satisfaire les obligations réglementaires en libérant de la donnée, encore faut-il qu’elle soit utile. C’est vertueux pour le public mais aussi en interne, pour réfléchir à la place des données qu’on gère. »
À la tête d’une petite équipe transversale, il pilote les thèmes qui pourraient être abordés, puis le bureau exécutif les valide. « Nous travaillons autour du tourisme, mais aussi du patrimoine, continue Laurent Ollivier. Nous avons des données de qualité qui représentent un potentiel colossal pour le tourisme par exemple. Les acteur privés pourraient s’en servir pour faire du business. »
Il y a dix ans, nous avons eu besoin de Google Chrome pour libérer le Web de l’hégémonie des entreprises, et nous avons réussi à le faire pendant une courte période. Aujourd’hui, sa domination étouffe la plateforme même qu’il a autrefois sauvée des griffes de Microsoft. Et personne, à part Google, n’a besoin de ça.
Nous sommes en 2008. Microsoft a toujours une ferme emprise sur le marché des navigateurs web. Six années se sont écoulées depuis que Mozilla a sorti Firefox, un concurrent direct d’Internet Explorer. Google, l’entreprise derrière le moteur de recherche que tout le monde aimait à ce moment-là, vient d’annoncer qu’il entre dans la danse. Chrome était né.
Au bout de deux ans, Chrome représentait 15 % de l’ensemble du trafic web sur les ordinateurs fixes — pour comparer, il a fallu 6 ans à Firefox pour atteindre ce niveau. Google a réussi à fournir un navigateur rapide et judicieusement conçu qui a connu un succès immédiat parmi les utilisateurs et les développeurs Web. Les innovations et les prouesses d’ingénierie de leur produit étaient une bouffée d’air frais, et leur dévouement à l’open source la cerise sur le gâteau. Au fil des ans, Google a continué à montrer l’exemple en adoptant les standards du Web.
Avançons d’une décennie. Le paysage des navigateurs Web est très différent. Chrome est le navigateur le plus répandu de la planète, faisant de facto de Google le gardien du Web, à la fois sur mobile et sur ordinateur fixe, partout sauf dans une poignée de régions du monde. Le navigateur est préinstallé sur la plupart des téléphones Android vendus hors de Chine, et sert d’interface utilisateur pour Chrome OS, l’incursion de Google dans les systèmes d’exploitation pour ordinateurs fixe et tablettes. Ce qui a commencé comme un navigateur d’avant-garde respectant les standards est maintenant une plateforme tentaculaire qui n’épargne aucun domaine de l’informatique moderne.
Bien que le navigateur Chrome ne soit pas lui-même open source, la plupart de ses composantes internes le sont. Chromium, la portion non-propriétaire de Chrome, a été rendue open source très tôt, avec une licence laissant de larges marges de manœuvre, en signe de dévouement à la communauté du Web ouvert. En tant que navigateur riche en fonctionnalités, Chromium est devenu très populaire auprès des utilisateurs de Linux. En tant que projet open source, il a de nombreux adeptes dans l’écosystème open source, et a souvent été utilisé comme base pour d’autres navigateurs ou applications.
Tant Chrome que Chromium se basent sur Blink, le moteur de rendu qui a démarré comme un fork de WebKit en 2013, lorsque l’insatisfaction de Google grandissait envers le projet mené par Apple. Blink a continué de croître depuis lors, et va continuer de prospérer lorsque Microsoft commencera à l’utiliser pour son navigateur Edge.
La plateforme Chrome a profondément changé le Web. Et plus encore. L’adoption des technologies web dans le développement des logiciels PC a connu une augmentation sans précédent dans les 5 dernières années, avec des projets comme Github Electron, qui s’imposent sur chaque OS majeur comme les standards de facto pour des applications multiplateformes. ChromeOS, quoique toujours minoritaire comparé à Windows et MacOS, s’installe dans les esprits et gagne des parts de marché.
Chrome est, de fait, partout. Et c’est une mauvaise nouvelle
Don’t Be Evil
L’hégémonie de Chrome a un effet négatif majeur sur le Web en tant que plateforme ouverte : les développeurs boudent de plus en plus les autres navigateurs lors de leurs tests et de leurs débogages. Si cela fonctionne comme prévu sur Chrome, c’est prêt à être diffusé. Cela engendre en retour un afflux d’utilisateurs pour le navigateur puisque leurs sites web et applications favorites ne marchent plus ailleurs, rendant les développeurs moins susceptibles de passer du temps à tester sur les autres navigateurs. Un cercle vicieux qui, s’il n’est pas brisé, entraînera la disparition de la plupart des autres navigateurs et leur oubli. Et c’est exactement comme ça que vous asphyxiez le Web ouvert.
Quand il s’agit de promouvoir l’utilisation d’un unique navigateur Web, Google mène la danse. Une faible assurance de qualité et des choix de conception discutables sont juste la surface visible de l’iceberg quand on regarde les applications de Google et ses services en dehors de l’écosystème Chrome. Pour rendre les choses encore pires, le blâme retombe souvent sur les autres concurrents car ils « retarderaient l’avancée du Web ». Le Web est actuellement le terrain de jeu de Google ; soit vous faites comme ils disent, soit on vous traite de retardataire.
Sans une compétition saine et équitable, n’importe quelle plateforme ouverte régressera en une organisation dirigiste. Pour le Web, cela veut dire que ses points les plus importants — la liberté et l’accessibilité universelle — sont sapés pour chaque pour-cent de part de marché obtenu par Chrome. Rien que cela est suffisant pour s’inquiéter. Mais quand on regarde de plus près le modèle commercial de Google, la situation devient beaucoup plus effrayante.
La raison d’être de n’importe quelle entreprise est de faire du profit et de satisfaire les actionnaires. Quand la croissance soutient une bonne cause, c’est considéré comme un avantage compétitif. Dans le cas contraire, les services marketing et relations publiques sont mis au travail. Le mantra de Google, « Don’t be evil« , s’inscrivait parfaitement dans leur récit d’entreprise quand leur croissance s’accompagnait de rendre le Web davantage ouvert et accessible.
Hélas, ce n’est plus le cas.
Logos de Chrome
L’intérêt de l’entreprise a dérivé petit à petit pour transformer leur domination sur le marché des navigateurs en une croissance du chiffre d’affaires. Il se trouve que le modèle commercial de Google est la publicité sur leur moteur de recherche et Adsense. Tout le reste représente à peine 10 % de leur revenu annuel. Cela n’est pas forcément un problème en soi, mais quand la limite entre navigateur, moteur de recherche et services en ligne est brouillée, nous avons un problème. Et un gros.
Les entreprises qui marchent comptent sur leurs avantages compétitifs. Les moins scrupuleuses en abusent si elles ne sont pas supervisées. Quand votre navigateur vous force à vous identifier, à utiliser des cookies que vous ne pouvez pas supprimer et cherche à neutraliser les extensions de blocage de pub et de vie privée, ça devient très mauvais1. Encore plus quand vous prenez en compte le fait que chaque site web contient au moins un bout de code qui communique avec les serveurs de Google pour traquer les visiteurs, leur montrer des publicités ou leur proposer des polices d’écriture personnalisées.
En théorie, on pourrait fermer les yeux sur ces mauvaises pratiques si l’entreprise impliquée avait un bon bilan sur la gestion des données personnelles. En pratique cependant, Google est structurellement flippant, et ils n’arrivent pas à changer. Vous pouvez penser que vos données personnelles ne regardent que vous, mais ils ne semblent pas être d’accord.
Le modèle économique de Google requiert un flot régulier de données qui puissent être analysées et utilisées pour créer des publicités ciblées. Du coup, tout ce qu’ils font a pour but ultime d’accroître leur base utilisateur et le temps passé par ces derniers sur leurs outils. Même quand l’informatique s’est déplacée de l’ordinateur de bureau vers le mobile, Chrome est resté un rouage important du mécanisme d’accumulation des données de Google. Les sites web que vous visitez et les mots-clés utilisés sont traqués et mis à profit pour vous offrir une expérience plus « personnalisée ». Sans une limite claire entre le navigateur et le moteur de recherche, il est difficile de suivre qui connaît quoi à votre propos. Au final, on accepte le compromis et on continue à vivre nos vies, exactement comme les ingénieurs et concepteurs de produits de Google le souhaitent.
En bref, Google a montré à plusieurs reprises qu’il n’avait aucune empathie envers ses utilisateurs finaux. Sa priorité la plus claire est et restera les intérêts des publicitaires.
Voir au-delà
Une compétition saine centrée sur l’utilisateur est ce qui a provoqué l’arrivée des meilleurs produits et expériences depuis les débuts de l’informatique. Avec Chrome dominant 60 % du marché des navigateurs et Chromium envahissant la bureautique sur les trois plateformes majeures, on confie beaucoup à une seule entreprise et écosystème. Un écosystème qui ne semble plus concerné par la performance, ni par l’expérience utilisateur, ni par la vie privée, ni par les progrès de l’informatique.
Mais on a encore la possibilité de changer les choses. On l’a fait il y a une décennie et on peut le faire de nouveau.
Mozilla et Apple font tous deux un travail remarquable pour combler l’écart des standards du Web qui s’est élargi dans les premières années de Chrome. Ils sont même sensiblement en avance sur les questions de performance, utilisation de la batterie, vie privée et sécurité.
Si vous êtes coincés avec des services de Google qui ne marchent pas sur d’autres navigateurs, ou comptez sur Chrome DevTools pour faire votre travail, pensez à utiliser Vivaldi2 à la place. Ce n’est pas l’idéal —Chromium appartient aussi à Google—, mais c’est un pas dans la bonne direction néanmoins. Soutenir des petits éditeurs et encourager la diversité des navigateurs est nécessaire pour renverser, ou au moins ralentir, la croissance malsaine de Chrome.
Je me suis libéré de Chrome en 2014, et je n’y ai jamais retouché. Il est probable que vous vous en tirerez aussi bien que moi. Vous pouvez l’apprécier en tant que navigateur. Et vous pouvez ne pas vous préoccuper des compromissions en termes de vie privée qui viennent avec. Mais l’enjeu est bien plus important que nos préférences personnelles et nos affinités ; une plateforme entière est sur le point de devenir un nouveau jardin clos. Et on en a déjà assez. Donc, faisons ce que nous pouvons, quand nous le pouvons, pour éviter ça.
Sources & Lectures supplémentaires
“Parts de marché des navigateurs web”, https://fr.wikipedia.org/wiki/Parts_de_march%C3%A9_des_navigateurs_web, Wikipédia.
“Chrome is Not the Standard”, https://www.chriskrycho.com/2017/chrome-is-not-the-standard.html, Chris Krycho.
“Why I’m done with Chrome”, https://blog.cryptographyengineering.com/2018/09/23/why-im-leaving-chrome/, Matthew Green.
“Browser Diversity Starts with US”, http://www.zeldman.com/2018/12/07/browser-diversity-starts-with-us/, Jeffrey Zeldman.
Je sais que, après les retours négatifs des utilisateurs, Chrome 70 a retiré certaines de ces parties. Cependant, mon raisonnement tient toujours.
Opera et Brave sont deux autres alternatives, mais le premier est détenu par un consortium publicitaire et vidéoludique implanté en Chine, tandis que le second expérimente des modèles économiques non-conventionnels basés sur la publicité.
À l’occasion de la journée européenne de protection des données, ce lundi 28 janvier 2019, Résistance à l’Agression Publicitaire (RAP) et La Quadrature du Net, soutenues par d’autres associations, lancent une opération Bloque la pub sur Internet et passe le bloqueur à tes voisin·es.
Cette opération continue de mettre en évidence les effets négatifs de la publicité en ligne et les outils pour s’en prémunir !
Internet est devenu un espace prioritaire pour les investissements des publicitaires. En France, pour la première fois en 2016, le marché de la publicité numérique devient le « premier média investi sur l’ensemble de l’année », avec une part de marché de 29,6%, devant la télévision. En 2017, c’est aussi le cas au niveau mondial. Ce jeune « marché » est principalement capté par deux géants de la publicité numérique. Google et Facebook. Ces deux géants concentrent à eux seuls autour de 50% du marché et bénéficient de la quasi-totalité des nouveaux investissements sur ce marché. « Pêché originel d’Internet », où, pour de nombreuses personnes et sociétés, il demeure difficile d’obtenir un paiement monétaire direct pour des contenus et services commerciaux et la publicité continue de s’imposer comme un paiement indirect.
Les services vivant de la publicité exploitent le « temps de cerveau disponible » des internautes qui les visitent, et qui n’en sont donc pas les clients, mais bien les produits. Cette influence est achetée par les annonceurs qui font payer le cout publicitaire dans les produits finalement achetés.
La publicité en ligne a plusieurs conséquences : en termes de dépendance vis-à-vis des annonceurs et des revenus publicitaires, et donc des limites sur la production de contenus et d’information, en termes de liberté de réception et de possibilité de limiter les manipulations publicitaires, sur la santé, l’écologie…
En ligne, ces problématiques qui concernent toutes les publicités ont de plus été complétées par un autre enjeu fondamental. Comme l’exprime parfaitement Zeynep Tufekci, une chercheuse turque, « on a créé une infrastructure de surveillance dystopique juste pour que des gens cliquent sur la pub ». De grandes entreprises telles que Google, Facebook et d’autres « courtiers en données » comme Criteo ont développés des outils visant à toujours mieux nous « traquer » dans nos navigations en ligne pour nous profiler publicitairement. Ces pratiques sont extrêmement intrusives et dangereuses pour les libertés fondamentales.
L’Europe dispose pourtant désormais d’un règlement qui devrait mettre majoritairement fin à cette exploitation de nos données personnelles. En vertu du règlement général pour la protection des données RGPD, la plupart de ces pratiques de collecte de données personnelles en ligne devraient reposer sur un consentement libre et éclairé. Sinon, ces pratiques sont illégales. C’est sur ce fondement que La Quadrature du Net a porté plainte collectivement contre les 5 géants du numérique. Si le RGPD est rentré en application récemment et que ces plaintes collectives prennent du temps, la CNIL française a déjà agi sur des questionnements similaires, et a même, lundi 22 janvier 2019, commencé à sanctionner Google à une amende de 50 millions d’euros s’agissant de ces pratiques relatives à Android.
Il est temps que cette législation soit totalement respectée et que les publicitaires cessent de nous espionner en permanence en ligne.
Un sondage BVA-La Dépêche de 2018 révélait que 77% des Français·es se disent inquiet·es de l’utilisation que pouvaient faire des grandes entreprises commerciales de leurs données numériques personnelles. 83% des Français·es sont irrité·es par la publicité en ligne selon un sondage de l’institut CSA en mars 2016 et « seulement » 24% des personnes interrogées avaient alors installé un bloqueur de publicité.
Le blocage de la publicité en ligne apparait comme un bon outil de résistance pour se prémunir de la surveillance publicitaire sur Internet. Pour l’aider à se développer, nos associations lancent le site Internet :
Plusieurs opérations collectives ou individuelles de sensibilisation et blocages de la publicité auront lieu sur plusieurs villes du territoire français et sur Internet peu de temps avant et le jour du 28 janvier 2019, journée européenne de la « protection des données personnelles ». Le jour rêvé pour s’opposer à la publicité en ligne qui exploite ces données !
RAP et La Quadrature du Net demandent :
– Le respect de la liberté de réception dans l’espace public et ailleurs, le droit et la possibilité de refuser d’être influencé par la publicité,
– Le strict respect du règlement général pour la protection des données et l’interdiction de la collecte de données personnelles à des fins publicitaires sans le recueil d’un consentement libre (non-conditionnant pour l’accès au service), explicite et éclairé où les paramètres les plus protecteurs sont configurés par défaut. Les sites Internet et services en ligne ne doivent par défaut collecter aucune information à des fins publicitaires sans que l’internaute ne les y ait expressément autorisés.
Rendez-vous sur bloquelapub.net et sur Internet toute la journée du 28 janvier 2019
Les associations soutiens de cette mobilisation : Framasoft, Le CECIL, Globenet
Contact : contact@bloquelapub.net, contact@antipub.org, contact@laquadrature.net
Sites lourds, sites lents, pages web obèses qui exigent pour être consultées dans un délai raisonnable une carte graphique performante, un processeur rapide et autant que possible une connexion par fibre optique… tel est le quotidien de l’internaute ordinaire.
Nul besoin de remonter aux débuts du Web pour comparer : c’est d’une année sur l’autre que la taille moyenne des pages web s’accroît désormais de façon significative.
Quant à la consommation en énergie de notre vie en ligne, elle prend des proportions qui inquiètent à juste titre : des lointains datacenters aux hochets numériques dont nous aimons nous entourer, il y a de quoi se poser des questions sur la nocivité environnementale de nos usages collectifs et individuels.
Bien sûr, les solutions économes à l’échelle de chacun sont peut-être dérisoires au regard des gigantesques gaspillages d’un système consumériste insatiable et énergivore.
Cependant nous vous invitons à prendre en considération l’expérience de l’équipe barcelonaise de Low-Tech Magazine dont nous avons traduit pour vous un article. Un peu comme l’association Framasoft l’avait fait en ouverture de la campagne dégooglisons… en se dégooglisant elle-même, les personnes de Low-tech Magazine ont fait de leur mieux pour appliquer à leur propre site les principes de frugalité qu’elles défendent : ce ne sont plus seulement les logiciels mais aussi les matériels qui ont fait l’objet d’une cure d’amaigrissement au régime solaire.
En espérant que ça donnera des idées à tous les bidouilleurs…
article original : How to build a Low-tech website
Traduction Framalang : Khrys, Mika, Bidouille, Penguin, Eclipse, Barbara, Mannik, jums, Mary, Cyrilus, goofy, simon, xi, Lumi, Suzy + 2 auteurs anonymes
The museum exhibits screenshots of unique-design websites that were created between 1995 and 2005.
L’expérience utilisateur (abrégée en UX pour les professionnels anglophones) est une notion difficile à définir de façon consensuelle, mais qui vise essentiellement à rendre agréable à l’internaute son parcours sur le Web dans un objectif le plus souvent commercial, ce qui explique l’intérêt particulier que lui vouent les entreprises qui affichent une vitrine numérique sur le Web.
Sans surprise, il s’agit de monétiser l’attention et les clics des utilisateurs. L’article ci-dessous que Framalang a traduit pour vous évoque les Dark UX, c’est-à-dire les techniques insidieuses pour manipuler les utilisateurs et utilisatrices. Il s’agit moins alors de procurer une expérience agréable que d’inciter par toutes sortes de moyens à une série d’actions qui en fin de compte vont conduire au profit des entreprises, aux dépens des internautes.
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